Les données qui suivent, en matière féodale, concernent essentiellement les provinces relevant du Parlement de Toulouse (pays de droit écrit), c’est-à-dire les généralités de Montpellier et de Toulouse.
A) LE FIEF
On entend par fief toute possession que l’on tient « a foi et hommage », la fidélité étant à l’origine la seule condition de l’investiture. Cette fidélité est attestée à chaque mutation de Suzerain et de Vassal par l’hommage ou prestation de serment. Le terme de Fief s’emploie donc aussi exactement pour un droit de justice que pour un droit noble quelconque (domaine noble ou directe), ces 2 sortes de possession étant également sujettes à l’hommage (au Roi ou au Seigneur Suzerain).
Tout possesseur de fief noble a le droit de prendre le titre de Seigneur.
a) La Noblesse : seuls, les Nobles peuvent posséder des fiefs de plein droit et sans acheter l’autorisation royale. Ils sont seulement dispensés de l’impôt foncier sur les quelques terres nobles qui restent encore dans leurs seigneuries (encore cette exemption finissait-elle par être très problématique… Si les biens nobles étaient exempts de taille, ils étaient assujettis à l’impôt des 2/20 du revenu, plus 4 sols par livre du chiffre principal).
Ils paient la taille pour tous leurs biens roturiers relevant de la directe d’un autre Seigneur, ils sont tenus à toutes les obligations des simples tenanciers. En vertu de l’enchevêtrement des directes, un grand Seigneur peut se trouver ainsi tenancier d’un marchand…
Les nobles non possesseurs de fiefs n’avaient pas de droits honorifiques, et ces mêmes droits étaient attribués d’une manière égale au Noble et au Bourgeois possesseurs de fiefs de même qualité.
Les Nobles avaient cependant un autre privilège, celui de « Committimus », en vertu duquel les procès où ils étaient parties (demandeurs ou défendeurs), ne pouvaient être jugés que devant la cour du Sénéchal, et non point devant les juges locaux. Mais si on l’examine bien, ce privilège était accordé bien moins en considération de l’intérêt du gentilhomme que de celui de son adversaire. En effet, les juges locaux, nommés en majorité par les Seigneurs, pouvaient être considérés comme suspects de partialité en faveur des gentilshommes. Les juges de la Sénéchaussée, au contraire, fonctionnaires royaux et presque tous issus de familles bourgeoises en évolution (et avides de supplanter la noblesse existante), étaient plutôt portés à la juger sévèrement.
A côté d’un certain nombre de vieilles races de Nobles, dont plusieurs subsistent toujours, on voyait continuellement la noblesse se recruter dans la bourgeoisie, comme le militaire dans le civil. Une fois enrichies par le commerce, les familles ambitieuses poussaient leurs enfants dans les carrières de robe, les charges anoblissantes (Conseillers au Parlement, Secrétaires du Roi,…).
L’accession à la noblesse n’était pas recherchée par toutes les familles, mais seulement par celles qui étaient assez riches ou assez désintéressées, et de sentiments assez aristocratiques pour se permettre ce luxe. Luxe en effet, car en échange des médiocres privilèges que nous avons vu, la noblesse était frappée de l’interdiction de s’enrichir par le commerce, et les grandes charges, surtout militaires, qui caractérisaient la noblesse d’épée, étaient généralement une source de ruine.
Combien de familles aristocratiques trouve-t-on, dont le seul titre de noblesse est de s’être imposées aux contemporains ? Rien ne distinguait extérieurement du gentilhomme le roturier possesseur de fiefs. Un fois pourvu d’un titre seigneurial, le bourgeois riche, et qui savait imposer sa valeur personnelle s’alliait à la noblesse qui se solidarisait avec lui. Tous n’y réussissaient pas. Mais, en définitive, la consécration par les pairs restait la seule règle qui permettait, à défaut d’origine, de reconnaître un gentilhomme d’un usurpateur.
En dehors des fiefs honorés (Duché, Marquisat, Comté, Vicomté et Baronnie), aucun Seigneur n’aurait dû prendre de titre sans Lettres Patentes du Roi, érigeant sa seigneurie en fief titré. Mais il pouvait en être autrement pour 3 raisons:
– tout Seigneur qui réunissait sous sa domination, les droits de Justice de plusieurs paroisses ou terroir, attachait, suivant un usage reçu, le titre de Baronnie à la seigneurie où il faisait sa résidence principale;
– les seigneuries ainsi rattachées sous le seul lien d’un Seigneur commun, pouvaient être amenées à se diviser par la suite. On voyait alors souvent chaque Seigneur possesseur d’une des principales terres de la Baronnie, prétendre au titre de Baron pour la seigneurie qui composait sa part.
– il y a des titres dont la seule origine est la nécessité que ressentent certaines familles, considérables par leur ancienneté ou leur fortune, de se mettre au-dessus du nivellement causé par l’ascension constante des familles bourgeoises. Nous sommes donc en présence d’un phénomène d’usurpation, mais usurpation acceptée, favorisée presque; il est en tout cas certain que les contemporains l’ont considérée comme une chose naturelle…
La règle, en définitive était bien la consécration des pairs, et l’autorité royale sanctionnait tacitement le jugement de ce tribunal de l’opinion.
b) Le Tiers Etat : théoriquement, ses membres ne peuvent posséder de fiefs sans la permission du Roi. En fait, cette permission est remplacée par une tolérance, que l’usage a transformé en règle, et qui se traduit par le paiement d’un impôt spécial, le « droit de Franc-Fief », généralement assez lourd; c’est l’impôt sur la vanité. Comme tous les luxes, la noblesse coûtait cher. Les Bourgeois étaient ce qu’ils voulaient être: riches commerçants, quand les sources de la fortune étaient fermées aux Nobles; jouissant des bienfaits de la paix, quand les gentilshommes allaient verser leur sang dans les guerres; pourvus de tous les moyens d’autorité, grâce aux charges royales qui les sollicitaient. Et s’ils préféraient à ces moyens réels de puissance ou de fortune la considération qui entourait l’aristocratie, ils avaient le choix des moyens pour y pénétrer.
c) Les personnes de Main Morte : ces derniers (c’est-à-dire toute personne morale, y compris l’église et les fondations religieuses, qui, devenues propriétaires d’un bien quelconque, l’immobilisent définitivement, autrement dit ne changent plus de main) n’avaient pas, en principe, le droit de posséder des fiefs. En fait, ils en possédaient à volonté, à condition d’acheter la permission du Souverain, et de dédommager le Seigneur Suzerain du fief des avantages que lui faisait perdre son entrée en main morte. Remarquons que les droits du Seigneur Suzerain et du Seigneur directe sont exactement les mêmes en cette matière, parce que le préjudice subi par eux est absolument de même nature.
L’autorisation du Souverain doit s’obtenir au moyen de Lettres Patentes d’Amortissement, obtenues grace à un versement en capital une fois payé. Le Seigneur doit être dédommagé de son côté, de la privation définitive de tous droits de mutation, et de la possibilité de confisquer le fief sur le Vassal coupable de félonie. Ce dédommagement se réalise de 2 manières:
– d’une part le personne de main morte fournit au Suzerain un « homme vivant, mourant et confisquant », c’est-à-dire un prête-nom dont la mort entraînera le paiement des droits de mutation à cause de décès, et dont la félonie permettrait éventuellement au Seigneur de confisquer le fief (ce dernier cas ne se présente qu’en théorie). A chaque décès, le prête-nom doit être renouvelé;
– d’autre part, le Seigneur reçoit un droit d’indemnité destiné à compenser la perte qu’il fait des droits de mutation par aliénation. L’indemnité se paie soit en capital (comme l’amortissement), soit à date périodique, soit à l’occasion du décès du prête-nom.
L’indemnité et le prête-nom sont aussi obligatoires lorsque le Vassal a chargé son fonds d’une charge perpétuelle qui en diminue la valeur, comme les rentes obituaires. L’indemnité doit alors être proportionnée à la moins value que subit le fonds à la suite de l’établissement de cette charge.
B) LA SEIGNEURIE FEODALE
L’inféodation d’un bien ou d’un droit noble consiste à en céder à autrui, à titre honorifique, la jouissance perpétuelle, en se réservant certains droits de dominité éminente. Le bailleur prend le titre de Seigneur Suzerain, le preneur celui de Seigneur Vassal
I) Obligations du vassal
a) Hommage : il est dû à chaque mutation du Suzerain et de Vassal. En principe, c’est une obligation strictement personnelle et qui ne peut être remplie par procureur que par autorisation expresse. En fait, dès le XVIIe siècle, ce n’était plus qu’une formalité sans importance; au XVIIIe siècle, 1 ou 2 procureurs du Bureau des Finances rendaient les hommages au Roi en nombre massif au nom de leurs clients. Bien rares ceux qui venaient en personne.
b) Aveu et Dénombrement : L’Hommage une fois rendu, le Vassal doit fournir son aveu et dénombrement. Dans cet acte il « avoue » ou reconnaît sa vassalité, et il « dénombre » ou énumère dans le détail les droits et possessions qui composent son fief. Par cette énumération, le dénombrement est la source principale qui fasse connaître les droits seigneuriaux.
Le dénombrement rendu au Roi par son Vassal direct doit être vérifié (« blâmé ») par les Cours des Comptes, les commissaires royaux délégués à cet effet, etc… Le dénombrement rendu à un Seigneur particulier doit être « blâmé » par celui-ci dans les 40 jours après sa remise; passé ce délai, il ne peut être discuté. Les dénombrements sont en effet des actes conservatoires de droits beaucoup plus importants pour le Vassal que pour le Suzerain.
Au reçu du dénombrement, le Suzerain doit seulement s’assurer que le dénombrant n’a pas énuméré des droits empiétant sur les siens; c’est ainsi que les Commissaires Royaux poursuivent avec soin, dans l’intérêt public, l’usurpation des droits de souveraineté (justice), celle de privilèges fiscaux (biens nobles). Mais de son côté, le dénombrant cherche à maintenir tous ses droits à l’égard de ses inférieurs, un silence prolongé pouvant être considéré comme un abandon. Aussi, en fait, le dénombrement est-il surtout la liste des prétentions du Seigneur.
Comme l’acte doit être publié 3 dimanches de suite à l’église paroissiale, les Communautés font souvent opposition aux dénombrements des Seigneurs, mais les procès étant interminables, chaque partie continue à énumérer ses prétentions respectives… Un peu partout, les Seigneurs dénombrent des biens nobles, en spécifiant qu’ils en paient la taille par provision, à cause des procès qu’ils ont avec leurs Communautés, toujours promptes à inscrire ces biens dans les Compoix comme roturiers. Aussi, suivant que l’on prend dans une Communauté donnée la liste des biens nobles d’après les dénombrements ou d’après le compoix, on la trouve généralement différente.
On peut conclure en posant ce principe, que les dénombrements énumèrent souvent des droits que les Seigneurs ne possédaient pas en fait, mais qu’ils n’en oublient guère qu’ils aient réellement possédés…
II) Droits utiles du Seigneur féodal
Les Seigneurs gémissent presque toujours sur la difficulté de percevoir leurs droits utiles: le principe en étant maintenue, ils ont tout intérêt à exagérer la modicité de leurs revenus pour se faire exonérer des charges fiscales qui ne les épargnaient pas.
a) Albergue : c’est l’indemnité payée par le Vassal ou Suzerain en échange de la renonciation faite par celui-ci a son droit de se faire héberger et nourrir 1 jour par an avec sa suite (droit d’auberge)…
Dans un sens étendu, il désigne toute redevance payée par les Communautés à leurs Seigneurs. La raison de cette corruption du terme est qu’anciennement, la plupart des Seigneurs avaient inféodé aux Communautés des pâturages, des bois, des maisons (les « communaux »), moyennant le paiement usuel de l’albergue. Plus tard, on confondit sous ce nom tous les droits en argent que les Seigneurs recevaient des Communautés…
Les droits d’albergues se paient à chaque reddition d’hommage, mais il y a des albergues annuelles qui prennent nettement la forme de redevances pécuniaires.
b) Commis : droit assez théorique, bien que d’une importance considérable à l’origine. Le Vassal « commet », c’est-à-dire perd son fief dans 2 cas:
– par le « désaveu », lorsqu’il prétend faussement que le fief ne relève pas de son Suzerain;
– par la « félonie », lorsqu’il offense dans son honneur, dans sa personne ou dans ses biens.
c) Droit de Leude : La Leude, qui est une imposition sur les grains vendus par les étrangers au sein de la juridiction du Seigneur, n’est et ne peut être uniforme: il dépend des charges plus ou moins grandes auxquelles est obligé le Seigneur Leudier pour la tenue des foires et des marchés. Au surplus, il faut toujours suivre le Tarif des droits accordés par le Roi (exemple de tarif de la Leude)
Lorsque les habitants du lieu, qui sont exempts de la Leude, font commerce de grains, c’est une règle générale qu’ils sont obligés, pour les vendre, de les exposer aux marchés et d’en payer le droit en entier pour plusieurs raisons:
– les jours de foires et de marchés sont au Seigneur, et c’est dans ces jours que son droit est ouvert;
– s’il était permis à un ou plusieurs particuliers de vendre dans leurs greniers, les jours sus dits, les marchés seraient moins fournis, ce qui pourrait y procurer une augmentation;
– enfin, sous prétexte de vendre du blé du crû ou d’user du privilège, ils pourraient en vendre qu’ils auraient acheté, ce qui serait également préjudiciable à la Police et au droit de Leude.
Ce droit de Leude était exceptionnel, gênant d’ailleurs. Il était vu d’un très mauvais oeil par l’administration royale qui en poursuivait la destruction. Les titres des Seigneurs à ce sujet étaient examinés avec une rigueur particulière, et l’on admettait que 10 ans de non-exercice suffisait pour priver le Seigneur de son droit.
d) Droit de mutation : le Suzerain les prélève dans le cas d’aliénation à titre onéreux. Ce droit (que le Seigneur Directe prélève aussi sous le nom de « lods ») est appelé « Quint » (cinquième du prix de vente) et « Requint » (cinquième du cinquième du dit prix), mais ce n’est pas une règle absolue…
e) Droit de Relief ou Rachat : C’est un droit dû au seigneur pour les mutations qui arrivent de la part du vassal en certains cas, consistant au revenu du fief d’une année, ou une somme pour une fois offerte de la part du vassal, ou au dire de prud’hommes, au choix du Seigneur.
Ce droit est appelé rachat parce que le nouveau vassal est obligé de le payer à son nouveau seigneur en entrant dans le fief, comme pour le racheter de la perte qui est censée en être faite par la mutation du vassal. Ce droit est aussi appelé relief, pour marquer que le nouveau vassal qui paye le relief est censé le relever, le dégager, et le remettre dans son premier état.
L’origine de ce droit vient de ce qu’anciennement les fiefs étaient réunis de plein droit à la table des seigneurs dominants par le décès des vassaux, donc les héritiers collatéraux ne pouvaient rentrer dans ces fiefs qu’en les rachetant ou les relevant des seigneurs à qui ils payaient un droit, qui fut nommé pour cette raison rachat ou relief.
On l’appela d’abord « placitum », parce que n’étant pas réglé, il dépendait à la rigueur de la volonté des seigneurs dominants; et de là vient qu’encore aujourd’hui les reliefs ou rachats, quoique réglés ou fixés, sont encore nommés « relevoisons à plaisir » et « plaisir à merci ».
f) Prélation ou Rétention ou Retrait Féodal : droit d’option que le Seigneur Suzerain peut exercer lorsque son Vassal vend le fief. On admet généralement que le Roi et l’Eglise ne peuvent pas en user.
Lorsque la vente a lieu le Seigneur a le choix entre 2 solutions:
– donner à l’acheteur l’investiture du fief en acceptant le paiement du droit de mutation;
– retenir le fief pour lui, en remboursant l’acheteur de tous les frais de son acquisition (en cas de fraude, le véritable prix peut être évalué par experts).
Le retrait féodal est un désir rigoureusement personnel du Suzerain; il est indivisible, en ce sens que le Seigneur doit retenir tout le fief, ou l’abandonner. La vente doit être « dénoncée » (signifiée) au Suzerain. Celui-ci a 1 an pour prendre une décision. Si la « dénonciation » n’a pas été faite, il a 30 ans pour exercer sa demande.
g) Prescription du Fief : les fiefs se prescrivent comme tous les droits, par 40 ans contre les Seigneurs ecclésiastiques, par 30 ans pour les autres… Lorsque les 2 Seigneurs réclament des droits sur le même fief, on dit qu’il y a « combat de fief »; cette hypothèse est très fréquente. On admet que le Seigneur dont les titres sont les plus anciens doit l’emporter, à moins que la prescription ne soit intervenue.
h) Saisie Féodale : c’est le droit qu’a le Suzerain de saisir les revenus de la seigneurie du vassal qui ne lui a pas rendu foi et hommage; les revenus saisis par ce moyen ne pouvant être réclamés. Dans le ressort du Parlement de Toulouse, ce droit appartenait seulement au Roi.
i) Service Militaire : le Vassal devrait en principe suivre le seigneur à la guerre et s’engager à le servir envers et contre tous. Ces 2 obligations ont été supprimées à l’égard de tout autre que du Roi, comme étant un privilège exclusif de la Souveraineté (mais il y a des cas particuliers qui suivent la première version).
En temps de guerre, le Roi pouvait mobiliser le Ban (ses Vassaux directs) et l’Arrière Ban (ses Vassaux médiats). Le Vassal devait le service personnel; au cas où il ne pouvait le rendre, il devait envoyer à sa place un homme de guerre dont la qualité et l’armement étaient autrefois fixés; les dénombrements rappellent parfois cette obligation. L’homme de guerre est généralement un piquier ou un brigantinier (archer).
Etaient dispensés du service personnel:
– les Vassaux dont un parent direct était au service,
– ceux qui avaient quelque charge militaire (Gouverneurs de Villes, Capitaines Châtelains et leurs lieutenants),
– les Vassaux des Seigneurs ecclésiastiques,
– les habitants de la ville de Toulouse (en vertu des privilèges à elle accordées par Louis XI en 1471 et confirmées par ses successeurs).
j) Droit de Taille : impôt que peut prélever le Seigneur dans certaines circonstances, s’il est fondé en Titre. Etant un des droits attachés à la Souveraineté, c’est-à-dire au Roi, il est défavorablement vu par l’administration.
Si les Titres ne marquent pas nommément les cas, alors on restreint le droit du Seigneur aux « Quatre Cas » ordinaires, qui sont le mariage des filles du Seigneur, le rachat du Seigneur fait prisonnier par les ennemis, le voyage d’Outre-Mer et la Chevalerie du Seigneur. Il dépend du Seigneur de fixer dans le Bail à Fief, le droit de Taille à une certaine somme, mais en défaut de stipulation, il doit être réglé au doublement du Cens ou de la Rente ordinaire.
Le Seigneur peut acquérir le droit de Taille au « Quatre Cas » par une possession immémoriale, et ceux qui y sont une fois assujettis ne peuvent acquérir la liberté et la décharge par le défaut de prestation.
– Premier Cas : Le mariage des filles du Seigneur: le Seigneur a le droit de lever la Taille pour le mariage de toutes ses filles ou seulement pour le mariage de sa fille aînée, suivant stipulation des Titres; la taille n’est pas dû lorsque les filles du Seigneur font profession religieuse; le Seigneur ne peut exiger ce droit pour le mariage de ses filles naturelles; enfin le Seigneur peut exiger le droit pour le mariage de ses soeurs, aussi bien que de ses filles, si la terre lui est échue du chef de son père, et non point s’il l’a acquise d’ailleurs.
– Deuxième Cas : Le rachat du Seigneur fait prisonnier par les ennemis: il ne peut exiger ce droit que dans le cas où il a été pris par les ennemis en faisant le service dû au Roi à raison de son fief.
– Troisième Cas : le voyage d’Outre-mer: il s’agit aussi bien du voyage que l’on fait pour chasser les infidèles de la Terre Sainte, ainsi que de celui que l’on fait en ces lieux par dévotion.
– Quatrième Cas : la chevalerie du Seigneur: il n’a lieu, suivant l’opinion commune, que pour le Premier Ordre (jadis la Chevalerie d’Epée), ou pour le plus noble des Ordres de Chevalerie: l’Ordre du Saint Esprit.
C) LA SEIGNEURIE DIRECTE
Un fief peut être baillé en roture et moyennant une redevance d’argent; dans ce cas, le tenancier perd la dominité Utile du fief et le Seigneur en garde la dominité Directe, d’où le nom de Seigneur Directe.
Les droits énumérés n’existent à l’égard de chaque particulier que si les titres du Seigneur les mentionnent chacun expressément; toute terre, toute personne est présumée libre de charges, et le Seigneur a toujours la charge de prouver ses prétentions.
A noter que les Seigneurs Directes ne peuvent orner leurs maisons des marques seigneuriales (c’est-à-dire tours, créneaux, girouettes et pont-levis) sans l’autorisation spéciale du Seigneur Haut Justicier.
1) Le Bail à cens : C’est le bail par lequel le Seigneur aliène la dominité utile de sa terre moyennant une rente perpétuelle en argent. Il existe deux sortes de baux:
– Le bail à cens: il n’est usité que pour les terres Nobles ou celles qui, ayant été déjà baillées à cens, sont revenues entre les mains du Seigneur. En effet, bien que celui-ci en paie la taille, il réunit entre ses mains les dominités Directe et Utile, et peut donc les séparer à nouveau.
– Le bail à emphytéose perpétuelle: pour cela, il suffit de posséder ce fond en Franc-Alleu, et indépendant de toute Seigneurie Directe, quoique d’ailleurs rural et sujet au payement des tailles, la roture n’ayant rien d’incompatible avec l’allodialité et l’indépendance. Le Bail Emphytéotique n’est donc que le bail d’un fond qui est tenue en roture.
L’essence et le fonds de ces 2 contrats sont absolument les mêmes, puisque l’un et l’autre sont également un contrat par lequel il n’y a que le Domaine Utile qui soit aliéné, tandis que le Domaine Directe reste au bailleur, avec une rente qui lui est payée en reconnaissance de la Directité. Le contrat est donc spécifiquement le même et la différence ne vient que de la qualité des biens qui sont le sujet de l’un et de l’autre. Il est vrai cependant que dans l’usage, la rente de l’emphytéose, ainsi que celle du censitaire portent également le nom de « Cens ».
Dans la pratique ancienne, on négligeait absolument cette différence qualitative. On appelait le bail à cens, à la fin du XVIIIe siècle, par confusion, « bail à nouveau fief », parfois même « inféodation ».
Les Seigneurs ont grand intérêt, sans doute, que leurs Censives soient réputées Nobles et Féodales, puisque ces Fiefs donnent tant de prérogatives et tant d’honneurs dans les paroisses où ils sont situés. Et pour constater la nobilité des Directes et Censives, il faut, comme le dit la Déclaration du 9 Octobre 1684, le même genre de preuves que lorsqu’il s’agit de la nobilité des Fonds et Héritages, c’est-à-dire qu’il faut un Hommage antérieur de 100 ans à la Déclaration, suivi d’un Dénombrement qui ait été reçu dans les formes.
A propos du Bail à « Locaterie Perpétuelle »: Pour bailler un fonds à ce titre, il suffit d’avoir la Dominité Utile de ce fonds, ce qui est le cas pour l’emphytéote. Ce contrat n’est pas translatif de propriété, ce n’est à proprement parler qu’un cisaillement de la dominité en 2 parties: l’une demeure à titre de propriété à celui qui donne le fonds, et l’autre passe au titre d’usufruit sur la tête du locataire.
Un emphytéote peut donc charger le fonds d’une rente annuelle, en le baillant en Locaterie Perpétuelle. Une rente annuelle, réservée sur un fonds emphytéotique par le Bail à Locaterie Perpétuelle, diminue sans doute la valeur du fonds et, par conséquent, les lods dus au Seigneur à chaque mutation qui se fait par vente. Mais à cet égard, le Seigneur est assez dédommagé par les lods qu’on lui adjuge lors de la vente que fera le locataire du fonds sujet à la rente, et lors de la vente que fera l’emphytéote de la rente annuelle qu’il s’est réservé par le Bail à Locaterie Perpétuelle.
2) La rente : celui qui paie la rente au Seigneur Directe est appelé indifféremment tenancier, emphytéote, censitaire ou fivatier. L’essentiel du bail à cens est la rente perpétuelle et annuelle. Elle consiste en Censive ou bien en Champart (voir plus loin). La rente est absolument imprescriptible: un Seigneur en possession d’un Bail Primitif millénaire, et inexécuté depuis, peut en réclamer la mise en vigueur. Cependant, pour modérer la sévérité de cette règle, on admet avec raison que le Seigneur ne peut réclamer plus de 29 ans d’arrérages. Les Seigneurs ne pouvaient prescrire entre eux la propriété de ce droit (« combat de fief »). Mais le droit lui-même ne peut s’éteindre par prescription, sauf dans un cas, celui où le tenancier l’a régulièrement dénié, sans soulever la protestation de son Seigneur. Lorsqu’une terre a été baillée à cens à un particulier, et s’est morcelée par la suite (cas très fréquent), le Seigneur a le bénéfice de la solidarité contre chaque tenancier. Il perd ce privilège lorsque pendant 30 ans, il reçoit séparément la quotité de rente de chacun, ou s’il accepte des reconnaissances séparées.
a) La Censive ou Oublie : somme forfaitaire, fixée une fois pour toute dans le bail, et consistant en blé, ou en avoine, ou en argent, ou en poules…
b) Le Champart ou Tasque ou Agrier : portion des fruits que le Seigneur se réserve quelquefois « in traditione fundi », pour tenir lieu de Cens et de Rente, et quelquefois même, outre et par dessus le Cens et la Rente. Cette portion est communément le 1/4, et le Seigneur l’exige, ou en prenant chaque année la 1/4 partie des fruits, ou en jouissant pendant une année de l’entier fonds, en laissant jouir pendant 3 années le tenancier sans aucune charge. Tout cela dépend des titres et des conventions. A noter que le possesseur du fonds sujet au Champart ne peut retirer les fruits sans en avoir plutôt averti le Seigneur.
Remarques sur le Champart : Le Champart produit plus ou moins au Seigneur, suivant que la récolte est plus ou moins abondante, mais qu’il est remarquable qu’il ne dépend pas du tenancier de frustrer le Seigneur à défaut de culture.
Non seulement l’emphytéote ne peut se dispenser de travailler les terres qui sont en culture, mais le Seigneur peut même le contraindre à ouvrir celles qui sont en friche, excepté si ce sont des terres ingrates et stériles, en sorte qu’il n’y ait qu’à perdre à les travailler. Sur quoi il y a cette différence que lorsqu’il s’agit d’abandonner une terre qui est en culture, c’est à l’emphytéote de prouver la stérilité, parce que la présomption est contre lui; au lieu que lorsqu’il s’agit d’ouvrir une terre en friche, c’est au Seigneur de prouver qu’elle en vaut la peine, parce qu’alors la présomption lui est contraire. Soit pour le défaut de culture, soit pour le peu d’exactitude dans la manière de travailler les terres (en lui donnant les façons ordinaires), l’action du Seigneur ne tend pas seulement à faire ordonner qu’à l’avenir l’emphytéote sera obligé de mieux faire, mais tend encore à obtenir des dommages et intérêts pour le passé.
L’intervention des cultures n’est point défendue, lorsque le Champart est indifféremment établi sur toute sorte de fruits, parce qu’il n’y a rien à perdre pour le Seigneur qui prendra le Champart sur le nouveau fruit que l’emphytéote fera produire à ses terres. Mais il en serait autrement si le Champart n’était établi que sur une sorte de fruits, par exemple sur les grains, et que l’emphytéote entreprit de convertir en vigne une terre qui aurait toujours été labourée.
Toutefois, il faut distinguer 2 cas:
– le Champart est établi seulement sur une sorte de fruit, il a été originairement attaché au genre de culture (une vigne ou un pré deviennent sujets au Champart lorsqu’ils sont convertis en terre labourable). Dans ce cas, le Seigneur ne peut s’opposer à l’intervention de culture parce que, d’une part, si les vignes et les prés sont convertis en terres labourables, il n’est pas juste qu’il puisse refuser de perdre par la conversion des terres labourables en vigne et en pré. D’autre part, en attachant le Champart au genre de culture, sans avoir rien déterminé pour telle et telle pièce en particulier, il est sensible que le Seigneur a laissé l’emphytéote régler à son gré la culture de son bien;
– le Champart a été stipulé sur des terres fixes et déterminées. Le changement de culture peut être alors défendu. On dit avec raison que cette intervention n’est pas permise parce que le Seigneur qui, par exemple, ne gagnerait rien par la conversion des terres labourables ne doit pas être exposé à perdre par la conversion des dites terres en vignes ou en prés. Exception pourtant, lorsqu’il s’agit d’une terre qui est plus propre, qualitativement parlant, à mettre en vigne qu’à produire du grain. Exception encore, lorsque l’emphytéote a besoin, pour la commodité du labourage, de construire des granges, des étables, qu’il ne pourrait placer ailleurs aussi commodément, parce que c’est une espèce d’amélioration de l’héritage, qui est sensée profiter au Seigneur par les Lods (voir ci-dessous), plus considérables, qu’il retirera en cas de vente.
Enfin, nous remarquerons que le droit du Seigneur a paru si respectable, qu’il a été décidé que non seulement il n’était pas permis de lui faire perdre le droit de Champart par l’intervention de culture dont nous venons de parler, mais qu’il n’était pas même permis à l’emphytéote de le diminuer.
Le Champart est toujours quérable sur le champ. Lorsque celui-ci est portable, ou par les Titres ou par la Coutume, on en use comme à l’égard de la Censive, c’est-à-dire que l’emphytéote n’est point tenu de le porter hors des limites de la Seigneurie. Les emphytéotes ne sont pas même obligés d’aller à la grange que le Seigneur possède dans l’étendue de la Seigneurie, si elle est trop éloignée de leurs possessions.
Le Seigneur n’est pas précisément obligé de recevoir le Champart dans l’étendue de son fief, et il lui est permis d’établir sa grange dans tel lieu de la Seigneurie qu’il juge a propos, quoique ce soit sur des fiefs qui ne relèvent pas de lui. Le Seigneur est maître de changer et remuer sa grange, comme il le juge à propos, tant qu’il ne sort pas de la Seigneurie dans laquelle sont enclavés les héritages sujets au Champart.
La possession où auraient été les emphytéotes d’attendre que le Seigneur envoya chercher le Champart, ne les dispense point de le porter, si pendant le temps qu’a duré cette possession, le Seigneur n’a point eu d’hôtel ou de grange dans le territoire.
3) Les Lods : quand le tenancier vend sa terre, le Seigneur Directe a le droit de percevoir des « Lods ». Ce droit est censé payer l’autorisation du Seigneur à la vente (Lod = Laudare = Approuver). Les Lods sont généralement du 1/12 du prix de la vente (toute fraude étant écartée) ou du 1/12 de la valeur des biens données, s’il y a donation. Les ventes par engagement donnent lieu a un droit de Lods du 1/24. En cas d’échange, si les pièces échangées se trouvent dans la directe du même Seigneur, les lods sont aussi du 1/24; mais ils sont dus au 1/12 si les pièces échangées se trouvent dans des directes différentes.
4) L’Acapte : droit de Mutation perçu à la mort du Seigneur Directe, s’il y en a mention dans le Bail. Le taux est celui fixé forfaitairement dans l’acte primitif.
5) L’ Arrière Acapte : droit de Mutation perçu à la mort du tenancier, s’il y en a mention dans le Bail. Le taux est aussi celui fixé forfaitairement dans l’acte primitif.
6) La Prélation ou Retrait Censuel : le Seigneur Directe a sur son tenancier le droit de prélation (droit d’option perpétuelle), en cas de vente de la terre relevant de sa Directe à un particulier. C’est-à-dire qu’il peut acquérir un bien vendu par un de ses tenanciers, pour son compte personnel, en indemnisant l’acquéreur du prix principal et des dépenses accessoires qu’il a pu faire. Ainsi, le Seigneur Directe réunit, par ce droit, la Dominité Utile à sa Seigneurie Directe. A noter tout de même que le fonds en question reste roturier et donc soumis au payement de la taille.
7) Le Droit de Justice : il est parfois stipulé dans les baux et reconnaissances que le tenancier qui obligera le Seigneur à réclamer la Censive en justice encourra par le fait même, et à titre de pénalité, une augmentation de la Censive en question. On appelle cela le « droit de Justice ». Il est d’ailleurs très variable: le plus souvent il est égal à l’Acapte, mais généralement il diffère suivant les actes. En tout cas, c’est un droit absolument exceptionnel.
8) Le droit de Commis : on admettait que le bien était « commis », c’est-à-dire perdu pour le tenancier, lorsque ce dernier refusait de passer nouvelle reconnaissance au Seigneur ou de payer les Censives arréragées, après y avoir été condamné en justice. Dans ce cas, le bien revenait entre les mains du Seigneur qui rentrait en possession du domaine Utile, ainsi « consolidé à la Directe ». Il pouvait le conserver ou le bailler à nouveau.
9) Le Déguerpissement : Lorsque le possesseur d’un fonds trouve trop onéreuse la rente ou les autres charges auxquelles il est assujetti par le Bail à Cens, il lui reste une ressource, celle de « déguerpir », c’est-à-dire de faire au Seigneur un délaissement de fonds. Par la jurisprudence du Parlement de Toulouse, le possesseur d’un fonds ne peut déguerpir sans payer tous les arrérages de la rente et autres droits seigneuriaux, sauf son recours contre ses auteurs. Le Seigneur est toujours obligé de l’accepter. Lorsqu’un tenancier déguerpit son bien, le Seigneur doit faire publier au prône pendant 4 dimanches un avis demandant qui veut prendre à nouveau fief les terres déguerpies, sous la Censive prévue dans les reconnaissances. S’il ne se trouve personne, les terres reviennent alors entre les mains du Seigneur dans leur état de Noblesse primitive, comme elles se trouvaient avant le 1er bail à cens. C’est le seul cas dans lequel puisse redevenir Noble un fonds tombé en roture.
I) Les Reconnaissances :
Elles sont, en matière de Seigneurie Directe, ce qu’est le Dénombrement en droit Féodal. Le Seigneur Vassal « dénombre », le tenancier « reconnaît ». Il y a deux sortes de reconnaissances:
1) Reconnaissances générales : elles ne peuvent être passées que par les Communautés possédant un terroir bien confronté, et pour les droits auxquels tous sont soumis; ces reconnaissances ne peuvent être passées qu’en vertu d’une délibération à laquelle doivent prendre part tous les habitants. Elles avaient un caractère exceptionnel et les Seigneurs ne les obtenaient qu’avec de grandes difficultés.
Il nous faut remarquer, à propos de ce genre de reconnaissances:
– qu’elles sont nulles dans l’usage particulier du Parlement de Toulouse, si le corps du terroir n’y est bien confronté et bien délimité;
– qu’elles sont nulles aussi, si elles n’ont été passées qu’en vertu d’une délibération, de laquelle il doit compter, ou par la remise même de la délibération ou par l’énonciation de la reconnaissance, si la reconnaissance est extrêmement ancienne;
– que dans ces sortes de reconnaissances, il n’est permis de comprendre que les droits universels qui sont les mêmes sur tous les habitants, ou ceux dont la Communauté est chargée en corps.
On appelle aussi « reconnaissance générale », le renouvellement que font faire les Seigneurs des reconnaissances particulières qui composent leurs terriers. Sur quoi il y a cela de remarquable que lorsqu’il s’agit de terres où le Roi est en Paréage, les Seigneurs ordinaires ne peuvent faire procéder à ce renouvellement des reconnaissances qu’avec l’assistance du Procureur du Roi ou des Fermes du Domaine, ou bien après que le Roi ait fait procéder aux siennes.
2) Reconnaissances particulières : elles peuvent être exigées assez fréquemment par le Seigneur, tout d’abord à chaque mutation de Seigneur et de tenancier, puis de 10 en 10 ans. Si le Seigneur veut obtenir des reconnaissances plus fréquentes (cas purement théorique), il doit alors seulement les faire à ses frais.
Un des premiers devoirs du Censitaire est celui de reconnaître à son Seigneur, c’est-à-dire de lui déclarer par acte ce qu’il possède comme pièces mouvant de sa Directe, sous tels et tels droits qu’il promet et s’oblige de payer. Dans l’usage, le Censitaire seul doit faire les frais, et ces frais ont été réglés notamment par l’Arrêt du 28 Août 1703: 30 sols pour les reconnaissances qui ne contiennent qu’un ou 2 articles, en ajoutant 5 sols pour chacun des autres articles jusqu’à 10, et 36 deniers pour chacun des autres au-delà de 10, sans comprendre le papier, sceau et contrôle.
La Reconnaissance doit contenir le détail de toutes les pièces soumises à la censive, avec leur indication exacte et leurs confronts, et les redevances et devoirs de toute nature auxquels est soumis le tenancier. Elle est obligatoirement passée devant notaire et témoins. Il n’est pas nécessaire que la reconnaissance soit faite par l’emphytéote en personne, mais celle-ci doit être faite au Château du Seigneur (ou dans la maison dans laquelle il aura élu domicile, dans la localité), si l’emphytéote n’a des raisons particulières pour ne point y paraître.
Cependant, les emphytéotes ne sont pas tenus de suivre le domicile du Seigneur, hors de la Seigneurie, pour aller faire leurs reconnaissances, et cela pour qu’il paraisse que les auteurs des emphytéotes, dans les reconnaissances qu’ils ont passé, se soient transportés à ce domicile étranger, parce qu’on regarde cette démarche comme ayant été, de leur part, un acte de complaisance, de politesse et de pure faculté, qui n’a pu devenir un titre de servitude.
Généralement, la reconnaissance prévoit le chiffre de la censive, avec l’indication du jour et du lieu où elle doit être portée, les acaptes et arrières acaptes, et les justices quant il y a lieu ; les lods et le droit de prélation. Le tenancier s’engage à ne pas détériorer mais améliorer le bien, à ne le grever d’aucun sur-cens (cependant il garde le droit de bailler sa terre à Locaterie Perpétuelle), ou autre charge préjudiciable à la Directe ; à ne pas le vendre, donner ou engager à des personnes de main morte; l’on spécifie souvent la pénalité du commis.
En effet, la reconnaissance ne saurait être trop complète car l’omission d’un de ces droits dans un acte de cette nature, en entraîne la perte pour le Seigneur. Entre plusieurs reconnaissances, celle qui décharge le tenancier est toujours tenue pour la bonne. La reconnaissance est un acte bilatéral. Aussi a-t-elle toujours été revêtue d’une grande importance. Elle suppléait au Bail à Cens, dont elle reproduit les stipulations. Une seule reconnaissance en faveur d’un particulier ne suffit pourtant pas, si ce n’est qu’elle soit soutenue par des Adminicules (rôles de Liève, quittances de droits, énonciations dans les contrats publics…), ou qu’il y soit fait mention d’une reconnaissance précédente, avec expression de la date, du nom des parties contractantes et du notaire qui l’a retenue, ou enfin qu’elle ait été consentie par le tenancier même qui conteste, ou ceux dont le tenancier a droit « ex causa lucrativa ». La règle générale est telle qu’en défaut de Bail ou de Titre Primordial, il faut nécessairement 2 reconnaissances. On admet que seuls le Roi et l’Eglise peuvent suppléer à la remise du Bail Original par une seule reconnaissance, parce qu’ils ne peuvent être présumés de mauvaise foi.
Remarquons que c’est par le propriétaire et non pas l’usufruitier, que doit se faire la reconnaissance; et cependant dans les ventes à faculté de rachat, c’est l’acquéreur, et non le vendeur, qui doit reconnaître. Mais le Seigneur peut exiger, s’il le souhaite ainsi, que l’usufruitier se joigne dans la reconnaissance avec le propriétaire, le vendeur avec l’acquéreur. C’est à savoir l’usufruitier, parce qu’il doit être chargé du payement de la Censive tant que durera son usufruit, et le vendeur, parce qu’il peut être rendu de nouveau propriétaire par l’exercice de la faculté de rachat.
Le Seigneur peut contraindre les tenanciers dont les possessions sont assujetties à la condition de l’Indivis, à se réunir pour lui passer une seule et même reconnaissance; mais il peut aussi se faire reconnaître particulièrement par chacun d’eux.
La reconnaissance de proche en proche: Dans nos pays de Franc Alleu, toutes les terres sont présumées libres, et le Seigneur qui réclame une redevance doit toujours prouver son droit par des Titres. Il y a une exception cependant, c’est le cas dans lequel les habitants ont reconnu leur Seigneur comme Seigneur Foncier, c’est-à-dire comme possédant la directe universelle sur tout le terroir, sans exception. Dans ce cas, la présomption d’allodialité s’effondre et tous les habitants doivent consentir reconnaissance au Seigneur, de proche en proche (c’est-à-dire chacun suivant et à proportion des tènements que possèdent les plus proches voisins).
II) Droits Utiles du Seigneur Directe
Ils ne sont jamais forcément réunis dans la même main. Celui qui les possède doit établir les preuves de sa prétention.
1) Les Banalités : elles sont parmi les plus importantes des droits utiles. On entend sous ce terme un monopole des fours, forges et moulins auxquels les habitants d’une Communauté sont obligés de faire moudre leur grain, cuire leur pain ou réparer leurs outils. La banalité se présente donc comme un contrat bien caractérisé: le Seigneur s’engage à construire et entretenir moulins, fours et forges et à y entretenir meunier, fournier ou forgeron; en échange, les habitants s’engagent à ne pas aller ailleurs moudre leurs grains, cuire leur pain ou réparer leurs outils… Parfois, les Seigneurs abandonnaient leurs droits de Banalités à la Communauté, mais dans beaucoup d’endroits, il n’y en avait jamais existé.
La preuve du droit de Banalité se rapporte, à défaut du titre primitif, par le moyen de reconnaissances générales ou ayant un caractère général. Les Hommages et Dénombrements ne sont pas considérés comme preuves, mais seulement comme des adminicules, car personne ne peut se faire de titres à soi-même.
Des reconnaissances particulières ne suffisent pas non plus à établir l’existence d’un tel monopole. Les Seigneurs accordaient d’ailleurs fréquemment, gracieusement ou moyennant finance, des exemptions de Banalité. Parfois, ces exemptions étaient des droits, moyennant le paiement d’une redevance convenue.
2) Droit de Boucherie : Droit d’origine toujours très ancienne. Il se prélève sur les viandes vendues et sur les bêtes que l’on abat en boucherie. La quantité prélevée est variable.
3) Droit de Chasse : le Seigneur Directe possède le droit de chasser personnellement dans l’étendue de son fief, s’il est bien délimité. Si le fief est morcelé, il peut demander le « Cantonnement », c’est-à-dire la fixation d’une portion de la Seigneurie où il pourra exercer son droit.
4) Droit de Coup ou Coupage : C’est une sorte de « droit de place » prélevé dans les villes de marché (le « Coup » est le 1/32 du Sétier).
5) La Corvée ou Courroc : On entend par ce terme les journées de travail que le Seigneur est en droit d’exiger de ses tenanciers (généralement pas plus d’une par tenancier). La Corvée n’est jamais due de plein droit, elle doit être prévue par les titres; aussi dans beaucoup d’endroits, n’a-t-elle jamais existé. La journée de Corvée doit commencer au coucher du Soleil et se terminer en sorte que, le Soleil couché, le corvéable soit rentré dans sa maison. Le Seigneur est obligé de nourrir le corvéable et ses bêtes. La date de la corvée est fixée chaque année par le Seigneur, d’après ses besoins, et à condition d’avertir les corvéables 2 jours à l’avance. Le travail de la Corvée ne peut avoir pour but que l’entretien du Domaine Seigneurial. C’est pourquoi un Seigneur Directe sans Domaine, ou un Seigneur Engagiste qui ne possède que des droits et point de terres, ne peuvent exiger les Corvées, même si leurs titres les prévoient. Dans beaucoup de localités existe un droit, payable en avoine appelée « Sivadieu » (nom de l’avoine en Languedoc). On confond même souvent le Sivadieu avec le Courroc. En effet, ce droit remplace généralement une seconde journée de Corvée que le Seigneur exigeait anciennement, et qui a été remplacé par ce paiement en avoine.
6) Droit de Forestage : droit d’usage concédé par les habitants dans les forêts d’un Seigneur.
7) Droit de Fouage : droit que paie, lorsque les titres le prévoient, chaque habitant « tenant feu », c’est-à-dire chaque chef de maison. Ce droit est très variable dans sa quotité et la forme de son paiement.
8) Droit de Fromagieu : il consiste en un fromage payé par les personnes qui élèvent des brebis.
9) Droit d’Herbage : droit de percevoir le 1/3 des secondes et dernières coupes de la prairie communale. Il n’est d’aucun revenu.
10) Droit de Péage : il se paie par les marchands et autres, pour leurs marchandises, en passant par certaines villes, ponts et rivières.
Il reçoit différents noms:
– « barrage », à cause de la barre qui est sur le chemin, pour marque du péage;
– « pontenage », au passage du pont;
– « billete », quand il y a un petit billot de bois pendu à un arbre;
– « branchière », à cause de la branche à laquelle le billot est pendu;
– « travers », pour montrer que ce droit se perçoit à cause du fait que l’on traverse la terre du Seigneur.
Le droit de péage ou pontage, établi sur les bestiaux et sur les marchandises qu’on fait passer sur un pont, ne se doit point étendre sur les bestiaux et les marchandises que l’on fait traverser par la terre du seigneur sans passer sur le pont; à moins qu’il n’y ait titre exprès qui l’ordonne.
Ces droits sont domaniaux et non d’aides ou de subsides, et ont été introduits pour l’entretien des ponts, passages, ports et chemins publics, afin que les marchandises soient voiturées sûrement. Ainsi les Seigneurs péagers sont dans l’obligation d’entretenir et de réparer à leurs dépens, les ponts, ports et passages. Ils doivent aussi tenir les passages sûrs; autrement ils seraient tenus de récompenser la perte que des particuliers auraient faite, faute par les Seigneurs d’y avoir mis ordre.
Les Seigneurs et autres, prétendant droit de péage, doivent avoir un poteau auquel sera attaché une pancarte contenant par le menu les droits de leur péage; faute de quoi ceux qui en devraient payer ne pourraient pas y être contraints.
La peine de l’infraction des péages est une amende arbitraire et la confiscation des marchandises au profit du propriétaire, et non pas du fermier, à moins que dans le bail il n’y en ait une clause particulière. Ainsi ceux qui ne paient pas les droits de péage et qui font passer des marchandises sans payer ces droits, encourent la perte des dites marchandises, conformément à la disposition des Lois.
Nul seigneur ne peut imposer nouveau péage sans la permission du Roi; et la connaissance de telle chose n’appartient qu’au juge Royal, soit qu’il s’agisse du droit de péage et pour la peine encourue pour l’infraction de ce droit, soit qu’il s’agisse de l’excès commis en le demandant. Comme le droit de péage est purement royal, il ne peut s’acquérir par une possession immémoriale et centenaire; il faut un titre qui ne peut émaner que de la concession du Prince.
Cependant, pour la perception et jouissance de ces droits, il n’est pas nécessaire de rapporter le titre primordial de la concession; il suffit d’une possession immémoriale, accompagnée de quelque titre faisant mention de ce droit, comme peuvent être des aveux et dénombrements anciens.
11) Droit de Leude : Il s’agit du même droit que celui décrit pour le seigneur féodal.
12) Droit d’Ovieu : droit payable en oeufs.
13) Droit de Pailleu : il se prélève sur les habitants dont la récolte donne assez de paille pour permettre d’élever un « Pailler ». Il consiste en un fagot de paille assez léger pour qu’un homme puisse le lever de terre et l’emporter sans l’aide de personne.
14) Droit de Poivrieu : payable en poivre.
15) Droit de Taille : Il s’agit du même droit que celui décrit pour le seigneur féodal.
16) Droit de Terrage : il est payé pour les défrichements opérés dans les vacants d’une Seigneurie où le Seigneur avait, comme Seigneur Foncier, la Directe Universelle. Il était fixé au chiffre de la semence, plus la paille provenant de la récolte.
17) Usage des Vacants : il s’agit de tous les biens incultes et sans maître. Lorsque le Seigneur d’une Communauté a le titre de Seigneur Foncier et la Directe Universelle sur tout le terroir, il est propriétaire des vacants dont il peut interdire l’usage aux habitants. Il peut aussi leur concéder, moyennant finance ou autrement, le droit d’y faire paître leurs bestiaux, d’y couper du bois, d’y extraire de la pierre, etc..
Nul n’a le droit de se les approprier en tout ou en partie sans son autorisation. Dans les Communautés ou le Seigneur a l’usage des vacants, il peut interdire aux habitants de tenir plus de bestiaux que leurs terres ne peuvent en nourrir. S’il trouve dans ses terres des bestiaux, appartenant à un propriétaire auquel il n’a pas concédé le droit de pâturage, il peut exercer sur eux le droit de « Pignore », c’est-à-dire les tenir enfermés chez lui jusqu’à la réparation du dommage.
III) Droit honorifiques du Seigneur Directe :
1) Respect dû au Seigneur : le Seigneur Directe a droit au respect de ses justiciables, qui lui doivent le « salut ». La prise de possession de la Seigneurie par un nouveau Seigneur donne lieu à un cérémonial.
2) Honneurs à l’église : les droits honorifiques du Seigneur Directe étaient assez problématiques; aussi étaient-ils l’objet de discussions passionnées. Le principe était qu’il ne pouvait avoir de banc sans titre, et que l’autorisation des bancs particuliers, non décorés de marques seigneuriales, ne pouvait être délivrée que par les Marguilliers de l’église. Cependant, il est généralement admis que le Seigneur Directe a le droit :
– d’avoir un banc dans l’église, derrière le Seigneur Justicier, les officiers de Justice et les consuls,
– de recevoir le pain bénit,
– d’aller à l’Offrande,
– de prendre rang des processions et cérémonies immédiatement après les consuls et en avant du peuple.
Les consuls et les curés mettent d’ailleurs la plus mauvaise grâce à reconnaître les droits honorifiques du Seigneur Directe, d’ailleurs assez incertains, et ils obtiennent souvent gain de cause.
3) Titre : les Seigneurs Directes peuvent se qualifier de « Co-Seigneurs Directes » du village. Si leur fief à un nom particulier, ils peuvent le prendre.
D) LA SEIGNEURIE JUSTICIERE
Les Justices Seigneuriales forment le 1er degré de Juridiction, qui va en appel:
– devant le Présidial, qui juge en dernier ressort les affaires de seconde importance (sa compétence est, en 1er ressort pour les affaires de 500 livres de capital ou 20 livres de rentes, et, en dernier ressort, pour les affaires de 250 livres de capital ou 10 livres de rentes);
– devant le Sénéchal, qui va en second appel devant le Parlement.
Réduite à un rôle assez voisin de celui des Justices de Paix, les Justices Seigneuriales, auxquelles toutes les affaires importantes étaient enlevées sous prétexte de « Cas Royaux », n’en subsistèrent pas moins d’une manière effective jusqu’à la Révolution.
Le titre de Seigneur Justicier était autrefois un honneur extrêmement convoité. De ce fait, les droits de Justice pouvaient être divisés entre plusieurs particuliers.
La Justice ne rapporte rien, en dehors des amendes et des confiscations – ce sur quoi on est peu renseigné. L’humeur processive de nos ancêtres semble, en tout cas, avoir assuré aux Seigneurs Justiciers une petite source de revenus non négligeables.
I) L’organisation de la Justice :
Les Seigneurs Justiciers ne peuvent donner l’état de prévôt, ou de procureur de la seigneurie, à celui qui en sera fermier; autrement ce serait établir un même homme agent et patient, outre l’indécence qu’il y aurait que le Juge de la Seigneurie en fût aussi le fermier.
Les Juges subalternes ne peuvent point être receveurs des Seigneurs dont ils sont juges.
Les juges des Seigneurs doivent agir en tout dans la vue de rendre la justice, et non pas le dessein de plaire à leurs seigneurs.
Le Lieutenant de Juge seigneurial doit être créé par le Seigneur et non par le Juge.
Un juge subalterne est compétent pour corriger et punir les officiers d’une autre justice subalterne qui lui est inférieure.
Quand les seigneurs ont la propriété de la justice de leur terre, elle leur est patrimoniale, de même que le fief auquel elle est annexée. S’ils sont alors troublés en la possession de leur justice, soit Haute, Moyenne ou Basse, ils peuvent donc former complainte contre ceux qui se prétendent possesseurs légitimes de la même justice. De ce que les justices sont patrimoniales en France, il s’ensuit que le Roi même n’en peut pas disposer au préjudice des seigneurs.
La Haute justice comprend les deux autres et la Moyenne comprend la Basse. La raison en est, qu’ordinairement celui qui peut le plus, peut aussi le moins.
On n’appelle point de la Basse Justice à la Moyenne, on va droit à la Haute; ce qui est une exception à la règle qui veut que tout appel soit porté « gradatim » au juge supérieur, « non omisso medio ».
A l’égard des appellations interjetées des sentences du Moyen-Justicier, elles vont, conformément à la règle ordinaire, à la Haute Justice.
Les Hauts et Moyens Justiciers ont un procureur fiscal; mais le Bas Justicier n’en a point, parce qu’il ne juge aucune cause où le Roi et le public aient intérêt.
II) La Haute Justice :
Le Haut Justicier est un seigneur qui a Haute, Moyenne et Basse Justice, c’est-à-dire droit de connaître de toutes causes réelles, personnelles et mixtes entre ses sujets, et qui a droit et puissance de glaive sur eux. Les seigneurs l’ont « habens jus gladii ad animadvertendum in facinorosos homines »: c’est pourquoi ils ont droit d’avoir fourches patibulaires, piloris, échelles et poteaux à mettre carcan.
Le juge de la Haute Justice peut faire criées et proclamations publiques, et connaître de tous les crimes qui se commettent dans l’étendue de sa juridiction, pour lesquels il y a peine afflictive; mais le Bas ni le Moyen Justicier ne peuvent connaître des crimes où il y a effusion de sang.
Pour l’exécution de sa Justice, le seigneur Haut Justicier doit avoir des juges et des officiers par le ministère desquels il l’exerce. Il doit aussi avoir des geôliers et des prisons sûres et raisonnables suivant l’Ordonnance; car le droit de Justice renferme essentiellement le devoir de la faire rendre, et les autres devoirs particuliers qui font les suites de ce premier.
Les juges des Seigneurs Hauts Justiciers ne peuvent toutefois connaître des cas royaux, tels que sont le crime de lèse-majesté, fausse monnaie, assemblées illicites, vols et assassinats sur les grands chemins, et autres qui sont marqués dans l’Ordonnance de 1670. Mais à l’exception de ces cas (dont la connaissance appartient aux juges Royaux privativement aux juges des seigneurs), les Hauts Justiciers peuvent connaître de tous les autres crimes qui sont commis dans l’étendue de leur juridiction et territoire de leur seigneurie.
Ils connaissent donc des vols faits dans les maisons, jardins et héritages, des assassinats et homicides volontaires commis hors les grands chemins, de l’homicide de soi-même, de la suppression et latitation (c’est-à-dire le recel) de part, et de l’incendie, pourvu néanmoins que les crimes que nous venons de rapporter aient été commis par des gens domiciliés et non vagabonds.
Les juges des seigneurs Hauts-Justiciers peuvent, dans les cas qui sont de leur compétence, condamner les coupables au fouet, au carcan, à faire amende honorable, à être marqués d’un fer rouge, au bannissement de la Juridiction ou détroit, et même à la mort.
Mais ces condamnations ne peuvent se mettre à exécution qu’elles n’aient été confirmées par les juges supérieurs, soit que l’accusé s’en plaigne ou non, suivant l’article 6 du titre 26 de l’Ordonnance de 1670. Cet article ordonne que si la sentence rendue par le juge des lieux porte condamnation de peine corporelle, de galères, etc., soit qu’il y ait appel ou non, l’accusé et son procès seront envoyés ensemble aux prisons des Cours supérieures. Ainsi lorsque le condamné ne se plaint point du jugement de condamnation, le Procureur Fiscal est tenu de se rendre appelant pour lui.
Les juges des seigneurs Hauts-Justiciers doivent tenir la main à ce que la police soit observée: d’où il s’ensuit qu’ils doivent empêcher les débauches publiques et les commerces infâmes de prostitution.
Outre la connaissance qui leur est attribuée en matière criminelle, pour la punition des délits et crimes dans l’étendue de leur détroit, ils connaissent encore au civil:
– de toutes causes réelles, personnelles et mixtes;
– ils ont droit de créer et bailler des tuteurs et curateurs et d’apposer les scellés;
– ils ont droit de faire inventaire des biens des mineurs auxquels ils ont fait pourvoir de tuteurs et curateurs et non autrement;
– ils peuvent faire les décrets des biens situés dans leur détroit, pourvu que les criées aient été faites et publiées dans le lieu de leur juridiction;
– ils connaissent des causes d’entre le seigneur Haut Justicier et ses sujets pour ce qui concerne les domaines, droits et revenus, ordinaires et casuels de la seigneurie, même des baux concernant les dits droits.
Mais ils ne peuvent connaître des autres causes où le seigneur a intérêt, comme promesse, ou obligation, ou réparation d’injures. Si le juge du seigneur Haut Justicier pouvait connaître des causes où son seigneur aurait intérêt, pour raison de telles choses, le seigneur lui-même serait juge dans sa propre cause, par rapport aux égards que son juge pourrait avoir pour lui, et par rapport à la crainte qu’il pourrait avoir d’être par lui destitué, au cas qu’il fit quelque chose qui pût lui déplaire.
La Déclaration de 1537 porte que tous les seigneurs de fief qui ont Justice pourront la faire exercer entre personnes nobles et plébiens, tout ainsi qu’ils ont fait avant l’Edit de Crémieu.
Il y a d’autres causes dont la connaissance est interdite aux juges des seigneurs Hauts Justiciers, en matière civile:
– ils ne peuvent connaître de toutes les causes qui sont réservées au juge Royal, privativement aux juges subalternes; savoir celles qui concerne le Domaine du Roi et où le Roi a intérêt; celles qui regardent les officiers Royaux; celles des églises Cathédrales et autres privilégiées et de fondation royale; les causes des officiers du Roi et de ceux qui ont leurs causes commises, quand ils veulent s’en servir.
– Ils ne peuvent aussi connaître des dîmes, si elles ne sont inféodées et si elles ne sont tenues en fief du seigneur Haut Justicier; encore la prévention en appartient-elle aux juges Royaux.
– Ils ne peuvent aussi connaître des actions qui naissent à raison des fiefs nobles, soit entre gentilshommes ou roturiers.
– Ils ne leur appartient pas aussi de donner des tuteurs ni des curateurs aux nobles; de procéder à leur émancipation, ni de faire aucun acte qui concerne cette espèce de tutelle ou de curatelle.
– Les juges des Hauts Justiciers ne peuvent connaître des complaintes (c’est-à-dire d’une action possessoire, par laquelle le possesseur d’un héritage ou droit réel, qui est troublé en sa possession s’en plaint et demande d’être maintenu dans sa possession, et que défenses soient faites de l’y troubler) pour des bénéfices qui sont au-dedans de leurs Hautes Justices.
– Ils ne peuvent point aussi user d’arrêt ou emprisonnement sur aucun officiers Royaux, comme Notaire ou Sergents, qui instrumentent ou exploitent dans le détroit de leurs Hautes Justices. Mais ceux qui prétendent qu’ils ont failli peuvent en porter leurs plaintes au prochain juge Royal, pour en avoir justice.
Dans toutes les matières sommaires qui sont de la compétence des Hauts Justiciers, leurs sentences sont exécutoires par provision, nonobstant l’appel jusqu’à la somme de 1000 livres, en baillant caution, suivant l’article 14 du titre 17 de l’Ordonnance de 1667.
L’article 13 du même titre dit que, dans les matières sommaires, les juges des Pairies et autres Justices subalternes qui ressortissent immédiatement au Parlement, peuvent juger définitivement, nonobstant l’appel, jusqu’à la somme de 40 livres; et que les juges des autres juridictions subalternes, non ressortissantes sans moyen au Parlement, jugeront définitivement jusqu’à la somme de 25 livres, encore qu’il n’y ait aucun contrat, obligation ,ni promesse reconnue.
Il y a un Règlement de la Cour du 7 Décembre 1689 qui fait défense à tous juges de ressort d’ordonner l’exécution provisoire de leurs sentences pendant l’appel, sinon dans les cas portés par l’Ordonnance.
Les appellation interjetées des juges Hauts Justiciers se relèvent par-devant les Baillis et Sénéchaux des provinces, quand les seigneurs Hauts Justiciers relèvent immédiatement du Roi. Mais s’ils relèvent d’un seigneur Suzerain qui ait droit de ressort, elles se relèvent par devant le juge de ce seigneur Suzerain, si ce n’est en matière criminelle, où les appellations des Hauts Justiciers sont directement portées au Parlement, quand il y a peine afflictive (c’est-à-dire peine corporelle).
1) Droits utiles du Seigneur Haut Justicier :
a) Amendes : Le Seigneur Haut Justicier perçoit sa part des amendes.
b) Droit de Confiscation : la confiscation des biens est toujours prononcée en cas de condamnation à mort, aux galères perpétuelles ou au banniment perpétuel. Le Seigneur devient alors propriétaire des biens du condamné, à l’exception d’1/3 que l’on adjuge à la veuve et aux enfants de celui-ci. Les biens sur lesquels le Seigneur a le droit de confiscation sont seulement ceux qui sont situés dans sa Juridiction. Le Seigneur succède également aux dettes qu’il est obligé de payer, ainsi que les frais du procès, jusqu’à concurrence de la valeur des biens confisqués.
c) Droit de Sang : amende que paie celui qui s’est battu jusqu’à effusion de sang.
d) Droit de Deshérence : le Seigneur Haut Justicier succède aux personnes qui meurent sans avoir fait de testament et sans laisser de parents connus, pour les biens qui se trouvent dans sa juridiction. Le Seigneur recueille aussi la succession du bâtard mort « ab intestat » et sans enfants, à condition qu’il soit né, qu’il ait vécu et qu’il soit mort dans sa juridiction. A défaut de l’une de ces conditions, le droit du Seigneur Haut Justicier est détruit au profit du Roi.
e) Droit d’Epave : le Seigneur devient propriétaire des « épaves », c’est-à-dire des bêtes ou des choses mobilières égarées, et dont le propriétaire primitif n’a pu être retrouvé. Par un curieux rapprochement, on rattache au droit d’épave l’obligation qu’incombe au Seigneur de nourrir les enfants trouvés dans sa juridiction.
f) Droit de Chasse : le droit exclusif de la chasse appartient au Seigneur Haut Justicier, qui a seul le droit de la défendre ou de l’autoriser dans l’intérieur de sa juridiction. Ce droit est rigoureusement personnel; le Seigneur qui chasse en personne peut se faire accompagner. S’il ne peut chasser lui-même, il peut faire exercer son droit par un garde-chasse portant bandoulière à ses armes, et inscrit à la Maîtrise des Eaux et Forêts
Le Seigneur Haut Justicier conserve le droit de chasser personnellement dans toute sa juridiction, même dans les fiefs appartenant à des Seigneurs Directes jouissant eux-mêmes du droit de chasse.
Les amendes pour faits de chasse se répartissent comme les autres, entre les mains des co-seigneurs Justiciers, en proportion de leurs parts de Justice.
g) Droit de Pêche : il appartenait, comme le droit de chasse, au Seigneur Haut Justicier, mais il était l’objet d’autorisations générales d’usage courant, et que n’interdisait aucune Ordonnance. De plus, c’était un droit utile qui, à la différence de la chasse, pouvait s’affermer au premier venu.
h) Droit de Colombier : le colombier est un lieu bâti pour y nourrir et y entretenir des pigeons. Il y en a de 2 sortes:
– les colombiers à pied, qui sont bâtis en forme de tour et qui ont des paniers à tenir pigeons depuis le haut jusqu’au rez-de-chaussée. Ce type de colombiers est une marque de noblesse pour le Seigneur Haut Justicier. Nul ne peut en faire sans sa permission;
– les volières et autres colombiers (nommées « volets » ou encore « fuyes ») sont ceux qui, bâtis sur piliers ou sur solives, ont un cellier ou une étable dessous. Chacun peut en faire construire si la coutume du lieu n’est pas contraire.
2) Droits honorifiques du Seigneur Haut Justicier :
a) Les Fourches Patibulaires : ce sont des colonnes de pierres au haut desquelles il y a une traverse à laquelle les condamnés à la mort sont attachés pour être étranglés, où, après avoir été suppliciés, ils sont exposés à la vue des passants.
Il ne sert donc qu’aux supplices capitaux, dont les exécutions ne se faisaient autrefois que hors les villes. C’est pour cela elles sont toujours plantées hors les bourgs, sur les terres de la Seigneurie (dans les champs).
Seul le seigneur Haut Justicier a le droit d’avoir des fourches patibulaires (ou gibets), puisqu’il a le droit de condamner un criminel à mort. De là vient que celui qui met à exécution les jugements de condamnation à mort, est appelé « exécuteur de la Haute Justice ».
A l’égard du nombre des piliers des fourches patibulaires, il y en a à 2, à 3, à 4 ou à 6, selon le titre et la qualité des fiefs qui ont droit d’en avoir. Les simples seigneurs Hauts Justiciers n’ont ordinairement droit d’avoir que des fourches patibulaires à 2 piliers, s’ils ne sont fondés en titre ou possession immémoriale. Les fourches à 3 piliers n’appartiennent de droit qu’aux seigneurs châtelains; celles à 4 piliers n’appartiennent qu’aux barons ou Vicomtes; celles à 6 piliers n’appartiennent qu’aux Comtes. Mais après tout, ce droit est différent selon les différentes coutumes.
Les fourches patibulaires tombées doivent être rétablies dans l’an et jour de leur destruction; après ce temps, il faut recourir au Prince pour les rétablir. Il en va de même d’ailleurs pour les piloris, échelles et poteaux à mettre carcan.
Il est à remarquer que les Seigneurs particuliers ne peuvent élever des potences dans les localités où le Roi a une portion de la Justice.
b) Le Pilori : c’est un poteau qu’un Haut Justicier fait élever en un carrefour pour marque de sa Seigneurie, où sont ses armes et ordinairement un carcan. Il sert pour les punitions corporelles non capitales qui, de tout temps, ont pu être faites dans les villes; c’est pourquoi il est toujours mis au principal carrefour ou endroit de la ville, bourg ou village de la Seigneurie.
Les seigneurs qui n’ont que la Justice Moyenne et Basse n’ont pas le droit d’avoir des poteaux ou piloris.
c) le Carcan : c’est un poteau où l’on attache un criminel par le cou avec un anneau de fer dans une place publique, et on l’expose ainsi à la risée des passants. Ce supplice emporte infamie. Il n’y a que les seigneurs Hauts Justiciers qui aient le droit d’avoir dans leurs terres un poteau à mettre carcan.
d) Honneurs à l’Eglise : Il possédait les honneurs suivants (souvent objet de querelles sans fin):
– avoir un banc dans le coeur de l’église paroissiale ou dans le lieu le plus éminent de l’église. Il était le seul à posséder un tel honneur;
– précéder tous les habitants dans les processions et à l’Offrande, avec sa famille (femme et enfants);
– recevoir en premier le pain bénit et les cierges;
– lors des aspersions d’eau bénite, le curé doit la lui donner séparément et d’une manière distincte;
– le curé doit le recommander en sa qualité de Seigneur dans les prières du prône;
– lorsque le Seigneur vient à mourir, l’on peint à l’intérieur et à l’extérieur de l’église, en signe de deuil, une bande de couleur noire (appelée « litre » ou « ceinture funèbre »). C’est un droit exclusif du Seigneur Haut Justicier.
e) Autorisation des Danses Publiques : le Seigneur autorisait ou interdisait, à son gré, les danses publiques. Sur ce dernier point, il était énergiquement soutenu par le curé.
f) Publication du Ban des Vendanges : l’époque de la vendange venue, les prud’hommes de la Communauté fixent la date à laquelle on peut commencer les vendanges. La date fixée une fois publiée, personne ne peut vendanger plus tôt, sauf le Seigneur, qui a 2 jours pour vendanger avant les autres (privilège qui lui donne des facilités de main d’oeuvre). La publication est faite au nom du Seigneur.
g) Droit de Château : Le Seigneur Haut Justicier possède un château avec tours, créneaux, girouettes, pont-levis et autres marques de domination seigneuriale. Il est le seul qui peut autoriser les particuliers à décorer leurs maisons de ces marques.
Le château est une place d’honneur et de sûreté, qui est propre aux seigneurs qui ont fief de dignité; de sorte que le château est regardé comme le chef et principal manoir du fief, où réside l’honneur et la marque de la domination du seigneur. Celui qui possède le château et principal manoir d’une terre et seigneurie est présumé avoir la juridiction, s’il n’apparaît du contraire.
Les vassaux et rentiers n’y peuvent bâtir d’autres châteaux et forteresses sans le consentement de leurs Seigneurs. Cela est absolument certain à l’égard des tenanciers. A l’égard des vassaux, les arrêts leur ont quelquefois permis, pourvu qu’il ne parût pas que leur dessein fût, en bâtissant, d’insulter leurs seigneurs.
La concession d’un château comprend le territoire et la juridiction annexés au fief et au château au temps de la concession. Il en est de même des moulins et des autres dépendances annexées au château et domaine de celui qui dispose du château.
Les reliques, les livres de chapelles, les ornements et les tableaux des châteaux des grands seigneurs sont censés inhérents aux châteaux, et par conséquent immeubles.
Les forains qui n’ont pas d’habitation mais quelques terres, ne sont point tenus de contribuer aux réparations du château du seigneur.
Plusieurs Seigneurs Haut Justicier dénombrent le droit qu’ils ont d’exiger des habitants, l’obligation de faire le guet et monter la garde à leur château, en cas de guerre ou troubles. Ce droit s’accompagne de celui de garder les clefs de la ville et d’obliger les habitants à des corvées particulières pour la réparation des murailles de défense.
h) Droits divers : le Seigneur Haut Justicier a droit au respect de ses justiciables, qui lui doivent le « salut ». La prise de possession de la Seigneurie par un nouveau Seigneur donne lieu à un cérémonial.
i) Titre : seul le Seigneur Haut Justicier peut prendre le nom de « Seigneur de … », en prenant le nom du village. Lorsqu’il y a plusieurs Seigneurs Haut Justicier, le plus important prend le titre de « Seigneur de… », les autres celui de « Co-Seigneur de … » ou « Seigneur de … » la portion qui dépend d’eux.
III) La Moyenne et Basse Justice :
Les appellations des Bas et Moyens Justiciers se relèvent devant le Haut Justicier.
Ni les Moyens Justiciers, ni Bas Justiciers ne peuvent faire d’adjudications par décret.
Les Moyens Justiciers ont la connaissance, ou, pour mieux dire, l’inspection des mesures dans l’étendue de leur justice.
Comme le Bas Justicier peut demander renvoi au Haut Justicier des causes et matières qui sont de sa compétence, ce même droit appartient, à plus forte raison, au Moyen Justicier.
1) La Moyenne Justice :
Le Moyen-Justicier est un seigneur qui a le droit de Moyenne Justice, à cause de la foi et hommage, et des droits qui lui sont dus par ses vassaux.
Voici les articles qui expliquent le pouvoir du Moyen Justicier; et de quelles causes connaît le juge qui est préposé à une Moyenne Justice:
Il connaît en première instance de toutes actions civiles, réelles, personnelles et mixtes. Il a aussi la connaissance des droits et devoirs dus au Seigneur, avec le pouvoir de condamner ses sujets à l’amende de la Coutume.
En matière criminelle, il peut connaître des délits ou crimes légers, dont la peine ne puisse être tout au plus qu’une condamnation de 75 sols d’amende envers Justice. Si le crime commis en la terre du Moyen Justicier méritait plus grave peine, le procureur fiscal, appelé aussi procureur d’office, doit dénoncer le coupable au Haut-Justicier, pour qu’il ait à en connaître.
Pour l’exercice de la Moyenne Justice, il doit avoir Siège, Juge, Procureur d’office, Greffier, Sergents, Prison au rez-de-chaussée, sûre et bien fermée.
Peut le dit Moyen Justicier prendre, ou faire prendre tous délinquants qu’il trouve en sa terre, les emprisonner, informer, tenir le prisonnier l’espace de 24 heures. A l’instant des 24 heures, si le crime mérite plus grave punition que de 60 sols parisis envers Justice, il est tenu de faire conduire le prisonnier au Haut-Justicier, et y faire porter le procès, pour y être pourvu. Ainsi la connaissance des crimes dont la peine donne atteinte à l’honneur, n’appartient point au seigneur qui n’a que Moyenne et Basse Justice, mais seulement au juge du seigneur qui a la Haute Justice, auquel le vassal est obligé d’envoyer les délinquants dans les 24 heures qu’ils auront été constitués prisonniers.
Le juge du Moyen Justicier peut donc informer, même décréter les prévenus de crimes qui méritent plus grave punition que de 60 sols parisis envers Justice, et faire dans les 24 heures l’instruction jusqu’à sentence définitive exclusivement, et ensuite il doit transférer les prisonniers dans les prisons du Haut-Justicier; mais après les 24 heures, il ne peut plus en prendre connaissance, ni faire aucune instruction.
Si le Haut Justicier donne sentence contre un sujet du Moyen Justicier, ou autre dont il aura fait la capture, et si celui-ci le fait mener aux prisons du Moyen Justicier, le dit Moyen Justicier prendra préalablement, sur l’amende ou confiscation, 60 sols parisis, avec les frais de la capture et autres semblables.
Celui qui a Moyenne Justice, peut créer et bailler tuteurs et curateurs, et pour cet effet, faire apposer scellés, faire inventaire des biens des mineurs auxquels il aura fait pourvoir de tuteurs, et non autrement.
Peut le Moyen Justicier faire mesurer, arpenter et borner entre ses sujets les chemins et voies publiques, élire messiers dans la saison, auxquels il fera taxe raisonnable, et condamner ses sujets en l’amende par faute de cens non payé aux justices où l’amende est due.
Droits utiles du Moyen Justicier :
Le Seigneur Moyen Justicier Justicier perçoit sa part des amendes. S’il ne possède pas de directe, il n’a aucun droit de chasse. Enfin, il peut orner sa maison des marques seigneuriales: tours, créneaux, girouettes et pont-levis, interdites à tout autre, sauf autorisation du Seigneur Haut Justicier.
Droits honorifiques du Moyen Justicier :
Il a droit au respect de ses justiciables, qui lui doivent le « salut » et a toujours la préséance sur les Seigneurs Bas Justicier et Directe.
2) La Basse Justice :
Le Bas Justicier est un seigneur qui a droit de Basse Justice, que l’on appelle Justice Foncière ou Censuelle, à cause du cens, et des charges et redevances annuelles qui lui sont dues.
Le juge préposé à une telle justice, connaît des droits dus au seigneur, cens et rentes, exhibitions de contrats, pour raison des héritages situés dans son territoire.
Il connaît encore de toutes matières personnelles entre les sujets du seigneur, jusqu’à la somme de 60 sols parisis.
Enfin, il connaît de la police, du dégât des bêtes, d’injures légères, et autres délits, dont l’amende ne pourrait être que de 10 sols parisis et au-dessous.
Lorsque le délit requiert une plus grande amende, il doit en avertir le Haut Justicier, et alors le Bas Justicier prendra sur l’amende adjugée jusqu’à 6 sols parisis.
Il peut prendre en sa terre tous les délinquants, et pour cet effet avoir maire, sergent et prison; à la charge toutefois de faire incontinent après la capture, mener le prisonnier au Haut-Justicier, avec l’information, sans pouvoir décréter.
Peut aussi le Bas Justicier mesurer et mettre bornes entre ses sujets, de leur consentement; connaître de la censive et condamner ses sujets à l’amende, par faute de cens non-payé.
Le Bas Justicier peut demander renvoi au Haut Justicier des causes et matières qui sont de sa compétence.
On comprend facilement qu’avec la dépréciation constante de l’argent, les droits du Seigneur Bas Justicier avaient fini par devenir complètement illusoires. Mais l’amour des titres a toujours été si grand que l’on ne cessait d’usurper celui-là.
Droits utiles du Bas Justicier :
Le Seigneur Bas Justicier Justicier perçoit sa part des amendes. S’il ne possède pas de directe, il n’a aucun droit de chasse. Enfin, il peut orner sa maison des marques seigneuriales: tours, créneaux, girouettes et pont-levis, interdites à tout autre, sauf autorisation du Seigneur Haut Justicier.
Droits honorifiques du Bas Justicier :
Il a droit au respect de ses justiciables, qui lui doivent le « salut » et a toujours la préséance sur le Seigneur Directe.
Sources : Ces notes sont extraites des deux ouvrages suivants :
- « Traité des Droits Seigneuriaux et des matières Féodales » par M. Noble François DE BOUTARIC, Toulouse, 1775.
- « Dictionnaire de Droit et de Pratique » par M. Claude-Joseph de Ferrière, doyen des docteurs-régens de la Faculté des droits de Paris, et ancien avocat au Parlement, 2 tomes, Paris, 1762.
Auteur des notes : Jean-Claude TOUREILLE jctou@arisitum.org