Extrait d’un texte intitulé « La guerre fratricide et l’appel du Pape pour la paix », paru dans La Civiltà cattolica, 1922.
« Le fascisme a l’esprit de violence du socialisme, auquel il prétend pourtant remédier. Non seulement il l’imite mais le surpasse en violences, en meurtres et en barbarie. C’est en fait l’aboutissement logique d’un principe qui apparaît comme évident dans les racines mêmes du nationalisme, comme on n’a pas manqué de le souligner de divers côtés, mais aussi dans les origines du fascisme auquel on a également souvent reproché son inspiration étrangère et l’ingérence juive et maçonnique qui s’y manifeste: c’est-à-dire le soutien financier de capitalistes vieux et aveugles, ou bien des jeunes loups affamés de guerre. Les uns et les autres entretiennent pour quelques dizaines de lires par jour les squadre armées des fascistes, qui, pires que les bravi (brigands d’honneur) des siècles passés, lancent leurs expéditions punitives pour la destruction et les exactions. De pareils excès, qui dépassent ceux de nos socialistes et de nos communistes et que l’on ne peut que rapprocher des hauts faits du bolchevisme, ne sont pas apparus soudain; ils étaient à l’état latent dans le fascisme: celui-ci voulait le triomphe de l’esprit de représailles et de vengeance, de violence et de sang, et, pour finir, la substitution d’une puissance privés et illégitime à l’autorité légitime de l’Etat. Les catholiques ne peuvent donc approuver ni soutenir le fascisme, pas davantage que le socialisme, car l’un et l’autre sont contraires aux principes les plus élémentaires du christianisme. »
Editorial du « Popolo d’Italia » du 15 juillet 1922 (p. 278-280)
A. « Le fascisme italien est actuellement engagé dans quelques batailles décisives d’épuration locale…Il suffit de lire les journaux des adversaires pour comprendre que la plus grande confusion règne dans le camp ennemi. L’un invoque l’aide du gouvernement, l’autre menace de la grève générale, l’autre incite encore au crime individuel, il y en a qui recommandent d’attendre et de patienter…
B. Ils nous appellent encore et toujours : bandits, canailles, barbares, esclavagistes, brigands, vendus. Nous nous en foutons ! Vous imprimez, Messieurs, des injures inutiles. Nous vous répondons en vous sciant politiquement et syndicalement les os. Avec une chirurgie inexorable. »
Extrait de André Brissaud, Mussolini, tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Editorial du « Popolo d’Italia » du 29 octobre 1922 (p. 323)
A. « Voici la situation. La majeure partie de l’Italie du Nord est aux mains des fascistes. L’Italie centrale – Toscane, Ombrie, Marches, Haut-Latium – est occupée par les chemises noires…Une immense victoire est en vue avec l’approbation presque unanime de la nation. Mais la victoire ne doit pas être mutilée par des combinaisons de la dernière heure. Ce n’était vraiment pas la peine de se mobiliser à seule fin d’aboutir à une entente avec Salandra*.
B. Le fascisme n’abusera pas de sa victoire, mais il est décidé à ce qu’elle ne soit pas diminuée…Les fascistes ont été et sont admirables. Leur abnégation est grande et doit être couronnée par une victoire totale..A Rome, certains politiciens font preuve d’un manque de compréhension oscillant entre une atonie grotesque ou paralysée. A eux de décider. Le fascisme veut le pouvoir et l’aura. »
* ex-président du Conseil (équivalent à premier ministre) qui est pressenti par le Roi pour régler la crise que traverse l’Italie.
Extrait de André Brissaud, Mussolini, tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Editorial du « Popolo d’ Italia » du 12 décembre 1919 (p. 225)
A. « Nous qui détestons intimement tous les christianismes, aussi bien celui de Jésus que celui de Marx, nous gardons une extraordinaire sympathie pour cette reprise dans la vie moderne du culte païen et de l’audace…
B. Assez, théologiens rouges et noirs de toutes les églises, de cette fausse et astucieuse promesse d’un paradis qui ne viendra jamais ! Assez, ridicules sauveurs du genre humain qui se fout de vos recettes infaillibles pour donner le bonheur ! Laissez le chemin libre aux forces élémentaires des individus, puisqu’il n’existe pas d’autre réalité humaine que l’individu. »
Extrait de André Brissaud, Mussolini, tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Editorial du « Popolo d’Italia » du 1er janvier 1920 (p. 225)
A. Nous avons déchiré toutes les vérités révélées, crachés sur tous les dogmes, repoussés tous les paradis, bafoué tous les charlatans – blancs, noirs, rouges – qui mettent dans le commerce les drogues miraculeuses pour donner le bonheur au genre humain. Nous ne croyons pas aux programmes, aux schèmes, aux saints, aux apôtres ; surtout nous ne croyons pas au bonheur, au salut, à la terre promise…
B. Revenons à l’individu. Nous appuyons tout ce qui exalte, amplifie l’individu, lui donne plus de bien-être, de liberté, une plus grande latitude de vie ; nous combattons tout ce qui déprime, mortifie l’individu. Deux religions se disputent aujourd’hui la domination des esprits du monde : la noire et la rouge. De deux Vaticans partent aujourd’hui les encycliques : celui de Rome et celui de Moscou. Nous sommes les hérétiques de ces deux religions. »
Extrait de André Brissaud, Mussolini , tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Premier discours de Mussolini au Parlement le 21 juin 1921
(p. 257-258)
A. « Tant que les communistes parleront de dictature prolétarienne, de république populaire, d’absurdités plus ou moins efficaces, il ne pourra y avoir entre eux et nous que la guerre…je les connais bien parce qu’une partie d’entre eux sont mes créatures ; je reconnais, avec une sincérité qui peut paraître cynique, que moi le premier j’ai infecté ces gens-là, lorsque j’ai introduit dans la circulation du socialisme italien un peu de Bergson* mélangé avec beaucoup de Blanqui**. Mais ces gens-là ont mal digéré cette nourriture…
B. …Je suis un libéral. La nouvelle réalité de demain, répétons-le, sera capitaliste. La vraie histoire du capitalisme ne commence que maintenant. Le socialisme n’a plus une chance de s’imposer. Il s’agit de choisir entre un passé presque mort et des possibilités illimitées d’avenir… Il faut abolir l’Etat collectiviste, tel que la guerre nous l’a transmis, par la nécessité des choses, et revenir à l’Etat manchestérien***. »
* Bergson : philosophe français qui fait de l’intuition le seul moyen de connaissance.
** Blanqui : théoricien socialiste, inspirateur du syndicalisme révolutionnaire de la fin du XIXe s.
*** Ecole de Manchester : nom donné à un groupe de riches fabricants de Manchester qui a fait adopter par l’Angleterre, au XXe s., le système de libre-échange.
Extrait de André Brissaud, Mussolini , tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Programme du Parti National Fasciste du 27 décembre 1921
(p. 271-272)
A. « La nation n’est pas la simple somme des individus vivants ni l’instrument des fins des partis, mais un organisme comprenant la série indéfinie des générations dont les individus sont des éléments passagers ; c’est la synthèse suprême de toutes les valeurs matérielles et spirituelles de la race…
B. L’Etat doit être réduit à des fonctions essentielles d’ordre politique et juridique… Les pouvoirs et les fonctions actuellement attribués au Parlement doivent être limités… L’Etat est souverain et cette souveraineté ne peut ni ne doit être entamée ou diminuée par l’Eglise…L’Etat doit être le gardien jaloux, le défenseur et le propagateur de la tradition nationale, du sentiment national, de la volonté nationale… »
Extrait de André Brissaud, Mussolini , tome 1 : le révolutionnaire, Paris, 1975
Les débuts du fascisme à Florence
Peu après l’accès au pouvoir de Mussolini, l’écrivain hongrois Sandor Marai fait un séjour à Florence. Il arrive de Paris où il a séjourné quelques semaines. Il voyage en compagnie de son épouse.
« Florence était le nid du fascisme naissant. Vêtues d’uniformes noirs, noblesse toscane et jeunesse florentine rejoignaient en masse le faisceau, insigne du nouveau mouvement ; les rues grouillaient d’adolescents à la chevelure fournie et au regard sévère, visiblement séduits par le charme sombre de l’uniforme. Il faut dire que les jeunes fascistes touchaient des indemnités et obtenaient du travail : pouvait-on, dans ces conditions, s’étonner de leur enthousiasme ? Un ordre strict réglementait la vie quotidienne ; sur les murs, des affiches criardes vantaient les résultats du régime : trains arrivant à l’heure, monnaie stable, amélioration de la sécurité publique (…). Le fascisme venait d’anéantir et de disperser la social-démocratie ; réduits désormais à la clandestinité, les socialistes se réunissaient en secret, comme les premiers chrétiens des catacombes. Toute ma sympathie allant au mouvement ouvrier vaincu, j’assistais avec des sentiments hostiles aux parades de la dictature triomphante. Force était d’admettre, pourtant, que ce que j’avais appris en Europe centrale sur « lois de l’évolution sociale » ne s’appliquait guère à l’âme italienne. Les événements d’Italie, nul n’aurait pu le nier, constituaient l’expression de la volonté unitaire de tout un peuple. Toutefois, le rôle que jouait dans un tel mouvement la personnalité d’un seul homme incitait les observateurs étrangers au scepticisme. Cet homme énergique, inspirateur de cette vaste entreprise, se rendit souvent à Florence pendant mon séjour dans cette ville ; du reste, je l’avais déjà vu à Berlin, avant même la marcia su Roma, dans le hall d’un hôtel situé au centre de la ville où cet ex-journaliste répondait aux questions des journalistes. Je le revis ensuite à Bologne et à Venise où des foules fanatisées guettaient chacun de ses gestes. À cette époque, on n’aurait pas donné cher de sa vie ; à Florence, place Victor-Emmanuel, où, entouré de dizaine de milliers de personnes, mais sans le moindre garde du corps, il se trouvait exposé à la vengeance de ses adversaires, il semblait protégé par sa bonne étoile. Invulnérable. Comme s’il avait introduit un courant de haute tension, une énergie brute dans cette Italie du dolce farniente. Il galvanisait la population et, par-delà la politique et les slogans, cette force, qui émanait de lui seul, se répandait des Alpes jusqu’à la Sicile. Celui qui n’a pas vécu les débuts du fascisme en Italie ne saurait comprendre le succès de ce mouvement. Que représente donc un homme, un seul homme ? Il faut croire qu’il représente tout. »
Sandor Marai. Les Confessions d’un bourgeois. Paris, Albin Michel/Le Livre de Poche, 1993/2002, pp. 458 – 459.
La doctrine fasciste et ses adversaires selon Mussolini
» […] On a dit […] que nous n’avions pas de doctrine. Eh ! bien, je ne connais pas un seul mouvement spirituel et politique qui ait une doctrine plus solide et plus définie […] : l’État […] doit être fort ; le gouvernement […] a le devoir de se défendre parce qu’il défend aussi la nation contre tout travail de désintégration ; la collaboration des classes, le respect de la religion ; l’exaltation de toutes les énergies nationales. […]
Que nous opposent nos adversaires ? Rien. Des misères. Ils sont en retard de cinquante ans. Ils changent en postulats les rêveries des positivistes. Je dis les rêveries, parce que de même qu’il n’y a pas d’hommes plus dangereux que les pacifistes, il n’y a pas rêveur plus déterminé [sic] que les positivistes. Tout le procès de rénovation spirituelle conduit par les nouvelles générations est ignoré d’eux. […] Passons au libéralisme. L’on dit souvent : « Le libéralisme a fait l’Italie ». Mais, doucement. N’exagérons pas. Je contesterais, pour moi, qu’il y ait eu, pendant le Risorgimento, […] un vrai parti libéral, au sens moderne du terme. Mais […] le tricolore italien flotte sur le Mont Nevoso. Si nous avions suivi les inspirations du libéralisme […], il flotterait tout juste au plus à la gare de Cervignano. […]
Et j’en arrive, messieurs, au dégonflement de la plus prétentieuse vessie de toutes les oppositions : je parle de la Liberté. […] La Liberté n’est pas un concept absolu. […] La liberté n’est pas un droit : c’est un devoir. […] La notion de liberté change avec le cours du temps. […] Lorsqu’une nation est engagée comme l’Italie d’hier et d’aujourd’hui, lorsqu’il est question pour elle de vie ou de mort, est-ce que vous allez encore suivre vos dangereuses chimères ? Je dis que non. […] L’on me dit que je gouverne au moyen de la Force. Mais tous les gouvernements qui sont forts gouvernent par la Force. Du reste la Force implique l’assentiment. Il n’y a pas de force sans un consentement, et le consentement n’existe pas sans la force. […]
Celui qui gouverne sent battre dans son coeur le coeur du peuple. Il serait oiseux d’égrener tout le détail d’un beau programme. Ce qui importe, ce sont les directives. Je ne procéderai pas devant vous au minutieux déballage de la pacotille politique. […] Je ne veux pas que le fascisme attrape la maladie électorale. Je veux qu’une partie du Fascisme intervienne au Parlement, mais je veux que le Fascisme lui-même reste en dehors, pour contrôler et animer ses représentants. Le Parti National fasciste doit rester, par définition, la réserve toujours intacte de la Révolution fasciste. […]
De nombreux adversaires se demandent ce que demain la Révolution fasciste fera. […] Encore une fois, le devoir de défendre nos idées, d’exalter le sacrifice de nos martyrs, de rester fidèles à notre mission, nous est sacré. Isolés ou en bloc, les ennemis qui nous attaquent, nous les briserons.
Messieurs, ils faut être pour ou contre nous. Ou fasciste ou antifasciste. Qui n’est pas avec nous est contre nous. La situation politique n’a jamais été plus simple en Italie. […] Nous ne plierons pas. […] Nous avons à faire une Italie grande. Le Fascisme n’a pas d’autre but […]. »
Benito MUSSOLINI, « Discours aux maires des communes d’Italie rassemblés dans Rome le 23 mars 1924 pour le cinquième anniversaire de la fondation des Faisceaux », d’après le Corriere della Sera, 24 mars 1924, rapporté in Pietro GORGOLINI, « La révolution fasciste. Avec les principaux discours de Benito Mussolini ». Préface de Georges VALOIS. Paris, Nouvelle Librairie Nationale, 1924, 198 p.
Loi du 24 décembre 1925
Les pouvoirs de Mussolini
« Il [Mussolini] est nommé par le roi devant lequel il est responsable de l’orientation politique générale du gouvernement ; il est l’incarnation suprême du pouvoir exécutif ; il choisit ses ministres qui sont responsables devant le roi, mais aussi envers sa personne ; il décide du nombre des ministères et peut personnellement assumer la charge de plusieurs portefeuilles ; il fait partie du Conseil de tutelle des membres de la famille royale et exerce les fonctions de chambellan de la Couronne ; les Chambres ne peuvent aborder aucune question sans son accord préalable ; passé un délai de trois mois, il a le droit de représenter un projet de loi précédemment repoussé par l’une des deux chambres ; de même il peut transmettre et soumettre au vote de l’une des Chambres une proposition de loi rejetée par l’autre Chambre. (…) Quiconque attente à la vie, à l’intégrité physique ou à la liberté du chef du gouvernement est passible d’une réclusion dont la durée ne saurait être inférieure à quinze années, et en cas d’un attentat fatal, il est puni de la peine de mort. Quiconque porte offense en actes ou en paroles au chef du gouvernement est puni d’une peine de réclusion de six à trente mois. »
Loi du 24 décembre 1925, in Marseille, J., Histoire 1re, Paris, Nathan, 1997, p. 277.
Philosophie du Fascisme
« La philosophie du fascisme (…) ne croit pas plus à la possibilité d’une paix perpétuelle entre les nations. C’est en ce sens que [le fascisme] rejette le pacifisme bêlant, lâche renoncement à la lutte et au sacrifice. Seule la guerre permet de libérer totalement les énergies humaines et de donner ses lettres de noblesse aux peuples qui ont le courage et les vertus nécessaires pour l’affronter (…).
Le slogan orgueilleux des squadristes : Me ne frego ! (Je m’en fous!), inscrit sur le bandage d’une blessure (…) c’est aussi l’éducation au combat, l’acceptation des risques qu’il comporte : c’est un nouveau style de vie italien (…). Le fascisme affirme l’inégalité irrémédiable et féconde entre les hommes. »
Extraits de l’article « Fascisme » de L’Encyclopedia italiana (1932), rédigé par Mussolini lui-même.
Définition donnée par Mussolini, dans un discours au Sénat (1926).
« Le fascisme repousse dans la démocratie l’absurde mensonge de l’égalité (…) Pour le fasciste, tout est dans l’Etat, rien d’humain n’existe en dehors de l’Etat, ni groupements, ni individus (…) La police doit non seulement être respectée, mais honorée (…) l’homme avant de ressentir le besoin de culture a éprouvé la nécessité de l’ordre. Et en un certain sens, on peut dire que le policier a précédé le professeur.
Autre point du fascisme : la reconnaissance du capital et du capitalisme. Ici nous sommes nettement antisocialistes (…) Les capitalistes modernes sont des capitaines d’industrie, de grands organisateurs (…) Que peuvent demander ces hommes ? Le succès de leur industrie. Ce succès, c’est celui de la Nation.
Le fascisme ne croit ni à la possibilité ni à l’utilité d’une paix perpétuelle )…) La guerre seule porte au maximum de tension toutes les énergies humaines et marque d’un sceau de noblesse les peuples qui ont le courage de l’affronter. »
Extraits de A. Tasca, Naissance du fascisme , Gallimard, 1938.
Citations de Mussolini :
« La Révolution continue (…) Quant aux moyens, nous n’avons pas de préjugés, nous acceptons ceux qui se rendront nécessaires : les moyens légaux et ceux qu’on appelle illégaux. Une période s’ouvre dans l’histoire, qu’on pourrait définir celle de la politique des masses (…) » (1919)
« C’est le sang qui meut les roues sanglantes de l’Histoire » (1919)
« L’éclair de vos poignards et le craquement de vos bombes feront justice de tous les misérables qui voudraient empêcher la marche de la plus grande Italie. » (1918)
« Il faut mettre les Trois (Wilson, Clemenceau et Lloyd George) en présence du fait accompli (…) Le fait accompli, c’est un décret d’annexion en présence duquel les Yougoslaves, même en grinçant des dents, devraient s’incliner. Ils ne peuvent pas faire la guerre à l’Italie. Ils n’ont pas de canons, de mitrailleuses, d’aéroplanes, de munitions (…) l’occasion pour l’Italie est unique. » (1919)
« Le Rassemblement du 23 mars (1919) déclare s’opposer à l’impérialisme des autres peuples au préjudice de l’Italie, et à l’impérialisme de l’Italie au préjudice d’autres peuples. Il accepte le postulat suprême de la Société des Nations, qui suppose la réalisation intégrale de chacune d’elles. En ce qui concerne l’Italie, ce principe doit s’exprimer sur les Alpes et sur l’Adriatique par la revendication de Fiume et de la Dalmatie. »
« Nous qui détestons intimement tous les christianismes, aussi bien celui de Jésus que celui de Marx, nous gardons une extraordinaire sympathie pour cette reprise dans la vie moderne du culte païen de la force et de l’audace (…) » (1919)
« Nous avons déchiré toutes les vérités révélées, craché sur tous les dogmes, repoussé tous les paradis, bafoué tous les charlatans – blancs, rouges, noirs – qui mettent dans le commerce les drogues miraculeuses pour donner le bonheur au genre humain. Nous ne croyons pas aux programmes, aux schèmes, aux saints, aux apôtres ; surtout nous ne croyons pas au bonheur, au salut, à la terre promise (…) Revenons à l’individu. Nous appuyons tout ce qui exalte, amplifie l’individu, lui donne plus de bien-être, de liberté, une plus grande latitude de vie ; nous condamnons tout ce qui déprime, mortifie l’individu. Deux religions se disputent aujourd’hui la domination des esprits et du monde : la noire et la rouge. De deux Vaticans partent aujourd’hui les encycliques : celui de Rome et celui de Moscou. Nous sommes les hérétiques de ces deux religions. » (1920)
« La destinée veut que la Méditerranée nous revienne. La destinée veut que Rome soit à nouveau la ville dirigeant la civilisation dans tout l’Occident européen. Levons le drapeau de l’empire, de notre impérialisme ! » (1920)
« Moi, qui repousse tous les bolchevismes, si j’étais forcé d’en choisir un, je prendrais celui de Moscou et de Lénine, ne fût-ce que parce que ses proportions sont gigantesques, barbares, universelles. » (1921)
« Nous, comme les communistes, nous croyons à la nécessité d’un Etat centralisateur et unitaire, qui soumette chacun à une discipline de fer : avec cette différence qu’ils arrivent à cette conclusion à travers l’idée de classe, et nous à travers celle de nation. » (1921)
« Il n’y a qu’un remède : tapez dur ! Et nous espérons que peu à peu, en pilant les crânes, on dégrisera les cerveaux. » (1921)
« Le fascisme repousse dans la démocratie l’absurde mensonge de l’égalité (…).» (1926)
« Le Fascisme (…) affirme l’inégalité irrémédiable et féconde entre les hommes. » (1932)
Comment expliquer l’ascension de Mussolini ? Une vision pro-fasciste.
« Comment expliquer l’ascension si rapide de et homme qui, depuis cinq années, assure le destin de l’Italie ? Ma curiosité est grande de l’approcher, de le connaître, de lire sur ce visage dont trop de portraits nous livre la passion et l’aspect dominateur. Un Bonaparte apparaît casqué comme Minerve ; il a pour lui son génie militaire, indiscutablement. Celui-là n’a rien de pareil. Orateur, grand journaliste, écrivain, oui sans doute, mais il en est tant d’autres et tout aussi fameux. Il faut pourtant découvrir la cause. Or la cause, je crois bien l’avoir découverte. Il a porté la douleur du peuple italien de la guerre et de l’après-guerre et le peuple italien de la guerre et de l’après-guerre s’est reconnu en lui. Sa révolution est une révolution populaire. Mais le peuple italien, on l’oublie trop souvent, est un vieux peuple politique. Il a une sagesse innée. « Ils se sont tous inscrits au cours de Machiavel, disait assez plaisamment un de nos ambassadeurs, et ils en sont tous sortis premiers ». Ainsi la menace de décomposition bolchéviste a-t-elle été écartée pour laisser place au fascisme qui coordonne, recompose, reconstruit, durement, et peut-être sans laissez assez d’air à une société qui a besoin de respirer pour se mouvoir plus à l’aise, car la construction réclame aussi un peu de liberté. Mais l’aération viendra sans doute plus tard (…).
Le reste est trop récent pour qu’on l’ait oublié et je n’ai voulu rappeler que les origines et les causes de l’ascension au pouvoir. Le reste : le pays menacé d’être submergé par la grande vague bolchéviste, les trains arrêtés, les usines occupées, le gouvernement sans force et sans autorité, puis la formation du fascisme, sa direction prise par Mussolini, l’ordre de marche des 250.000 chemises noires sur les chemins de Rome, le renversement du ministère Facta, le mandat offert à Mussolini par le roi le 29 octobre.
Ce mandat, il l’exerce depuis cinq ans, il l’exerce seul. Il a imposé l’obéissance au Parlement qu’il méprise et il a proposé, comme idéal, cette vertu d’obéissance au peuple qu’il aime. Cependant il a besogné comme un bûcheron dans une forêt. Ou plutôt il a fait le contraire du bûcheron : il a planté au lieu d’abattre. Lois pour la défense de l’Etat, loi pour la protection physique et morale de la race, loi contre la franc-maçonnerie, institution du podestat, organisation du gouvernement de Rome, autorité élargie et responsabilité des préfets, politique d’assainissement financier qui a permis le redressement de la lire, puis sa stabilisation, oeuvre nationale des loisirs ouvriers et protection sociale des travailleurs : le gouvernement fasciste a accompli un prodigieux effort pour donner au pays une charte de travail, en même temps qu’une charte de sécurité qui lui permettent de se guérir des plaies laissées par la guerre. Le résultat éclate aux yeux. Toute la question est de savoir s’il durera. Or Mussolini veut qu’il dure (…). »
extraits d’un article d’Henry Bordeaux paru dans L’ Illustration du 14 janvier 1928
Extrait d’un discours de Mussolini (août 1934) :
« Ce n’est pas demain qu’il faut être prêts à faire la guerre, c’est aujourd’hui.
Nous devenons et nous deviendrons de plus en plus – parce que nous le voulons – une nation militaire. Comme nous n’avons pas peur des mots, nous ajouterons : militariste et pour compléter: guerrière, c’est-à-dire toujours mieux dotée des vertus de l’obéissance, du sacrifice et du don de soi-même à la Patrie. Cela signifie que toute la vie de la Nation, politique, économique et intellectuelle doit être dirigée vers les besoins de notre armée. On a défini la guerre la Cour de cassation [=tribunal] des peuples. Et, puisque les peuples ne se cristallisent pas, mais suivent la pente de leur puissance et de leur dynamisme historique, il s’ensuit qu’en dépit de toutes les conférences, de tous les protocoles et de toutes les plus ou moins pieuses et bonnes intentions, on peut prévoir que le fait guerre, de même qu’il a existé à l’origine de l’humanité, en restera inséparable encore dans les siècles à venir. »
L’IDÉOLOGIE FASCISTE
« Comme toute théorie politique solide, le fascisme est praxis et pensée. On ne comprendrait pas le fascisme dans beaucoup de ses manifestations pratiques comme parti organisé, comme système éducatif, comme discipline, si l’on ne l’envisageait pas à la lumière de sa conception générale de la vie.
Conception spiritualiste : Le monde, pour le fascisme n’est pas le monde matériel où l’homme est un individu coupé de ses semblables, disposant de lui-même, gouverné par une loi naturelle qui, instinctivement, lui inspire une vie de plaisir égoïste et fugitif. L’homme du fascisme est un individu qui est nation et patrie (…), existence où l’individu, par l’abnégation, le sacrifice des intérêts particuliers, par la mort même, réalise cette forme d’existence toute spiritualisée où réside sa pleine valeur d’homme.
Conception spiritualiste, donc issue elle-même de la réaction générale de notre siècle contre le positivisme flottant et matérialiste du XVIIIème siècle.
Le fascisme veut l’homme actif, engagé dans l’action de toutes ses énergies : il le veut virilement conscient des difficultés et prêt à les affronter. Il conçoit l’existence comme une lutte, convaincu qu’il appartient à l’homme de se conquérir une vie véritablement digne de lui en créant en lui-même d’abord les instruments (physiques, moraux et intellectuels) nécessaires à cette édification (…)
D’où la valeur suprême de la culture sous toutes ses formes (art, religion, sciences) et l’importance primordiale de l’éduction.
Le fascisme est une conception historique selon laquelle l’homme n’est ce qu’il est que dans l’exacte mesure du processus spirituel auquel il concourt dans le cadre du groupe familial et social, dans celui de la nation et de l’histoire que contribuent à forger tous les peuples.
D’où la grande valeur de la tradition dans les mémoires, dans la langue, dans le costume, dans les normes qui règlent le mode de vie social. Hors de l’histoire, l’homme n’est rien. C’est pourquoi le fascisme s’oppose à toutes les abstractions individualistes à fondement matérialiste type XVIIIème siècle.
Conception de l’Etat : Anti-individualiste, le fascisme est pour l’Etat. Il s’oppose au libéralisme classique (…).
Le libéralisme niait l’Etat au profit de l’individu ; le fascisme réaffirme l’Etat comme la vraie réalité de l’individu. Le fascisme est pour l’unique liberté sérieusement définie : la liberté de l’Etat et de l’individu dans l’Etat.
Car pour le fasciste tout est dans l’Etat et rien d’humain, rien de spirituel n’existe et n’a tant soit peu de valeur en dehors de l’Etat. En ce sens, le fascisme est totalitaire et l’Etat fasciste, synthèse et unité de toute valeur, interprète, développe et dynamise toute l’existence du peuple.
En dehors de l’Etat, pas d’individu, pas de groupes (partis politiques, associations, syndicats, classes). C’est pourquoi le fascisme s’oppose au socialisme qui durcit le mouvement historique de la lutte des classes et ignore l’unité de l’Etat qui fond les classes sociales dans une seule réalité économique et morale. Et de manière analogue, il s’oppose au syndicalisme de classes (…). Les individus constituent des classes selon leurs intérêts ; ils constituent des syndicats selon les convergences d’intérêts au sein de leurs différentes activités économiques.
Les individus sont d’abord et avant tout l’Etat. L’Etat n’est pas nombre, comme une somme d’individus formant la majorité du peuple. C’est pourquoi le fascisme est contre la démocratie, car celle-ci rabaisse le peuple au niveau du plus grand nombre ; mais il est la forme la plus pure de la démocratie puisque le peuple est conçu, comme il doit l’être, qualitativement et non quantitativement, comme l’idée la plus puissante parce que plus morale, plus vraie, plus cohérente, parce que dans le peuple s’effectue la conscience et la volonté de quelques-uns, même d’un seul, et que cet idéal tend à s’effectuer dans la conscience et la volonté de tous.
Le fascisme n’est pas seulement le créateur des lois et le fondement des institutions. Il est aussi l’éducateur et le promoteur de la vie spirituelle. Il peut renouveler non pas les formes extérieures de la vie humaine, mais son essence même. Et dans ce dessein, il exige une discipline, une autorité dominant les esprits pour y régner sans conteste.»
Benito Mussolini, art. « fascisme », in Enciclopedia italiana, t. XIV, 1934.
La Rome antique, le Fascisme et la colonisation
Le 14 février 1926, le ministre des Colonies, Di Scale, prononce un discours devant la SAI (Société Africaine Italienne) :
(…) L’Italie fasciste cherche les vestiges de ses grands ancêtres pour créer son gouvernement futur. Elle les retrouve partout sur la terre d’Afrique parce que là comme à Rome, elle peut se sentir seule parmi les nations l’héritière légitime. Le peuple qui a établi le droit colonial et la politique coloniale fut le peuple romain(…)
(…) Nous sommes allés à Djarboub (1) non pas pour abolir une foi religieuse ni pour comprimer une conscience traditionnelle, mais parce que nos intérêts et notre honneur l’exigeaient. Il fallait faire respecter le pacte international, il était nécessaire de fermer une frontière ouverte à la contrebande. Notre action a eu un résultat : elle a réprimé une rébellion tenace qui empêchait la renaissance économique et administrative d’une région qui avait eu un glorieux passé de prospérité et de beauté.
En réalité, nous n’avons pas voulu que nos armées pénétrassent avec des menaces de conquête, mais nous avons fait précéder nos valeureuses troupes de proclamations de clémence, d’édits de liberté pour la foi et le culte. Djarboub semblait un mythe pour les peureux : aujourd’hui c’est une réalité pour les Italiens. Ainsi faisait la Rome d’autrefois, ainsi fait la Rome d’aujourd’hui, ainsi fera la Rome de l’avenir, qui sera la lumière de toute civilisation et maîtresse de la société civile.
C’est encore avec la même volonté que le gouvernement national a projeté d’occuper la Somalie septentrionale (2) : les sultanats d’Obbia et de Migiurifini. Il n’était plus possible qu’un État protecteur jaloux de sa dignité puisse accepter d’être protégé par ses protégés. Il était absurde de concevoir cette situation humiliante avec la conscience fasciste de l’Italie nouvelle. Nous avons donc occupé la Somalie septentrionale pour imposer le désarmement et le respect de notre drapeau et pour empêcher que des sultans barbares puissent parler d’égal à égal avec les fonctionnaires du gouvernement italien ou, pis encore, qu’ils puissent oublier qu’ils sont d’humbles protégés et discuter avec des gouvernements étrangers de responsabilités qui incombent uniquement à qui représente le gouvernement italien (…).
1. et 2. Sur ces deux épisodes coloniaux, voyez E. Colin, Les Italiens en Afrique (Somalie et Cyrénaïque), 1926, p. 477
Comparaison entre régimes totalitaires
« Si pour Franz Neumann, par exemple, l’Italie fasciste fut un régime totalitaire peu différent de ses homologues nazi et stalinien, le politologue italien Fisichella considère qu’il resta toujours un «totalitarisme manqué», et Hannah Arendt elle-même conclut que, jusqu’en 1938, le régime mussolinien fut essentiellement «une banale dictature nationaliste». »
Extrait de Pierre Milza, « Questions sur le fascisme italien », in L’Histoire no 235, septembre 1999, p. 47.
Remarque : en 1938, Mussolini introduisit des lois antisémites en Italie.
Mais il y a eu auparavant des lois raciales concernant l’Ethiopie dès 1937, qui interdisait le concubinage et le mariage entre Italiens avec les « sujets des colonies africaines »
« Il est temps que les Italiens se proclament franchement racistes. Toute l’œuvre que jusqu’à présent a fait le régime en Italie est au fond le racisme. Dans les discours du Chef, la référence aux concepts de la race a toujours été très fréquente. La question du racisme en Italie doit être traitée d’un point de vue purement biologique sans intentions philosophiques ou religieuses. »
De « la défense de la race » (La difesa della razza), dirigée par Telesio Interlandi, année I, numéro 1, 5 août 1938, page 2
Le comte Carlo Sforza, libéral italien, en exil en France, donne sa vision des dictatures totalitaires dans un ouvrage paru en 1931.
« Ce ne fut qu’après la guerre que les dictatures envahirent l’Europe : des dictatures qui différaient par les origines et les buts, réels ou vantés ; mais ayant toutes en commun la nécessité d’imposer le despotisme le plus absolu sur toutes les formes de la vie nationale (…)
Quatre ans de guerre apprirent aux survivants – ou du moins à beaucoup d’entre eux – que la violence était un devoir même dans le camp moral : que l’obéissance la plus aveugle était une vertu nationale, même dans les matières de l’esprit. La discipline militaire, passive et immédiate, ne fut qu’un jeu en comparaison de la soumission, brutale et ivre en même temps, que l’on exigea vis-à-vis des théories les plus fausses et les plus artificielles, qui sévirent dans tous les pays belligérants et que le patriotisme sacra comme vérités d’évangile (…) »
« Lorsque les dictateurs font appel aux passions populaires, c’est presque toujours aux passions les plus dangereuses qu’ils s’adressent ; ne fût-ce que parce qu’ils se trouvent obligés de réveiller des sentiments de guerre, de nationalisme déchaîné. En effet, les dictatures ne peuvent durer et prospérer que dans une atmosphère de guerre : et, si leur politique étrangère reste, ou semble, pacifique, c’est seulement parce qu’elles se sentent liées par une atmosphère internationale qu’elles ne sont pas assez fortes ou assez audacieuses pour défier (« provoquer »). Mais qu’une fissure se forme, et toute dictature se mettra à espérer que le jeu sanglant approche à nouveau. »
Extraits du comte Carlo Sforza, « Dictateurs et dictatures de l’après-guerre », Paris, Gallimard, 1931.
Les réalisations de Mussolini
Dans un chapitre intitulé « Il bel fascismo », l’écrivain – antifasciste – Zangrandi explique comment le régime a pu, un instant, séduire les jeunes gens de sa génération.
« A la fin de 1932, le fascisme célébra le dixième anniversaire de la révolution. Ce ne furent alors que divertissements, défilés, réjouissances de toutes sortes, et quiconque approchait de la quinzième année était vraiment persuadé qu’il s’agissait là d’un grand événement national, consacrant l’unité et la concorde.
Au cours de ces festivités, Mussolini prit la décision d’accorder une amnistie politique et l’on apprit au début de novembre que le nombre des condamnés pour antifascisme retenus en prison ne dépassait pas 337. Les jeunes, n’ayant aucune raison de mettre en doute l’exactitude de ces chiffres (d’ailleurs admis par les historiens d’aujourd’hui), crurent qu’à cela seul se bornait l’opposition au régime.
Ils ne savaient rien, ou presque, des émigrés, des exilés sur le sol même de la patrie. (…)
Avec ce dixième anniversaire, la « révolution » était entrée dans la phase des « réalisations ».
Depuis longtemps déjà, une campagne avait été entreprise pour la « bataille du grain », mais , entre les années 1931 et 1935, grâce à l’intervention enthousiaste du haut et du bas clergé, jamais le dernier lorsqu’il s’agit de récompenses, grâce aux engrais de la « Montecatini » que l’on commençait à employer sur une grande échelle ( « Avec la calciocyanamide – le paysan ne s’en fait plus », disait un slogan partout répandu (…) ), grâce enfin à la sueur de nos paysans, on atteignit une production de 73 millions de quintaux par an, réalisant un record de 81 millions en 1934 et une moyenne de 16 quintaux par hectare.
Une autre bataille était livrée, et qui ne suscitait pas moins d’enthousiasme : celle qui avait pour objectif la récupération des terres marécageuses. L’offensive était déclenchée dans la basse Piave, dans la Maremme et en Sardaigne. Mais ce qui, plus que tout, passionnait le public, frappait les visiteurs étrangers, attendrissait légitimement les poètes, ce fut le dessèchement des marais Pontins.
En 1932 et 1933, entre les montagnes et la mer, là où sévissaient jadis la misère et la malaria, deux villes nouvelles sortirent de terre : Littoria et Sabaudia. (…)
En novembre 1933, Mussolini, parlant devant le Conseil des Corporations de la crise économique mondiale, faisait en ces termes le procès du capitalisme américain qui en avait été la cause : « Cette crise ne se situe pas à l’intérieur du système en question, elle en est bien plutôt et plus exactement la conséquence : aussi pouvons-nous conclure qu’un tel mode de production est aujourd’hui dépassé. »
Cela dit, il entendait démontrer, chiffres en mains, que l’Italie n’était pas un pays capitaliste, pour cette raison que, face à un demi-million environ de capitalistes, s’y entassait par millions une foule de travailleurs méthodiquement classés en catégories, à l’exception de celle, bien à part, dont les statistiques qualifiaient la condition de « non-professionnelle ». Au dire de Mussolini, c’étaient des « débrouillards », mais nous avons aujourd’hui toutes raisons de penser qu’il s’agissait de désoeuvrés. (…)
Précisons d’autre part, et non seulement à titre rétrospectif, que si l’adhésion des jeunes au programme social du fascisme avait pour origine l’ignorance, était le fruit d’équivoques et de mensonges maintes fois répétés, on n’en saurait dire autant de la position qui fut adoptée au moins par une grande partie d’entre eux à l’égard de certains aspects de la démocratie.
Ici, la convergence des opinions était réelle : la propagande fasciste contre la paperasse administrative, l’impuissance du parlementarisme, la décrépitude du régime démocratico-libéral rencontraient un terrain favorable. Les jeunes n’avaient pas trop de sympathie pour ces formes politiques, vieilles conquêtes datant d’un ou deux siècles, et désormais dépassées par des conceptions mieux adaptées aux temps modernes.
Aussi bien l’abolition des partis (et non pas de la liberté), la création d’un Etat totalitaire (et non pas autoritaire), la substitution d’une « Chambre corporative » au parlement traditionnel étaient loin – d’une façon générale, je le répète – de leur faire horreur ; elles satisfaisaient au contraire leur désaffection à l’égard de certains mythes conventionnels et périmés et leur désir d’intégrer tous les problèmes de la société moderne en un système aussi unitaire, dynamique et efficace que possible. »
Ruggero Zangrandi, Le long voyage à travers le fascisme, trad. de H. et M.-M. Le Breton-Grandmaison, Paris, Laffont, 1963, pp. 42-45, 50.
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