En 1387, le prince-évêque, seigneur de la Ville de Genève, Adhémar Fabri, confirme les franchises progressivement accordées aux bourgeois et à leurs syndics par une charte qui dominera pendant cent cinquante ans la vie politique genevoise. Le mouvement communal est mentionné à Genève pour la première fois en 1263, mais c’est seulement au terme d’une longue opposition qu’il est reconnu par l’évêque.

Extraits des franchises de Genève

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Des meuniers
XLII Les meuniers ne pourront mettre le blé ou la farine en sacs, sans la permission du propriétaire dudit blé ou de celui qui l’aura donné à moudre; ils ne lèveront leur émine qu’en présence dudit personnage, s’il veut y assister. Ils auront une certaine mesure pour lever ladite émine, selon leur coutume : l’émine doit être telle que trente-deux émines fassent une octane. Toutes les fois qu’on pourra constater qu’on a agi différemment, et si plainte est portée, l’auteur paiera trois sous de Genève d’amende, et réparera convenablement le préjudice causé ; lesdits trois sous seront appliqués, comme ci-dessus, aux besoins de la fabrique et des bâtiments de la ville.

Des bouchers
XLIII Les bouchers ne pourront pas être associés plus de deux ensemble pour un seul animal ; ils ne devront mettre à la boucherie que des viandes saines et franches, et ni mouton, ni brebis, ni chèvre, ni aucune viande infecte, ou provenant de bêtes malades ou mortes sans être saignées, et ils ne devront point les vendre avec les autres viandes. Ils ne devront pas non plus mettre aux moutons et chevreaux bons et sains, quelque garniture extérieure. Toutes les fois qu’ils auront contrevenu, ils paieront cinq sous de Genève au profit de la fabrique et des bâtiments de la ville, et les viandes pourront être saisies et attribuées aux hôpitaux, même si aucune plainte n’est portée, mais pourvu qu’on puisse prouver et vérifier le cas.

Des dépôts de fumier sur la voie publique
XLIV Quiconque aura placé ou fait placer du fumier dans un chemin ou dans une rue publique, depuis la fête de Pâques jusqu’à la Toussaint, devra le faire ôter dans les trois jours ; de la Toussaint à la fête de Pâques, le fumier pourra rester huit jours, mais pas plus. Pendant les fêtes de Pâques, les trois jours des Rogations, la Pentecôte, les fêtes de l’Eucharistie, de saint Jean-Baptiste et de saint Pierre et les journées du saint synode, il ne devra rester aucun fumier dans les rues et chemins, et on l’ôtera avant lesdites fêtes. Quiconque aura contrevenu, paiera trois sous de Genève, si plainte a été portée, lesquels seront applicables à la fabrique et aux bâtiments de la ville.
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De la vente du poisson
XLVI Aucun de ceux qui vendent ou font vendre habituellement du poisson, ne pourront aller ou envoyer· quelqu’un, ni par terre, ni par eau, jusqu’aux seines pour en acheter, ou aller au-devant de ceux qui en apportent à vendre en ville, soit depuis Bellerive et depuis Versoix en deçà ; ils n’en pourront acheter d’eux jusqu’à ce qu’ils aient pris terre sur la rive de la ville et, si le poisson est apporté par terre, jusqu’à ce que les porteurs soient entrés en ville; et alors, avant que le prix soit reçu ou compté, les clercs et laïques, citoyens et bourgeois qui seront présents, pourront en acquérir pour leur usage, en en donnant le prix. On ne revendra pas aux revendeurs de poissons avant le premier coup de cloche. Tous les vendeurs seront tenus de vendre ouvertement dans la poissonnerie ; ils ne devront, ni ne pourront cacher les poissons qu’ils ont à vendre avant le dernier coup de cloche. Quiconque aura contrevenu, paiera cinq sous de Genève, au profit de la fabrique et des bâtiments de la ville, par parts égales ; les poissons pourront être saisis par les citoyens et attribués aux hôpitaux.

XLVII Les poissons à vendre ne pourront être exposés en été que pendant un seul jour, et non point le jour suivant ; en hiver, ils pourront être exposés pendant deux jours, excepté les grosses truites, brochets et perches, qui pourront l’être pendant trois jours, mais pas plus ; sous la peine énoncée dans l’article précédent.
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De la construction des maisons en ville
L Quiconque bâtira une maison dans la ville, ne la bâtira point de pailles ou de feuilles, ni de bois de haie, si ce n’est de darbet (?) ; si on agit contrairement, les citoyens et bourgeois pourront renverser impunément l’ouvrage.
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Des monnaies
LXVIII Les citoyens, bourgeois et habitants ne seront tenus de recevoir, dans la ville et la banlieue, aucune monnaie nouvelle d’un prince ou seigneur quelconque, ni d’en user en quelque manière dans leur négoce, si ce n’est lorsque cette monnaie est égale à celle qui a été approuvée par nous, le chapitre et la communauté.
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Du poinçon des mesures
LXX Nous voulons et ordonnons, comme nous l’avons voulu et ordonné, sur le conseil du chapitre et de nos citoyens, qu’il soit fait un fer aux armes de notre Eglise de Genève, avec lequel on poinçonnera les mesures des blés et du sel, au fond et sur le rebord ; on fera de même les aunes des draps et des toiles, et les mesures du vin. Quiconque sera trouvé ayant une mesure, une aune ou un poids faux poinçonné, paiera et sera tenu de payer dix sous de Genève d’amende au profit de la fabrique et des bâtiments susdits. Si quelqu’un a mesuré du blé et du vin, du sel ou d’autres marchandises sans mesure poinçonnée, ou a auné du drap sans une aune poinçonnée, il nous paiera soixante sous d’amende pour chaque fois, et le blé, le vin, le sel, le drap ou la toile seront confisqués à notre discrétion et à celle de la ville et des citoyens.

Des étables à porcs et des bas offices
LXXI Nul ne construira ou ne fera construire dans les rues des étables à porcs, ni travailler les cuirs, ni saigner les bêtes, ni faire, ni exercer aucun autre bas office, sous peine de trois sous de Genève d’amende pour chaque fois applicables à la fabrique et aux bâtiments susdits.  »

cité par DECKINGER-ROD, H. Histoire populaire du canton de Genève, Genève, 1905. Chapitre IX