Premier attentat

« Notre maître [Hassan-i Sabbâh] a tendu des collets et des pièges pour prendre dans les filets de la mort et de la perdition le beau gibier qu’était Nizâm al-Mulk, et, par cette action, sa renommée et sa réputation ont grandi. Par la supercherie et le jeu du mensonge, par des préparatifs trompeurs et des dissimulations perfides, il a posé les fondements de l’ordre des fidâ‘î, et il leur a déclaré : « Lequel d’entre vous débarrassera cet État du malfaisant Nizâm al-Mulk Tûtsî ? » Un homme prénommé Bu Tâhir Arrani posa sa main sur sa poitrine en signe d’assentiment. Alors, suivant le chemin de l’erreur par lequel il espérait atteindre la félicité du monde à venir, la nuit du vendredi, douzième jour du ramadân de l’an 485 [16 octobre 1092], dans le district de Nehavand, au lieu dit Sahna, il s’approcha, déguisé en soufi, de la litière de Nizâm al-Mulk qui se rendait de la salle d’audience à la tente de ses femmes, le frappa avec un couteau et, par ce geste, connut le martyre. Nizâm al-Mulk fut la première victime des fidâ‘î. Notre Maître (Qu’il soit jugé selon ses mérites) déclara : « Le meurtre de ce démon est le commencement de la félicité. »  »

Rachîd al-Dîn (v. 1247-1318) s’inspirant et adaptant des sources ismaéliennes, in Bernard Lewis, Les Assassins. Terrorisme et politique dans l’Islam médiéval, Paris, Complexe, 2001, p. 85