Les courriers dans l’Empire inca
« Ils appelaient chasqui les courriers qu’ils postaient sur les chemins, afin de savoir en peu de temps les ordres du roi, et porter les nouvelles et les avis des choses qui se passaient ou près ou loin dans ses provinces et ses royaumes (…). Celui qui apportait le message se mettait à crier quand il était en vue de la cabane, pour que celui qui devait partir à son tour se tînt prêt (…). D’autres messages étaient transmis, non verbalement, mais par écrit pour ainsi dire, bien que nous ayons dit qu’ils ne connaissaient pas l’écriture. Celle-ci était remplacée par des noeuds faits avec des fils de couleur différentes, rangés par ordre (…). Ces noeuds étaient comme autant de chiffres grâce auxquels l’Inca et ses gouverneurs s’entendaient et savaient ce qu’il fallait faire (…). Les fils ainsi noués étaient appelés par les indiens quipu. »
Extrait de Histoire géographie, initiation économique 5e, s. d. Jeannine GUIGUE, Paris, Bordas, 1990.
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Les prédictions de Huayna Capac (empereur inca de 1493 à 1525)
« Il y a longtemps que nous savons, par une révélation de notre père le Soleil, que quand douze rois, ses enfants, auront régné, des gens nouveaux et inconnus viendront en ces régions gagneront et soumettront à leur autorité tous nos royaumes et bien d’autres encore. J’ai idée qu’ils seront de la nation de ceux qui, comme nous le savons, ont navigué près de nos côtes. Ils seront vaillants et l’emporteront sur vous en toutes choses. Nous savons aussi que c’est moi qui suis le douzième Inca. Je puis vous assurer que peu d’années après que je vous aurai quittés, ces étrangers arriveront, accompliront ce que notre père le Soleil nous a prédit, gagneront notre Empire et s’en rendront maîtres. Je vous ordonne de les servir et de leur obéir comme à des gens qui vous seront supérieurs en tout ; car leur religion sera meilleure que la nôtre, et leurs armes puissantes et invincibles. Vivez en paix, car pour moi je m’en vais me reposer avec mon père le Soleil qui m’appelle à lui. »
Extrait de G. de la Vega, Commentaires royaux sur le Pérou des Incas, François Maspero – La Découverte. In Histoire géographie, initiation économique 5e, s. d. Jeannine GUIGUE, Paris, Bordas, 1990.
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Le choix de l’empereur inca
» Ils choisissaient un des plus nobles de la race des rois précédents, homme vaillant rompu aux choses de la guerre, audacieux, plein d’ardeur et n’ayant pas l’habitude de boire du vin. Il fallait qu’il fût prudent, instruit (…) qu’il fût apte à bien parler, intelligent, discret. »
Extrait de F. Bernardine de Sahagûn, Histoire générale des choses de la Nouvelle-Espagne, La Découverte – Maspero. In Histoire géographie, initiation économique 5e, s. d. Jeannine GUIGUE, Paris, Bordas, 1990.
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La prise de pouvoir d’Atahualpa, et l’affaiblissement de la noblesse inca
« Ayant conquis la couronne par la force, Atahualpa connaissait toute la précarité de sa situation (…). Il lui parut donc (…) que le seul moyen d’écarter à tout jamais un risque aussi grave était de faire disparaître, en une fois, non seulement tous les Incas légitimes qui avaient droit à la succession impériale, mais aussi tous les enfants naturels qui pouvaient être tentés d’agir comme lui, maintenant que son mauvais exemple avait ouvert la porte à toutes les ambitions. Non content d’avoir immolé ses 200 frères, il fallut qu’il sacrifiât encore ses cousins, ses oncles et tous ses parents, légitimes ou bâtards, jusqu’au quatrième degré. Les uns furent égorgés, les autres pendus ; d’autres jetés dans des lacs et des fleuves, une pierre au cou, ou bien précipités du haut des rochers. »
Extrait de G. de la Vega, Commentaires royaux, 1609. In Histoire géographie, initiation économique 5e, s. d. Jeannine GUIGUE, Paris, Bordas, 1990.
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La répartition des terres de l’ayllu
« Aussitôt qu’un Inca victorieux avait conquis quelque royaume ou quelque province, [l’Inca] donnait l’ordre d’augmenter les terres labourables [c’est-à-dire celles qui portaient le maïs] (…). Après qu’ils avaient fait les canaux, ils aplanissaient les champs en carrés, afin qu’ils fussent mieux arrosés ; pour aplanir plus facilement les tertres et les versants dont la terre était bonne, ils y faisaient des terrasses (…). Lorsqu’ils avaient augmenté la surface des terres, ils prenaient les dimensions de toutes celles de la province, et en faisaient trois parts, dont la première était pour le soleil, la seconde pour le roi et la troisième pour ceux du pays (…). Quand il était temps de labourer et de cultiver les terres, ils y procédaient comme en tout le reste dans l’ordre requis. Ils labouraient premièrement celles du soleil, puis celles des veuves et des orphelins et des personnes qui en étaient empêchées par la vieillesse ou la maladie (…). Les terres des pauvres une fois labourées, chacun labourait les siennes, et ils s’aidaient mutuellement. Puis ils travaillaient celles du curaca (1), qui devaient être les dernières labourées dans chaque ville et chaque province (…). Les terres du roi étaient labourées les dernières. »
Note 1. Curaca : chef d’une communauté paysanne.
Extrait de G. de la Vega, Commentaires royaux, 1609. In Histoire géographie, initiation économique 5e, s. d. Jeannine GUIGUE, Paris, Bordas, 1990.
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Le temple du Soleil
« Les murs étaient entièrement couverts d’or. L’image du dieu Soleil qui surmontait l’autel était faite d’une plaque d’or deux fois plus épaisse que celles qui revêtaient les murs ; elle formait un visage circulaire entouré de flammes et occupait tout le fond du temple, d’un mur à l’autre.
De part et d’autre de ce soleil se trouvaient les momies des anciens rois incas, si bien conservés qu’ils paraissaient vivants. Ils étaient assis sur leurs trônes d’or, élevés sur des marches de même métal, et regardaient les visiteurs. Toutes les portes du temple étaient couvertes d’or. Une bande du même métal, large de plus de trois pieds, couronnait à l’extérieur les murs du temple. Ce temple était orné de cinq fontaines dont les conduites étaient faites d’or massif. »
D’après l’Inca Garcilaso de la Vega, Commentaires royaux, 1609. in Histoire Géographie, initiation économique 5e, Paris, Hachette, 1995.
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Religion des Incas
« Ces peuples adorent comme des dieux le soleil et la lune et les croient en effet des divinités. Ils jurent par le soleil et par la terre, qu’ils regardent comme leur mère. Ils ont dans leurs temples de certaines pierres qu’ils vénèrent et adorent, qui leur représentent cet astre du jour : ils les nomment Guacas, d’un mot qui signifie pleurer, parce qu’en effet ils pleurent en entrant dans ces temples. Personne n’approche de ces Guacas que les prêtres ou sacrificateurs de ces idoles, qui sont toujours vêtus de blancs, et quand ils vont pour s’en approcher, ils tiennent en leurs mains quelques linges ou draps blancs, ils se prosternent et se traînent à terre, et en parlant à ces Idoles ils se servent d’un langage que les Indiens n’entendent point. Ces sacrificateurs reçoivent les offrandes qu’on fait à ces simulacres, et les enterrent dans les temples : car tous les Indiens leur offrent des figures, ou images d’or ou d’argent, qui représentent les choses pour lesquelles ils adressent leurs prières à leur Guaca. Ce sont aussi ces mêmes prêtres qui sacrifient tant les bêtes que les hommes, et qui cherchent dans le cœur ou dans les entrailles de leurs victimes, les signes qu’ils souhaitent, et jusqu’à ce qu’ils les aient trouvés en quelqu’une, ils continuent toujours ces abominables sacrifices quand ils ont une fois commencé, car ils disent, tandis que ces signes ne se trouvent point, que c’est une preuve que leurs idoles ne sont pas contentes du sacrifice. Ces sacrificateurs ne paraissent presque jamais en public, ni n’ont aucun commerce avec les femmes, pendant tout le temps qu’ils sont occupés à ces sacrifices, et toute la nuit ils ne cessent de crier ou d’invoquer les démons, dans la campagne voisine des lieux où sont ces Guacas, dont il y a un fort grand nombre, parce que plusieurs maisons ont chacun le sien en particulier. Quand ils ont à parler aux démons, ils s’y préparent par le jeûne, puis se bandent les yeux, et quelques-uns même se les crèvent : car ces misérables sont si superstitieux qu’on en a vu qui sont allés jusqu’à cet excès de se les crever ainsi, ou même de se les arracher. Les caciques et les seigneurs n’entreprennent jamais rien sans avoir premièrement consulté leurs prêtres, et ceux-ci leurs idoles ou pour mieux dire les démons. Les Espagnols trouvèrent dans ces temples, consacrés au soleil, plusieurs grands pots de terre pleins d’enfants secs qu’on avait sacrifiés. Entre les pièces d’or et d’argent qui servaient d’ornement à ces Guacas, on en trouva qui ressemblaient parfaitement à des crosses et à des mitres épiscopales, et quelques-unes de ces idoles furent trouvées avec la mitre sur la tête ; de sorte que quand Thomas de Verlanga, qui était évêque de la Terre-Ferme, passa au Pérou, et que les Indiens le virent avec sa mitre en tête, chantant pontificalement la messe, ils disaient tous qu’il semblait un Guaca, et demandaient si c’était le Guaca des chrétiens. On les a souvent interrogés sur le sujet de ces mitres, quelle en était la fin et l’usage : sur quoi ils étaient embarrassés et ne pouvaient rien dire, si non qu’ils les avaient ainsi de toute ancienneté. Outre ces Guacas, il y avait aussi, par tout le Pérou, des maisons ou des monastères où habitaient plusieurs femmes consacrées au soleil, qui ne sortaient jamais de ces lieux où elles filaient et tissaient du coton et de la laine, en faisaient de fort bonnes étoffes, puis, quand elles étaient achevées, ces femmes les brûlaient avec des os de brebis blanches, puis jetaient les cendres au vent du côté du soleil. Ces personnes étaient obligées à vivre dans une chasteté et une continence perpétuelles, et si elles y manquaient, on les faisait mourir : néanmoins, si quelqu’une étant enceinte affirmait par serment que le soleil était père de son enfant, elle évitait la mort. »
in Augustin de Zarate, Histoire de la découverte et de la conquête du Pérou, Paris, 1830 (vers 1550),
trad. S.D.C, Tome premier, ch. XI, p. 54-6
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Enterrement de l’Inca
« Les Incas, avant leur enterrement, étaient embaumés en arrangeant les yeux et le visage comme s’ils étaient vivants. Ils étaient ensuite enterrés avec beaucoup de vaisselle d’or et d’argent, en même temps que les pages, valets et femmes qu’ils avaient aimés durant leur vie. »
Extrait de COLL., Histoire-Géographie 5e, initiation économique, Paris, Nathan, 1987.