Le pillage de Constantinople
« Alors, de partout, les places, les maisons à deux ou trois étages, les établissements sacrés, les couvents, les monastères d’hommes et de femmes, les divins sanctuaires et même la Grande Eglise de Dieu [Sainte-Sophie], le palais impérial, furent envahis de guerriers, porte-glaives privées de raison qui respiraient le meurtre, portaient le fer, la lance, l’épée et le poignard, archers, cavaliers ; ils lançaient des regards terribles, criaient comme Cerbère et soufflaient comme Charon pillaient les saintes maisons, saccageaient les objets divers, insultaient au sacré. Les saintes Images, murales ou mobiles, du Christ, de la Mère de Dieu et des saints, qui, depuis l’éternité, plaisaient à Dieu, ils les jetaient à terre. Ils proféraient insanités et blasphèmes, arrachaient les enfants aux mères et les mères aux enfants, violentaient sans honte les vierges dans les enceintes consacrées, sans craindre le châtiment divin ni la vengeance des hommes.
Ils dénudaient la poitrine des femmes pour voir si une parure ou un objet d’or accroché s’y cachait ; ils défaisaient les coiffures et retiraient les voiles des têtes. (…) Partout, ce n’était que lamentations, cris de douleurs et de malheur. (…) Ils massacraient les nouveau-nés, tuaient les femmes tempérantes, dénudaient même les femmes âgées, et les outrageaient. Ils torturaient les moines, les frappaient du poing, leur foulaient le ventre de leurs talons, rouant de coups ces corps vénérables. Ils versaient du sang mortel sur les saintes tables et, sur chacune, à la place de l’Agneau de Dieu sacrifié pour le salut du monde, on traînait des gens comme des moutons pour leur trancher la tête. Tel était le respect pour les choses de Dieu et de ceux qui portaient sur leurs épaules la Croix du Christ ! »
Témoignage du métropolite d’Ephèse, Jean Masarités in M. Kaplan, « Le sac de Constantinople », l’Histoire, no 47, juillet/août, 1982