UNE FEUILLE DE COMMERCE MARITIME EN 1762

Le document qui suit est une reproduction intégrale d’une feuille de commerce, appelé « Le Négociant », et datée du lundi 22 mars 1762. A la fin apparaît cette note :

« Cette feuille paroîtra tous les lundis, et ne coûte que neuf livres pour l’année entière, rendue franche de port, tant à Paris que dans les provinces. On y inserera gratis tous les avis concernant le commerce, mais on avertit qu’on n’en emploiera aucun qui ne soit signé, excepté ceux qui seroient déjà autorisés par l’impression. On prie les négocians ou particuliers qui desireroient se faire annoncer, d’affranchir leurs lettres. Le bureau général est à Paris rue du Jour, vis-à-vis le grand portail de Saint Eustache « .
Du Havre. Cargaisons de quatre navires, la Sainte Claire, capitaine Simon Rair, venant de Cadix; le Saint François Xavier, capitaine Antonio Rodrigues, venant de Lisbonne; la Demoiselle Elisabeth, capitaine Knaap, venant d’Alicante; le Radezel, capitaine Thilles, venant du Port Maurice, consistant en 8503 cuirs, 303 bottes et 66 demi-bottes d’huile d’olive, 10 sacs de caffé, 47 balles de laines, 84 caisses de sucre, 856 balles de soude, et le reste de vin, cotton, bois de campêche et de marquetterie, olives, cacao, quinquina, indigo, figues, barbes de baleine, bois de brésil, anis, réglisse, rozeaux, et autres marchandises.
Ces quatres navires doivent arriver du Havre à Rouen sur la fin de Mars.

Prise angloise à vendre. Le jeudi premier du mois d’avril 1762, à neuf heures du matin et jours suivans, il sera procédé pardevant Mrs les officiers de l’Amirauté du Havre, à la vente, au plus offrant et dernier enchérisseur, des marchandises ci-après, provenant du chargement de la prise angloise l’Anglesey, capitaine Thomas No lan, venant de Bristol, faite en mer par le corsaire l’Augustin, commandé par le sieur Augustin le Comte, ainsi qu’à la vente du navire, qui suivra immédiatement celle des marchandises; sçavoir, la plus grande partie en barres de Fer, quincailleries, fil-de-fer, plaques de cheminées, poëles, chaudieres, marteaux et autres ustenciles de fer. 7 barrils de Brai (mélange de gomme, de résine et de poix dont on se sert pour le calefat des bâtimens de mer) sec et gras. 13000 environ de bouteilles et demi-bouteilles de verre. 1 grenier de charbon de terre d’environ 100 barrils. 45 fromages de chester. 2 barriques et 1 barril de vins de liqueurs. 1 boucaut et 1 panier de sucre en pain. Plusieurs barrils de teinture apprêtée.
160 buches de bois de teinture. Plusieurs paniers de verreries, comme verres à vin, à liqueur, gobelets, moutardiers, fioles, petites lampes, etc. Il sera ensuite procédé à la vente dudit navire avec tous ses agrès, le tout en tel état que se trouveront les marchandises, navire, agrès et ustenciles lors de la livraison, sans aucune garantie ni répétition contre les vendeurs, et aux clauses et conditions qui seront expliquées lors de la vente.

De Rouen. Le navire les Amis, capitaine Simon Grenier, armé à Cherbourg pour le compte de divers négocians de Rouen, est parti dudit port le 26 février dernier pour le Cap François, côte de Saint Domingue, avec une cargaison de marchandises propres pour les colonies. Comme ce navire est très-bon voilier, il y a tout lieu d’espérer que par la supériorité de sa marche, et l’expérience du capitaine, il échappera aux ennemis. Ceux qui voudront s’intéresser à cet armement pour une somme de 500 livres plus ou moins, pourront s’adresser à Rouen au Sieur Laurens Dumesnil, imprimeur-libraire rue de l’écureuil.

Il y a actuellement en charge au port de Rouen pour Amsterdam le navire le Fidelle Serviteur, capitaine Pieter Yssen, hollandois, et le navire la Bonne Paix, pour Hambourg, capitaine Pieter Ruyman, hollandois. Le premier partira vers la fin de Mars au plûtard, et l’autre vers le commencement d’avril.

Il est arrivé au même port de Rouen cinq navires hollandois, dont un venant de la Rochelle, chargé d’eau-de-vie, et un autre venant de Gothenbourg, chargé de harangs.

De Nantes. Cours des marchandises à Nantes au 13 mars :

|Indigo cuivré de Saint Domingue |7 livres 10 sols la livre |
|Indigo mélangé |8 livres la livre |
|Indigot violet pur |8 livres 10 sols la livre |
|Indigo mêlé de bleu et violet |9 livres |
|Indigo bleu pur |10 livres |
|Cochenille |20 à 22 livres |
|Cacao goyaquille |1 livre 13 sols |
|Caffé de moka |2 livres 12 sols |
|Caffé de Bourbon |18 sols |
|Caffé de la Martinique |1 livre 3 sols |
|Caffé de Saint Domingue |17 sols |
|Thé bouy |3 livres 2 sols |
|Poivre |1 livre 3 sols |
|Canelle |12 livres 5 sols |
|Gérofle |10 livres 10 sols |
|Muscade |9 livres 5 sols |
|Coton filé des Indes |4 livres 15 sols |
|Jus de réglisse |57 livres 10 sols le ÷ |
|Capêche en buches |27 livres le ÷ |
|Fernambouc |61 livres le ÷ |
|Huile de Laurier |100 à 110 livres le ÷ |
|Cotton de Saint Domingue |190 à 200 livres le 1 ÷ |
|Chanvres |21 à 27 livres le 1 ÷ |
|Huile de poisson |190 à 220 livres les 30 veltes |
|Huile d’olive fine |64 livres le ÷ |
|Vin de Malaga |68 livres le baril de 36 pots |
|Vin de Xerès |90 livres le baril de 36 pots |
|Vin tinte de Rota |140 livres le baril de 36 pots |

Cours des assurances à Nantes le 13 mars

|Saint Domingue, La Martinique, Guinée |sur navires françois 40 à 45 livres pour ÷ suivant la force des navires |
|Bordeaux sur chassemarées |6 pour ÷ et sur navires neutres 3 pour ÷ |
|Saint Sebastien, Bilbao, Lisbonne |sur navires espagnols 18 pour ÷, sur neutres 3 pour ÷, avec la clause d’augmentation de prime en cas d’hostilité, au cours de la place, et 5 pour ÷ à tous risques |
|Cadix |sur navires neutres 4 pour ÷ avec ladite clause, et 8 à 10 pour ÷ à tous risques |
|Marseille |sur neutres à 4 pour ÷ avec ladite clause |
|L’Orient |sur chassemarées, 5 pour ÷ |
|Brest |sur chassemarées 8 pour ÷ |
|Ostende |sur hollandois, 2 pour ÷ |
|Amsterdam |sur hollandois 2 et demi pour ÷ |
|Hambourg |sur hollandois, 3 pour ÷ |

Navires en armement à Nantes. Les deux frégates du Roi la Folle et l’Etourdie, pour Saint Domingue et delà au Misissipi.
Le navire hollandois le Jeune Henry, capitaine Jn-Jautz Breet pour Bilbao. A l’Orient, le navire la Bonite, capitaine Dabadie, pour Saint Domingue.

Prix du fret à Nantes :

|Pour Saint Domingue |300 à 350 livres du tonneau (le tonneau doit peser, suivant l’Ordonnance de 1681, deux mille livres poids de marc) |
|Pour Bilbao |30 à 40 livres du tonneau |
|Pour Marseille |65 à 80 livres du tonneau |

Cours des Changes :

|Amsterdam |53 deniers 5/8 à 6/4 |
|Anvers |56 deniers 3/8 |
|Londres |30 deniers 3/4 |
|Hambourg |185 deniers 1/2 |
|Paris |à usance au pair |

De Paris. Du mercredi 10 mars : prix des grains à la Halle :

|Bled |15 livres 10 sols et 13 livres 15 sols le septier: quelques uns ont vendu 13 livres 10 sols et 12 livres le septier |
|Seigle |7 livres 10 sols et 7 livres le septier |
|Orge |7 livres et 6 livres 10 sols le septier |
|Avoine |14 livres 15 sols et 12 livres 10 sols le septier |

Menues grains :

|Lentilles | 22 livres à 11 livres le septier |
|Pois verds |28 livres à 10 livres le septier |
|Feverolles |10 livres à 9 livres le septier |
|Navette |23 livres à 18 livres le septier |
|Chennevis |18 livres à 17 livres le septier |
|Fèves Suisses |25 livres à 22 livres le septier |
|Haricots |26 livres à 11 livres le septier, ronds 18 livres à 17 livres, blancs 15 livres, gris 9 livres 10 sols à 9 livres |
|Vesce |10 à 9 livres le septier |
|Millet |19 à 15 livres le septier |
|Sarazin |8 livres le septier |
|Le Sainfoin |9 livres 10 sols le septier |

Du samedi 13 mars :

|Bled |15 livres 10 sols et 14 livres 10 sols le septier. Quelques-uns ont vendu à 12 livres |
|Seigle |7 livres 5 sols à 6 livres le septier |
|Orge |7 livres à 6 livres 10 sols le septier |
|Avoine |15 livres à 12 livres 10 sols le septier |

Menues grains :

|Lentilles |22 livres à 12 livres le septier. A la Reine 15 livres le septier |
|Pois verds |28 livres à 9 livres le septier |
|Feverolles |10 livres à 9 livres le septier |
|Navette |23 livres le septier |
|Chennevis |18 livres 10 sols à 17 livres le septier |
|Fèves Suisses |24 livres à 21 livres le septier |
|Haricots |25 livres à 16 livres le septier, ronds 17 livres le septier, blancs 16 livres à 20 livres, gris 10 livres à 9 livres 10 sols |
|Vesce |11 livres à 9 livres le septier |
|Millet |16 à 15 livres le septier |
|Sarazin |8 livres 10 sols à 6 livres 10 sols le septier |
|Le Sainfoin |10 livres le septier |

Prix des grains vendus sur le port de la Grêve du 8 au 13 dudit
– Blé depuis 15 livres 10 sols jusqu’à 15 livres le septier
– Orge 7 livres à 6 livres le septier
– Vesce depuis 12 livres à 11 livres le septier
– Avoine 13 livres le septier
– Avoine en banne 12 livres à 11 livres 10 sols le septier
– La paille de froment s’est vendue à la Porte Saint Martin 11 livres 10 sols le cent.
– Les foins à la porte Saint Michel 34 et 30 livres le cent.
– Les foins sur les ports, même prix que la semaine dernière.
– Les beurres d’Isigni se sont vendus à la Halle Mercredi 17 du courant 16 à 14 sols la livre.
– Les beurres de Gournai, du jeudi 18 mars, 18 sols la livre.
– Les oeufs de Longjumeau dudit jour 34 livres le millier.
– Les oeufs de Gournai 34 livres le millier.
– Les oeufs Picards et d’Arras, 33 livres le millier.
– Les beurres en livre de Gatinois, 11 et 9 sols la livre.

Vins de Malaga à vendre en cercles et en bouteilles, de 1753 et 1754, provenant de la prise du navire « l’aimable Susanne », allant de Malaga à Londres à 750 livres la pipe (la pipe contient environ 520 pintes de Paris) et à 35 sols la bouteille en bouteille de Séve. On s’adressera à M. Manceau, négociant, rue de la Verrerie.

M. Duhaut marchand fayancier, rue Comtesse d’Artois, au Chariot d’argent, tient magazin assorti de verrerie et de cristaux gravés, taillés et dorés, tant de France que d’Allemagne. On trouve dans le même magazin, des verres en table, blancs, épais et minces pour équipages, vitrages et estampes; du verre à vitre d’Alsace de toutegrandeur, ainsi qu’un assortiment de Fayance d’Allemagne et de France.

Le nommé Vorle Rouard; demeurant à Bar-sur-Aube, actuellement à Paris, a découvert un terrein qu’il assure être très-propre à la culture de la Garence, et qui en produit naturellement. Ce terrein d’environ six lieues d’étendue, est situé sur les rives de Seine et d’Aube, entre les villages de Mery-sur-Seine, Saint-Oulphe, Cléle, Longueville, Charny, etc.; ledit Rouard, offre de fournir des oeilletons ou marcottes de cette plante: on en trouvera chez M. Royer, marchand épicier, faubourg Saint Martin, au Jardin des Plantes, où l’on donnera la façon de la cultiver. On vend à la même adresse des racines de Gentianne.

Le sieur Hochet prend le fonds de M. Paquet, marchand épicier, faubourg Saint Honoré près la place de Louis XV.

Prix d’un train de voiture sortant de chez le charron et le maréchal.

|Le train en blanc avec ses 4 roues |190 à 200 livres |
|sculpture ordinaire |50 livres |
|80 livres de fer applati Berri, pour mettre sur les brancards à 20 livres le ÷ |16 livres |
|200 livres de fer applati Berri pour mettre sur les roues, à 20 livres le ÷ | 40 livres |
|Il faut pour garnir les roues 200 clous à bande , au compte |6 livres |
|Façon du maréchal grossier pour ferrer le train et les roues |180 livres |
|Total |492 livres |

Etiage de la rivière. Du jeudi 18 mars, la rivière est à 8 pieds 9 pouces au-dessus des plus basses eaux, suivant la mesure prise au pont de la Tournelle. Elle étoit la veille à 8 pieds.

Source : Archives Départementales de l’Hérault, C 2949: « Le Négociant, feuille du commerce », numéro II du lundi 22 mars 1762. De l’imprimerie de Knapen, Pont Saint Michel, 1762.
Auteur : Jean-Claude TOUREILLE jctou@arisitum.org