Isabeau de Bavière

Dans le document qui suit, intitulé « Lettres Patantes d’Isabel, reine de France, portant règlement sur le gouvernement du royaume, racontant les calamitez et les troubles d’icelluy en 1417 », nous est conté par la reine Isabeau de Bavière (épouse de Charles VI « le Fol ») les calamités et les troubles qui accablent alors la France: « sécession » du Parlement à Paris, reprise de la guerre contre les Anglais et luttes continuelles qui opposent le parti d’Armagnac à celui des Bourguignons :

Izabel, par la grâce de Dieu royne de France, ayant pour l’occupation de Monseigneur le gouvernement et administration de ce royaume, par octroy inrévocable a nous sur ce fait par mondit seigneur, Scavoir faison a tous, presens et avenir, que entre les diverses cures et sollicitudes que nous avons continuellement, pour les affaires de mondit seigneur et la désirée et nécessaire réparation de la chose publique de son royaume, celles nous viennent premièrement devant les yeux par le moyen desquelles ledit royaume fust au commencent plus honoré augmenté et maintenu asfin que, par iceux mesmes moyens, ce qui est désolé puit estre restauré et réformé prochainement, et que les enciennes vertus et mérites qui, par vices et petitz gouvernementz, ont esté déboutées, soient, pour bien ouvrer, exemples et mémoires aux hommes de bonne voulonté, loyaux subjetz et amis de mondits seigneur et de sa seigneurie, jadis, par récitation des enciennes histoires de longtem approuvées, fut cedit royaume moult honoré pour avoir douté dieu, servy et amé et deffendu par les rois de France nostre Sainte foy catholique, dont ils ont esté appelés à leur grand gloire et louange rois très chrestiens, vrays champions et principaux deffenseurs d’icelle sainte foy, augmenté merveilleusement par la grand paix, joyeuse tranquillité et doux repos qui, par longues années, ont esté audit royaume, auquel chacun desiroit de mourir pour celle cause maintenu et continuée parce que justice est grande équité y estoit briefvement administée par les pairs de france et loyaux conseillers constitués et préposez au siège de la cour capitalle et souveraine, rendent à un chacun ce que sien estoit, exausceans et rémunerans les bons, corrigeant et punissant les mauvais selon leurs démérites, sans nul espargner, dont la renommée fust si grande et glorieuse par le monde universel que les nations et provinces, tant voisines dudit royaume comme estrangés et lointaines, souvente fois y afflueoint, les aucunes pour contempler l’estat de la justice qu’ils reputoint plus à miracle que à oeuvre humaine, les autres liberallement s’y soubsmettoint pour y avoir droit et appaisement de leurs grandz débatz et autres querelles, et y trouvoint en tout temps équité, justice et loyal jugement, et si longement que, de telles vertus, ledit royaume a esté adouré, tant longuement a-t’il demouré en prospérité, à plaisante félicité.
Mais, depuis la fin du mois de juillet en l’an mil quatre cent et treize, que sans larmes et gémissementz ne pouvons exprimer la chose, et muée et convertie en contraires oeuvres par la fausse des loyaulté, mauvaise convoitise, damnée ambition, outrageuse rapine, cruelle tyrannie et iniques conjurations et conspirations du Comte d’Armagnac et d’aucuns autres, ses consortz, complices et alliés, gens de basse, vile ou damnée et réprouvée naissance et génération, tendantz par moyens divers et exquis à la totale destruction et deshonneur de mondit seigneur et de sa seigneurie, tant par les procez qu’ilz ont faitz à Paris et publiez iniquement contre nostre très cher et très amé cousin le Duc de Bourgogne, cousin germain de mondit seigneur, redundantz par conséquent contre l’honneur et la maison de France, qui onques ne sustz et ne sera au plaisir de Dieu ordoyée de tache d’haérésie jacoit ce que ledit d’Armagnac et sesdits complices se soyent efforcés, par lesdits procez, d’en oster nostredit cousin, lesquels procés toutes voyes comme mauvais et iniques pelhantz en forme et matière, ont esté par le saint général concile de Constance canoniquement révoqués, cassés, irrités et annulés à la grand confusion, reproche et deshonneur de ceux qui lesdits avoint faitz par haine, envie et mauvaistié longuement couvée et palliée de faussetez, mensonges et controuvée, comme parce que lesditz gens de basse, vile et damnaé et réprouvée nativité ont introuduit ledit d’Armagnac au gouvernement de France et en ont fait leur escu et banière en la persécution de ce royaume, pour et qu’ilz le veoent enclin à vouloir estre chef et capitaine de toute trahison et iniquité et conduiseurs de toute tirannie et mauvaistié, contredisans et répugnantz aux décretz et ordonnances des saintz concilles généraux de Pise et de Constance, et des souverains pasteurs de Sainte Eglize esleus canoniquement en papat, lequel d’Armagnac a esté et est adhérant et obéissant à Pierre de Lune, réputé et déclaré par lesditz deux concilles, ensemble tous ses adhaérans eherestes pertinax notoire et manifeste, et en outre, pour diminuer et destruire en la fin ledit royaume, ont par force et violence entrepris le gouvernement et administration dudit royaume, tenu continuellement mondit seigneur et tous nos trois aynés fils, les uns après les autres, en grand subjection et danger, hors de toute liberté et franchise, et fait des deux d’iceux nos enfans à leurs plaisir et volonté, qui sy hastivement et piteusement ont esté mortz comme chacun scait, laquelle chose nous récitons douloureusement en grand amertume et déplaisance de nostre cuer, ont aussi laissé prendre Harfleur, et esté occasion de la honteuse et inréparable perte de neveux, cousins germains et autres parans de monddit seigneur, et de plus grand partie de sa chevalerie, prins et gastez par les Anglois, anciens ennemis et adversaires de mondit seigneur et de son royaume, souffert entrer lesdits Anglois au pays de Normandie qui, sans deffense ou résistance, ont pris plusieurs et notables cités, bonnes villes et forteresses dudit pais, non rendables, aucunement garnies de prudhommes et de vivres, empesché en toute manières qu’ils ont peu que nostredit cousin, qui a la plus grand partie de chevalerie et de noblesse que quelconque autre prince de ce royaume apprès mondit seigneur, neust accez à sa personne pour le servir à l’encontre desdits ennemis, et pour ce qu’ilz appartenoint que nous tendrons au bien de paix et bon gouvernement de son royaume asfin de nous empescher, en nostre bon propos, ont mis injurieusement et sans révérence la main à nostre personne, tout nos ioyaux, trésors et autres biens, mesmement ce que nous avions ausmoné et déposé en plusieurs églises de ce royaume pour le salut des ames de mondit seigneur et de nous, et à force de gens d’armes, nous fait mener prisonnière à Blois, et d’ilec à Tours où nous avons esté en grand misère et déplaisance jusques à ce que nostredit cousin vient par nostre ordonnance et mandement nous délivrer de leurs mains et subjection, et asfin que paix et justice n’eussent cours audit royaume comme ce qui leurs estoit plus déplaisant, abominable et contraire à leurs oeuvres et damnée intentiont, ont opprimé en diverses manières très grand nombre de solemnelz maistres, docteurs, conseillers et autres officiers de mondit seigneur, chevalliers, escuyers, bourgeois et notables marchandz, tant de Paris comme et autres cités et bonnes villes de ce royaume, qui désiroint et requeroint la paix et bon gouvernement dudit royaume en meurdrissant les aucuns tyranniquement, sans pitié et révérence d’ordre et indiférement prestres et clercs constitués en haute dignité et bénéfice de sainte Eglise, les autres jettans dans la rivière et plusieurs bannissantz, boutans hors de leurs lieux et envoyantz en exil en lointain pays, ravissantz leurs biens meubles et revenus, et tant de leurs bénéfices et offices comme de leurs patrimoine et autrement iceulx biens appliquantz à leur singulier proffit et pour appauvrir et épuiser ledit royaume de finances, ont chacun an, depuis leursdites entreprise, imposé sur gens d’église trois ou quatre dixiesme et sur le pauvre peuple deux ou trois grosses tailles, reformations et autres exactions, fait mutatations de monnoyes d’or et d’argent très préjudiciables et dommageables à la chose publique de cedit royaume et fait fondre les reliquaires et joyaux tant de mondit seigneur comme de l’église de Notre Dame de Paris et d’autres églises, pour en faire à leur plaisir, bonté, feux en divers lieux de ce royaume tué, rançonné et pillé indifféremment toutes personnes qu’ils ont peu et peuvent appréhender, qu’ils scavent estre contraire à leurs oeuvres, et fait tant d’autres cruelles et inhumaines oppressions que entendement humain pourroit penser, et en accumulant mal sur mal pour plus longuement demourer en leurs violent gouvernement et torsionaire authorité, ont mis et préposé au lieu de prudhomines pour exercer tant la justice souveraine, authorité et prudence, confédérez à eux séditieux perturbateurs de paix et conspirateurs cruels, ignorantz ennemis et adversaires du bien commun, exécuteurs des bons et souteneurs des mauvais, dont la justice souveraine et autres justices de ce royaume ont esté et sont depuis ledit temps violentéez, corrompues, paoureuses, aveuglées, subjetés et au dernier contempnées et de tous pointz subverties par le vice, faulte et coulpe en grand partie de ceux mesmes qui estoint et sont, par la manière dessus dites, constitués et praéposés à l’estat de sa cour dudit parlement et desdites autres justices, pour icelles administrer aux grandz et petitz, lesquelz justice tant pour doubte de offencer ledit d’Armagnac et sesdits complices, comme par haines mortelles et plusieurs déraisonnables causes, ont refusé et desnié et desnient à toute loyalté, personnes aymantz paix, justice et le bien commun de ce royaume, et n’est point de doubte que se depuis ledit temps, ils eussent raisonnablement et justement exercé le deub de leur office et virtueusement résisté à la tirannie et violence dudit d’Armagnac et de sesdits complices, comme ils pouvoint et devoint faire et à leurs offices appartenoit, ils eussent trouvé grand ayde et faveur de nous et des bons et loyaux subjetz de mondit seigneur, et eussent cessé les inconvenientz qui, depuis, sont pieuteusement multipliés;

Lesquelles choses et plusieurs autres qui, trop longues, seroint à escrire, considérans lamentablement, un chacun jour, et recognoissantz clairement que réparation convenable ne se peut faire des inconvéniens dessusdits se justice n’a cours et lieu en ce royaume, comme chose ne soit plus délitable des le plus nécessaire et proffitable au cours mistique de la chose publique et sans laquelle royaume et polices ne peuvent longuement d’user, et pour ce que de tout nostre cuer nous la désirons remettre sus, et icelle régner et avoir cours en cedit royaume comme jadis avoit, ainsi que tenuée et obligée y sommes par dessus tous autres, apprès mondit seigneur, tant par la grâce que Dieu nous a faite d’estre sa vraye compagne et épouse, comme par l’octroy inrévocable qu’il nous a fait, du consentement de ceux qui sont de son sang et lignage, du gouvernement de ce royaume et veantz appartementz que nous ne quelconque sont loyal subjetz, ne devons souffrir ne tollérer, mais en toute manière empescher que audit d’Armagnac et sesdits alliés et complices, qui ainsi tiennent mondit seigneur et nostre très cher et très amé fils le dauphin de Viennois et leur subjection et danger, et qui ont entrepris l’authorité et gouvernement royalle de ce royaume contre Dieu et raison, comme dit est soit obéi aucunement, ne a ceux qui de praesent tiennent et occupent le lieu, siège et estat de la cour dudit parlement à Paris, de laquelle ledit d’Armagnac et sesdits complices ont chassé, détruit et débouté plusieurs notables personnes constituées en l’estat d’icelle cour, pour ce qu’ils ne vouloint estre complices et participantz de leurs damnables gouvernement; considérans en outre que en cedit royaume ne doit avoir qu’une court capitalle et souveraine en laquelle doivent estre remises et préposées notables et solemnelles personnes de grand science, loyaulté, prudence et expérience de justice, ayans Dieu devant les yeux, aimans mondit seigneur, sa seigneurie et le bien commun de son royaume qui, pour doubte de menaces, faveurs ou acceptations de personnes rejettées toutes haines et corruption, ne laissent ou diffèrent à faire loyalté justice, tant aux grandz comme aux petitz, à la semblance et manière des vrays et loyaux juges qui, en la cour souveraine et capitalle de ce royaume, souloint par grand diligence rendre droit, justice et raison à un chacun, comme dit est, et avec ce que plusieurs discordz et débatz pourroint soudre au temps avenir, entre plusieurs personnes, et la division de ce royaume que nous entendons, au plaisir de nostre seigneur, faire cesser prochainement et unir à notre pouvoir cedit royaume, pour plus seurement et aysement résister aux anciens ennemis d’iceluy, et pourroit continuer et plus accroistre s’il avoit deux cours souveraines en ce royaume, jacoit ce que la grenieur partie d’iceluy, sans comparaison, soit jointe et adhérante aveq nous et nostredit cousin en la poursuite du bien de mondit seigneur et de sondit royaume, par icelluy nostre cousin saintement commencé et conduitte jusques à ce;

Pourquoy es choses plus raisonnables que ladite cour se tiennent es lieux plus prochains convenables et accessibles pour les pays et subjetz obéissans à mondit seigneur en ladite poursuite, attendu mesmement que au lieu de Paris quelconque loyal subjetz de nostredit seigneur de pieça n’a osé ne peu aller ne demourer pour doubte de la grand injustice et cruelle tyrannie des gouverneurs dessusdits, ayantz regard à l’occupation et empeschement notoires de mondit seigneur et de nostredit fils, à la subjection où ils sont de présent, la grand nécessité de ce royaume qui sans bonne justice ne peut estre bien gouverné, comme dit est la malice des temps, l’iniquité des hommes qui droittement deussent juger par la coulpe et faulte desquelz est besoing de pourvoir convenablement à la justice souveraine et capitalle dudit royaume, et attendantz plusieurs autres causes justes, raisonnables, nécesaire et profitables pour le bien et honneur de mondit seigneur et de justice qui, a ce, nous ont meu et meuvent par l’advis, conseil et délibération de nostredit cousin, de plusieurs autres grands seigneurs du sang et lignage de mondit seigneur, prélatz, barons et autres notables et sages personnes pour ce assemblés par devers nous en grand et solemnel nombre, la cour du parlement de mondit seigneur estant à Paris, comprise en icelle la grand chambre, celles des requestes de l’hostel de mondit seigneur, des enquestes et des requestes du palais et tous les offices dépendantz d’icelle court, et à elle appartenantz, avons, de nostre certaine science, pleine puissance et authorité royalle de laquelle nous uzons, pouvons et devons uzer, cassée, annullée, ostée, abolie et mise au néant, cassons, annullons, ostons, abolissons et mettons du tout au néant, par ces présentes, et voulons et ordonnons que, pour et au lieu du palais royal à Paris, se tienne doresnavant le parlement de mondit seigneur comme cour capitalle de la justice de ce royaume, en ceste villes de Troye, ville de mainière demondit seigneur en son palais, illec par les amés et féaulx conseillers de mondit seigneur que nous y avons esleus, préposez, establis, ordonnés et commis, ou élirons, préposerons, establirons, ordonnerons et commettrons pour et au nom de mondit seigneur auxquelz nous avons donné par certaines nos autres lettres et donnons encore d’abondant ce mestier est, par ces mesmes présentes, pleine puissance, authorité et mandement spécial de par mondit seigneur, et de par nous, de connoistre, décider, juger, sententier, déclarer, appointer et déterminer de toutes causes, débatz, procès et querelles civilles, criminelles et autres, que à court souveraine et capitalle appartient et doibt appartenir, ainsi et en la forme et manière que on avoit deuement accoutumé de faire en la cour dudit parlement à Paris aparavent les présentes divisions de ce royaume, à telz gages, prouffitz, honneurs, privilèges, franchises, libertez que aux offices d’icelle court appartiennent et ont accoustumé d’appartenir, en louant, approuvant, authorisant tout ce que, par eux, selon l’usage et stile louable de ladite court et autrement deuement sera fait, dit, appointé, prononcé, jugé, sententié, déclaré, décerné et déterminé, tant par forme d’arrestz comme autrement, à tous ceux qui, naguères, pour conseillers et officiers, estoint et avoint esté ordonnés en ladite cour du parlement à Paris qui, si damnablement, ont gasté et détruit la justice souveraine dudit royaume et esté cause et participans des maux et inconvéniens dessusdits, de l’authorité que dessus avons cassés et privés, cassons et privons de tous gages, profitz et émolumentz qui souloint prendre et avoir à cause de leurs offices en icelle cour, en révoquant tout pouvoir et commission que paravant ils ont eu en icelle court, en quelque manière que ce soit, et leurs deffendons et enjoignons expressement surtout ce que ils doubten mesprendre envers mondit seigneur et nous, et sur peine d’encourir son indignation et lanostre, sur peine aussi d’estre réputés rebelles, désobeissantz, faussaires et abuseurs de justice, et estre punis comme telz, que eux ne aucun d’eux ne soit si hardis ou présument de eux entremettre, en quelque manière que ce soit, de cognoistre, juger, déterminer, appointer, sententier, déclarer, prononcer par arrest ou autrement, à Paris ne ailleurs, de quelque cause que ce soit, d’appel bénéficial, civille, criminelle ou autres, en quelque manière que ce soit, toutes lesquelles cognoissances et jugemens, déterminations, appointementz, sentences, déclarations, pronuntiations et arrestz leur avons interdit et interdisons, et iceux ou icelles se aucuns ou aucunes en avoint fait ou faites, avons réputez, déclarez et décernez nuls ou nulles, de nulle efficace et vertu, et pour ce que, depuis la fin dudit mois de juillet, l’an mil quatre centz et treize, plusieurs loyaux subjets de mondit seigneur, soubz ombre ou couleur d’avoir favorisé, conseillé, conforté et aydé nostredit cousin ou autrement au contemp de luy, ont esté banis de la voulenté désordonnées dudit Arminac et des sesdits alliés et complices, et aucuns esloignés et absentés de leurs lieux et les autres de leur voulenté se sont départis tant de ladite ville de Paris comme d’ailleurs, qui ne vouloint vivre ny demourer soubz le tirannique gouvernement desdits Arminac et ses aliés.

Nous, de nos pleine puissance, authorité royalle dessusdite et grace spécialle se mestier est, avons ordonné, déclaré et décerné, ordonnons, décernons et déclarons par ces présentes tous ajournementz, procez, proclamations, appeaux, banissementz, condempnations, confiscations et privations de biens, estatz et offices faitz et à faire contre toutes les personnes de la condition dessusdite et chacune d’icelles, tant par lez dessusdites, qui ont tenu et gouverne la court dudit Parlement à Paris, comme par eux qui, depuis le temps dessusdit, se sont portez pour prévots de Paris et par autres quelconques eux disantz juges et commissaires, avoir esté faitz iniquement, torsionairement, tyranniquement, cruellement, contre raison, justice et véritté, et iceux ensemble tous ajournementz, procez, appointementz, ordonnances, sentences, arrestz, lettres et mandementz et exécutions, faitz ou à faire pour la cour, et eux disantz prévots de Paris et autres juges dessusdits contre et au préjudice d’icelles personnes ou d’aucune d’icelles en quelque cause ou matière que ce soit, bénéficialle, civille, criminelle ou autres, tant en demandant comme en deffendant, avons cassez, irritez, annullez et abolis, casons, irritons, abolissons, annullons et du tout mettons au néant comme chose non faite et non avenue;

Voulons en outre et ordonnons que toutes les personnes dessudites et chacune d’icelles puissent paisiblement retourner en leurs lieux, toutes fois qu’il leur plairra, comme vrays et loyaux subietz de mondit seigneur et de nous, sans offence, blasme ou reproche, recouvrer leurs bien et faire poursuitte et action de leurs droitz, causes et querelles, là où il appartendra, et que tout ce que dors en avant en quelque cause ou matière que ce soit, bénéficialle, civille ou criminelle sera fait, dit, prononcé, déclaré, appointé, décerné, jugé et sentencié par forme d’arest ou autrement, par ceux qui s’efforceroint contre nos présentes volontés et ordonnance, de venir usurper ou occuper le lieu dudit Parlement à Paris, et aussi par celuy qui se dit ou dira prévost de Paris, et autres quelconques, eux disantz séneschaux, baillifs, prévostz et autres juges adhaérantz et désobéissantz auxdits d’Arminac et ses complices, avons déclarés et décernés, déclarons et décernons, pour les causes et raisons dessusdites, de nulle vertu et effet, et dès maintenant pour lors et lors pour maintenant, cassons, ennullons, irritons, révoquons et rappellons et mettons du tout au néant, ensemble tous leurs pouvoirs et commissions, en déffendant expressement, de par mondit seigneur et de par Nous, à tous séneschaux, baillifs, prévotz, justiers, officiers et subietz de mondit seigneur, que aux dessusdits occupantz et usurpans lez lieuz et siège dudit Parlement à Paris, les lieux et sièges aussi de la prévosté de Paris, des séneschaussées, bailliages, prévotés et autres sièges de judicature de ce royaume, adhérans et obéissantz des susdits d’Arminac et ses complices, à leurs apointementz, sentences, ordonnances ou arrestz, et avec ce aux lettres et mandementz faites, passées et scellez soubz ombre et titre de mondit seigneur et de nostre dit fils, desquelz Henry Le Corgue dit De Marle et Robert Le Masson ont tenu et occupé, tiennent et occupent induement les seaux, en abusant d’iceux chacun jour à leur volenté, sans le sceu et plaisir de mondit seigneur et de Nous, en sa grande destruction et deshonneur et préjudice du bien public de ce royaume, ne obeissent, obtempèrent ou entendent en quelque manière que ce soit, ne pareillement aux lettres, mandementz, actes, sentences et ordonnances faites, passées et scéllées soubz les sceaulx desdites prévostés de Paris, séneschaussées, bailliages, prévostés et autres jurisdictions dessus déclarées, et doresnavant ne interjectent en quelque manière que ce soit quelconques appellations nouvelles, ne celles qui ja sont introduites, poursuivent ou fassent poursuir directement ou indirectement, pardevantz lesdessusdits occupans lesdites cours et sièges par Nous évoquez et annulez et mis au néant, comme dit est, sur peine d’encourir l’indignation de mondit seigneur et de Nous, d’estre réputés rebelles et désobéissantz et autrement griefvement punis comme transgresseurs d’ordonnance et mandementz royaux, mais voulons, ordonnons et commandons que pour avoir convenable remède sur toutes leurs causes, querelles, débatz, dissentions et discordz, meus et à mouvoir, ils viennent et envoyent en cette ville de Troyes, par devant nous ou ceux que nous avons commis et commettons, quand il escharra au gouvernement et exercice de la justice souveraine et capitale de ce royaume ou devers les séneschaux, baillifs, prévotz et autres juges par Nous commis ou à commettre, pour et au lieu des adhaérens et obéissantz aux dessusditz d’Armignac et ses complices, selon et que à chacun appartendra, et on administrera à un chacun bonne loyaulté et brève provision de raison et de justice, et la gloire et louange de Dieu, honneur demondit seigneur et de sa seigneurie, utilité de la chose publique, tranquillité et paix de ses subjetz, et conservation du droit et juste querelle de ses parties.

Et au surplus, pour ce qu’il est tout notoire et de ce, réputons toutes personnes d’entendement, bien informéez que des douloreux maux et griefs, incovénientz dessusdits, ont esté participans et en grand cause et occasion, ceux qui ez chambres des comptes, du Trésor, des généraux ou commissaires sur le fait des finances de mondit seigneur et des monoyes à Paris, ont esté mis et préposez au temps passé, tant par faveur, force et violence, comme autrement, induement, au préjudice et désertion du bien commun et totale énervation des finances de mondit seigneur, que ne pouvons, ne devons plus souffrir, tolèrer ny dissimuler sans offence de Dieu, Nous qui voulons et désirons en toute manière oster le nourrissement, cause et occasion des maux et inconvénientz dessudits à nostre pouvoir, de l’authorité que dessus, avons cassé, aboly, osté, annullé, cassons, abolissons, ostons, annullons et mettons du tout au néant toutes et chacunes les chambres dessusdites, et toutes manières de conseillers et officiers qui estoint en icelles, avons, du gouvernement et exercice d’icelles, privé, osté, débouté, dépointé et deschargé, privons, ostons, déboutons, dépointons et deschargeons par ces présentes, en révocant, rappellant et mettant du tout au néant tout pouvoirs et commissions, en leurs interdissant toute court, cognoissance et jurisdiction qu’il souloit avoir, en leurs deffendant sur les peines dessusdites par nous indites à ceux qui tenoint la cour de Parlement à Paris, que dores en avant ne se entremettent de quelconques choses et besougnes appartenantz auxdites chambres, ne au gouvernement d’icelles, et avec ce, avons voulu et ordonné, voulons et ordonnons que lesdites chambres se tiennent dores en avant en cette dite ville de Troyes, par ceux qui, de l’authorité, avis et délibération dessudits, y avons esleuz, praéposés et commis ou élirons, préposerons et commettrons toutes fois que mester sera, pour faire ordonner et deuement exercer toutes choses et besougnes appartenantz auxdites chambres, ainsi que à l’estat et gouvernement de chacune d’icelles appartient et doibt appartenir, par la forme et manière qu’il a esté deuement accoutumé de faire à Paris, au temps passé, aux gages, droitz, proffitz, émolumentz, honneurs, privilèges, franchises et libertés quy y appartiennent, en faisant deffences, en outre, de par mondit seigneur et de par Nous, à tous vicontes, receveurs, grenetiers, controlleurs, maistre et gardes des monoyes de ce royaume, et générallement à tous autres ayantz gouvernementz et administration ou maniance des finances de mondit seigneur, pour quelque pouvoir, authorité ou commission que ce soit ou puit estre, estantz es pays tant de Languedoil comme de Languedot et duché de Guienne, que aux lettres, ordonnaces, mandementz, iniunctions et deffences des uzurpantz l’estat et gouvernement desdictes chambres à Paris, ne à aucun d’eux ne obéissent, obtempèrent ou entendent, comment que ce soit, mais seulement à ceux que nous avons commis, ordonnés et préposés ou commettrons, ordonnerons et préposerons en leurs lieux et estat par deffaud de eux, de loyal et bon gouvernement et administration comme dit est, sur peine de privation de leurs offices, confiscation de leurs biens, de recouvrer sur eux tout et que contre nos présentes voulenté et ordonnace, auront baillé et deslivré, fait ou exécuté, et autrement d’en estre griefvement punis sy donnons en mandement à tous séneschaux, baillifs, prévotz et autres justitiers, officiers et subjetz de mondit seigneur, de quelconque estat, dignité et condition, qu’ils soyent que cettes nos présentes déclarations, déterminations, privations, abolitions, annullations, cassations, révocations, ordonnances et constitutions, commissions, institutions et establissementz, et tout le contenu en ces présentes entérinent et accomplissent, et fassent de point en point entériner et accomplir selon leur forme et teneur et à icelles obtempérer et obéir pleinement par tous ceux qu’il appartiendra, en les faisant solemnellement publier et signiffier en leurs lieux, chacun endroy soy, si diligemment qu’aucun n’en puisse prétendre cause d’ignorance, et enregistrer es livres papiers et registres de leurs cours et auditoires, sans refus, contredit, délay ou difficulté aucune, car ainsi le voulons et Nous plaist estre fait pour les causes et raisons dessus déclarées, et autres nonobstant quelquonques ordonnances, éditz et constitutions, mandementz, deffences et lettres à ce contraires, que l’en pourroit donner ou avoir donné soubz les noms et tiltre de mondit seigneur et de nostredit fils, lesquelz Nous savons certainement non estre venus ou venir de leur sceu ou propre volenté, mais de la déraisonnable et désordonnée voulanté dez dezsusdits Armaniac et ses aliés qui sont entour eux et les tiennent en subjection et gouvernement, ainsi qu’ils veulent; voulons aussi et ordonnons que, au vidimus de ces présentes, fait soubz scel authentique, soit partout ce royaume pleine foi adjoutée, comme à ce présent original, et asfin que ce soit ferme chose et estable à tousjour, Nous avons fait mestre nostre scel aus présentes.

Donné à Troyes au moys de feuvrier, l’an de grace Mil quatre centz et dix sept, par la reyne en son grand conseil. Bordes s.

Source : Archives Départementales de l’Hérault, Série A, folios 456 à 465.
Auteur de la transcription : Jean-Claude TOUREILLE jctou@arisitum.org