Le document qui suit est d’autant plus intéressant qu’il est extrèmement rare pour le XVIe siècle, et qu’il est, de surcroît signé de la main de Michel de Notredame (plus connu sous le nom de « Nostradamus »). Daté du 20 octobre 1559, cette « ordonnance » est adressée à l’évêque de Béziers (Hérault), qui est un proche parent de la reine mère Catherine de Médicis.

Monseigneur, ayant calculé l’affaire de votre maladie, l’accordant avecques une triple voye, par voye de médicine, chirurgie, ensemble les accords de l’astrologie judicielle et naturelle, n’ayant obmys aulcungs aultres jugemens secretz non de mespriser. Et premièrement, pour parvenir au bot et à la fin de ce que préthendés, qui est parfaicte guérison de votre maladie, est neccessaire que premièrement dimenche, à une heure après midy, ayant disné à vostre acostumée, que vous soyt aplicqué ung botton de feu au lieu ou je vous ay monstré et touché avecques le doigt, et que le botton soyt comme sensuict (voir dessin), et que l’on ne le proffonde pas plus que porte le circuyt de la teste dudict boton, que après que l’aplication de cauthère ardant sera faicte, que le digestif soit faict avecques moyeau d’ung oeuf, huille rosat et burre frescq, que après que l’escarre, qui est la brusleure que le feu aura faict, sera tombé, y mectrés dedans ung patinostre d’argent qui soyt faict demy cuyvre et demi argent, et soyt mis dedans le trou jusques à ce que soyt tout profondre dedans, puis après prandrés une ou deux feulhes de Hedera parietis la plus large et plus frèche, et la mectrés dessus, et le bender avec une petite bende, et le pencer en vingt quatre heures une foys, du matin ou du soyr.
Toutesfoys le soir, par lors que vous yrés coucher, sera le melheur, et le porterés continuellement, environ l’espace de sept moys, mais asseurés vous Monseigneur, que vous n’aurés pas porté l’espace de sept à huict jours lesdictes ouvertures aux deux jambes que vous sentirés tout à ung coup ung souverain àlègement, et la plus part d’icelle froydeur incluse dedans se perdra et cela non tant seulement vous proffictera à icelle maladie que vous prétendés, mais auqqi tant que porterés lesdictes fontames ouvertes, ne sentirés ne dolleur de teste, de cerveau, de fieuvre aulcune, ne mal d’espaules, d’estomach, ne de jambes, ne d’aulcune partie du corps, car a cecy ne si aproche médecine que soyt au monde concernant principallement ce faict.

Je ne vous en fays plus long discours des vertus et efficaces que vous mesmes en peu de temps cognoistrés plus ample tesmonaige de la vérité. Aussi ne failhirés de user de la distilation que je vous escriptz que vous y trouverés ung souverain remède, vous en frotant matin et soir toute la nuque et tous les spondilles du dos jusques au dernier, et une partie des joinctures, priant à Dieu, Monseigneur, que vous doinct ce que plus désirés.

Faict à Bésiers, en faisant mon chemyn de Province à Narbonne, ce XXe octobre 1559.

Source : Archives Départementales de l’Hérault, Série G 261.
Auteur de la transcription : Jean-Claude TOUREILLE jctou@arisitum.org