Une critique des Ateliers Nationaux
«Les Ateliers nationaux ne rendent à l’État qu’un produit dérisoire et hors de proportion avec ses immenses sacrifices. L’inaction n’y est plus la conséquence d’une organisation improvisée et défectueuse ; elle y est devenue systématiquement hostile au travail lui-même […] On y est entré parce qu’on n’avait pas d’ouvrage ; on refuse d’en sortir lors même que lors même que l’ouvrage se présente, ou bien l’on impose des conditions inacceptables […] Les Ateliers nationaux, on ne peut vous le dissimuler, ne sont plus aujourd’hui, au point de vue industriel qu’une grève permanente et organisée à cent soixante-dix mille francs par jour, soit quarante-cinq millions par an ; au point de vue politique, un foyer actif de fermentation menaçante.»
Comte de Falloux, «Discours à l’Assemblée constituante», 29 mai 1848.
Qui est exclu du suffrage universel ?
«Nous avons exclu cette classe d’hommes dont on ne peut saisir le domicile nulle part. Il faut tout faire pour le pauvre […] excepté cependant de lui donner à décider les grandes questions où s’agitent le sort et l’avenir du pays […]
Mais ces hommes que nous avons exclus, sont-ce les pauvres ? Non, ce n’est pas le pauvre, c’est le vagabond. Ce sont ces hommes qui forment, non pas le fond, mais la partie dangereuse des grandes populations agglomérées ; ce sont ces hommes qui méritent ce titre, l’un des plus flétris de l’histoire […], le titre de multitude. Les vrais républicains redoutent la multitude, la vile multitude qui a perdu toutes les républiques.»
Adolphe Thiers, «Discours à l’Assemblée législative», 24 mai 1850.
La peur des possédants
«Le département de la Manche est peuplé presque uniquement d’agriculteurs […] La Révolution y fut d’abord comme inaperçue… Le garde de mes propriétés, demi-paysan, m’écrivait : » Les gens disent que si Louis-Philippe a été renvoyé, c’est bien fait et qu’il l’avait bien mérité… » Mais quand ils entendirent parler du désordre qui régnait dans Paris, des impôts nouveaux qu’on allait établir, de la guerre générale qui était à craindre; lorsqu’ils virent le commerce qui s’arrêtait et l’argent qui semblait s’enfoncer sous terre et que, surtout, ils apprirent qu’on attaquait le principe de propriété, ils s’aperçurent bien qu’il s’agissait d’autre chose que de Louis-Philippe. La peur, qui s’était d’abord arrêtée dans le haut de la société, descendit alors jusque dans le fond de la classe populaire, et une terreur universelle s’empara de tout le pays.»
A. de Lamartine, Histoire de la révolution de 1848, Paris, 1849.