Fondation de la RFA (République fédérale d’Allemagne, l’Allemagne de l’ouest)

« art. 1 : La République fédérale exercera la pleine autorité d’un Etat souverain sur ses affaires intérieures et extérieures.

art. 2 : En raison de la situation internationale qui a, jusqu’à ce jour, empêché la réunification de l’Allemagne et la conclusion d’un règlement de paix, les trois puissances se réservent les droits et les responsabilités antérieurement exercés ou détenus par elles en ce qui concerne Berlin et l’Allemagne dans son ensemble, y compris la réunification de l’Allemagne et un règlement de paix (…). »

Extraits des accords de Paris, 1949.

ultimatum de Khrouchtchev

Adresse du président Khrouchtchev aux puissances occidentales pour qu’elles règlent directement avec la République démocratique allemande les questions concernant Berlin (Moscou, 10 novembre 1958)

« Les impérialistes ont transformé la question allemande en une source constante de tension internationale. Les cercles dirigeants de l’Allemagne Occidentale font tout pour exciter les passions militaires contre la République démocratique allemande, contre la République populaire de Pologne, contre tous les pays socialistes. Les discours du Chancelier Adenauer et du Ministre de la Défense Nationale Strauss, l’armement nucléaire de la Bundeswehr et d’autres questions militaires expriment tous la tendance définie par la politique des cercles dirigeants de l’Allemagne Occidentale.

Nous voulons avertir les leaders de la République fédérale d’Allemagne : la route suivie par l’Allemagne Occidentale aujourd’hui est une route dangereuse pour la paix en Europe et fatale pour l’Allemagne Occidentale elle-même. En effet, les politiciens peuvent-ils réellement espérer le succès d’une «marche vers l’Est» ? Hitler, en son temps, a aussi tout fait pour répandre l’hystérie de la guerre, pour préparer les bases d’une attaque contre l’Union soviétique. Cependant, tout le monde sait comment cela a fini. Il n’est pas dur d’imaginer le destin de ceux qui essayeraient de lancer une nouvelle agression contre les États socialistes. Aucun discours du Chancelier Adenauer ou de son Ministre Strauss ne peut changer l’équilibre des forces en faveur de l’impérialisme. Marcher contre l’Est serait marcher au pas vers la mort pour l’Allemagne Occidentale.

Il est grand temps de se rendre compte que l’époque où les impérialistes pouvaient agir en «position de force» est révolue à jamais et que même s’ils l’essaient, ils ne pourront changer l’équilibre des forces en leur faveur. Il ne faut pas oublier que la position géographique de l’Allemagne occidentale fait – avec les moyens militaires actuels – qu’elle ne survivrait pas à un jour de guerre moderne. Nous ne voulons pas d’un autre conflit militaire. Ce serait fatal à l’Allemagne de l’Ouest et apporterait des désastres indicibles aux peuples d’autres pays. L’Union soviétique et les autres pays socialistes font tout pour préserver d’un aventurisme rêvant de nouvelles guerres menant à une étape fatale. Les décideurs de la politique ouest-allemande feraient bien de considérer plus sobrement la situation existante et de renoncer à déchaîner les passions militaires.

La presse occidentale dit souvent, aujourd’hui, que le gouvernement de la République fédérale d’Allemagne projette de proposer à l’Union soviétique, aux États-Unis d’Amérique, à la Grande-Bretagne et à la France une nouvelle réunion des quatre puissances pour statuer, pour les Allemands et sans les Allemands, sur la question de l’unification de leur pays. Mais ceci n’est rien qu’une suite de la vieille politique, peu réaliste, contraire au bon sens et exempte de justification légale. Aucun pouvoir n’a le droit de s’immiscer dans les affaires internes de la République démocratique allemande et d’y dicter sa volonté.

Nous comprenons tout à fait que les Allemands se languissent de la restauration de leur unité nationale. Mais des militaristes allemands et leurs patrons américains utilisent des sentiments nationaux sincères pour des buts qui n’ont rien à faire avec la réunification de l’Allemagne ou avec l’assurance d’une paix durable en Europe. Les cercles militaristes de l’Allemagne Occidentale cherchent en fait à étendre la division du pays et à préparer des aventures militaires. Si le gouvernement allemand de l’ouest avait vraiment voulu la réunification, il aurait suivi la seule voie qui y mène en établissant des contacts avec le gouvernement de la République démocratique allemande, en ouvrant la voie à des accords qui conviendrait tant à République démocratique allemande qu’à la République fédérale d’Allemagne.

La question allemande, dans le sens de la réunification des deux États allemands maintenant déjà existants, peut être seulement réglée par les Allemands eux-mêmes, par un rapprochement entre ces États. La conclusion d’un traité de paix avec l’Allemagne est une question entièrement différente qui, en effet, devrait être réglée principalement par les quatre puissances qui ont formé la coalition anti-Hitler, avec la coopération des représentants de l’Allemagne. La signature d’un traité de paix avec l’Allemagne aiderait à normaliser la situation entière en Allemagne et en Europe en général. L’Union soviétique a proposé et propose que cette mesure doive être abordée sans retard.

Si l’on devait parler des engagements des quatre puissances en ce qui concerne l’Allemagne, il faudrait parler des engagements des accords de Potsdam. Laissez-nous vous rappeler ce qu’étaient les principaux engagements que les parties avaient assumés à Potsdam en ce qui concerne leur politique en Allemagne, ce qu’était la voie que Potsdam avait indiquée pour le développement de l’Allemagne.

À ce moment-là, les membres de la coalition anti-Hitler ont assumé des engagements nets et précis : extirper le militarisme allemand, empêcher sa réapparition une fois pour toutes, faire tout pour empêcher l’Allemagne à jamais de menacer à nouveau ses voisins ou la paix mondiale.

Les parties prenantes aux accords de Potsdam ont aussi trouvé nécessaire de mettre fin au fascisme allemand, de bloquer sa reprise en Allemagne, de restreindre toutes les activités et propagande fascistes.

Un autre point important des accords de Potsdam était l’engagement de liquider le pouvoir des cartels, des ententes et autres monopoles dans l’économie allemande, des forces, en somme, qui avaient amené Hitler au pouvoir et avaient encouragé et financé ses enjeux militaires. Telle était la substance des accords conclus à Potsdam en 1945.

Et qu’avons-nous aujourd’hui, plus de 13 ans après la Conférence de Potsdam ? Personne ne peut nier que l’Union soviétique a, pour sa part, scrupuleusement observé ces accords et qu’ils ont été appliqués complètement dans la partie orientale de l’Allemagne, la République démocratique allemande. Laissez-nous voir ce qu’il en est des accords de Potsdam dans la partie occidentale de l’Allemagne, en République fédérale d’Allemagne, dont la responsabilité de leur application incombe aux trois puissances occidentales – les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France.

ll devrait être dit ouvertement que le militarisme, loin d’avoir été supprimé, dresse sa tête plus haut que jamais en Allemagne Occidentale. Les puissances qui auraient dû se battre contre la réapparition de militarisme allemand ont attiré l’Allemagne Occidentale dans le bloc militaire agressif, l’OTAN, qu’ils ont créé. Ils font tout pour promouvoir la croissance du militarisme allemand et l’établissement en Allemagne Occidentale d’une armée numériquement importante et équipée du matériel militaire le plus récent.

Par décision du gouvernement de la République fédérale d’Allemagne, et naturellement avec l’approbation des puissances de l’OTAN, l’Allemagne Occidentale développe une armée que les militaristes allemands prévoient comme plus forte que les armées de Grande-Bretagne et de France. Il est possible qu’elle soit déjà plus forte que l’armée française, considérant qu’une partie substantielle de celle-ci est stationnée à l’extérieur du pays, dans les colonies, où le mouvement de libération contre les colonialistes français est en ébullition.

Les forces armées qui sont recréées en Allemagne Occidentale sont à nouveau dirigées par des généraux et des amiraux nazis. L’armée allemande de l’ouest est formée dans l’esprit des aspirations prédatrices de la Wehrmacht nazie, dans un esprit de vengeance et de haine envers l’Union soviétique et d’autres états pacifiques.

De plus, les militaristes allemands – avec la bénédiction des puissances occidentales et principalement les États-Unis – reçoivent des armes nucléaires. La République fédérale a déjà des fusées américaines qui peuvent être équipées de têtes nucléaires.

Économiquement, l’Allemagne Occidentale étrangle littéralement ses alliés d’Europe de l’Ouest. Il est intéressant de noter, à titre de comparaison, qu’en 1957, par exemple, la République fédérale a produit 24 500 000 tonnes d’acier contre 22 millions en Grande-Bretagne et un peu plus de 14 millions en France.

Financièrement, aussi, l’Allemagne Occidentale est aujourd’hui plus forte que la Grande-Bretagne ou que la France. Considérez leur or et leurs réserves de monnaie, par exemple. Selon les chiffres officiels, les réserves de l’Allemagne Occidentale s’élèvent à plus de 5 600 millions de dollars à la fin de 1957, en comparaison des 2 370 millions britanniques et des 775 millions de dollars de la France. Toutes ces ressources économiques de l’Allemagne Occidentale sont au service du renouveau du militarisme allemand.

Quelles que soient les dispositions de base des accord de Potsdam concernant la démilitarisation de l’Allemagne et la prévention de la réapparition de fascisme que nous pouvons prendre en compte, nous en arriverons à la conclusion que ces dispositions, portant les signatures des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France, ont été violées par eux.

Que reste-t-il des accords de Potsdam ? Une seule chose en réalité : le prétendu statut des quatre puissances sur Berlin, position que les trois puissances occidentales – les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France – ont la possibilité de céder à Berlin-Ouest, transformant cette partie de la ville, qui est la capitale de la République démocratique allemande, en une sorte d’État dans l’État et, profitant de cette situation, conduisant des activités subversives contre la République démocratique allemande, contre l’Union soviétique et les autres pays de Traité de Varsovie. Par dessus le marché, ils ont le droit de communication sans restriction entre Berlin et l’Allemagne Occidentale par l’espace aérien, les voies ferrées, les autoroutes et les voies navigables de la République démocratique allemande, une situation exceptionnelle qu’ils ne veulent même pas reconnaître.

La question qui se pose est : qui doit profiter de cette situation et pourquoi ont les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne n’ont-ils pas aussi violé cette partie de l’accord quadripartite ? La réponse est claire : ils n’ont aucune intention de violer cette partie des accords de Potsdam. Au contraire, ils s’y accrochent car l’accord sur Berlin est avantageux pour les puissances occidentales et pour elles seules. Les puissances occidentales, naturellement, ne sont pas opposées à la perpétuation de tels privilèges « d’alliés » pour toujours, bien qu’elles aient depuis longtemps détruit la base légale de leur présence à Berlin.

N’est-il pas temps pour nous de tirer des conclusions appropriées du fait que les articles clés des accords de Potsdam concernant le maintien de la paix en Europe et, par conséquent, dans le monde entier, ont été violés et que certaines forces continuent à soutenir le militarisme allemand, l’incitant à aller dans la direction vers laquelle il avait été poussé avant la Seconde guerre mondiale en somme, contre l’Est ? N’est-il pas temps pour nous de reconsidérer notre attitude par rapport à cette partie des accords de Potsdam et la dénoncer ? Le moment est venu pour les signataires des accords de Potsdam de renoncer aux restes du régime d’occupation à Berlin et de permettre ainsi de créer une situation normale dans la capitale de la République démocratique allemande. L’Union soviétique, pour sa part, remettrait les fonctions qui sont encore exercées à Berlin par des agences soviétiques à la souveraineté de République démocratique allemande. Ceci, je pense, serait la chose correcte à faire.

Que les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne construisent eux-mêmes leurs relations avec la République démocratique allemande, qu’ils cherchent à établir eux-mêmes un accord avec elle s’ils sont intéressés par les questions concernant Berlin. Quant à l’Union soviétique, elle honorera pieusement ses obligations en tant qu’alliée de la République démocratique allemande – obligations issues du Traité de Varsovie et confirmées à plusieurs reprises par l’Union soviétique en République démocratique allemande.

Si quelques forces d’agression attaquaient la République démocratique allemande, qui est un membre à part entière du Traité de Varsovie, nous considérerions ceci comme une attaque envers l’Union soviétique, envers tous les pays de Traité de Varsovie. Nous nous lèverions alors pour défendre la République démocratique allemande et ceci au titre de la défense des intérêts vitaux de la sécurité de l’Union soviétique, du camp socialiste tout entier et de la cause de la paix mondiale.

Les puissances occidentales qui, en leur temps, ont signé les accords de Potsdam, vont aujourd’hui dans le sens d’une aggravation de la situation internationale et encouragent les tendances militaristes croissantes des revanchards allemands. En somme, ils soutiennent tout ce que les accords de Potsdam ont dénoncé. Ils sont depuis longtemps plutôt guidés par le Traité agressif de l’Atlantique Nord que par les accords de Potsdam. Ils ont violé, à plusieurs reprises et impunément, les accords de Potsdam tandis que nous y restions loyaux comme si rien n’avait changé. Nous avons nos raison de nous libérer des obligations des accords de Potsdam, obligations qui se sont survécues à elles-mêmes et auxquelles les puissances occidentales s’accrochent, et de suivre, en ce qui concerne Berlin, une politique conforme aux intérêts du Traité de Varsovie.

Les leaders de l’Allemagne Occidentale disent que de bonnes relations entre l’Union soviétique et la République fédérale d’Allemagne peuvent seulement être établies si l’Union soviétique cesse de soutenir la République démocratique allemande et si elle fait pression dans la direction souhaitée par l’Ouest. Bonn ne désire pas avoir, apparemment, de bonnes relations avec l’Union soviétique s’il entretient de tels espoirs absurdes. Si le gouvernement de la République fédérale veut vraiment avoir de bonnes relations avec l’Union soviétique, il devrait abandonner, une fois pour toutes, l’espoir que nous cesserions de soutenir la République démocratique allemande.

Le gouvernement de la République populaire de Pologne a eu une initiative intéressante en proposant l’établissement d’une zone en Europe centrale où des missiles dotés d’armes atomiques, à l’hydrogène, ne seraient ni fabriqués ni stockés. Cette proposition constructive a été soutenue par les gouvernements de l’Union soviétique, de la Tchécoslovaquie, de la République démocratique allemande et d’autres pays socialistes et non socialistes qui signifient ainsi fermement leur attachement à la conservation de la paix. Les cercles dirigeants de l’Allemagne Occidentale ont cependant rejeté la proposition polonaise et ont pris la décision d’équiper la Bundeswehr de missiles atomiques. Le militarisme allemand est aujourd’hui encore plus dangereux pour le monde qu’auparavant. Des militaristes allemands espèrent absorber la République démocratique allemande et enlever à la Pologne ses antiques régions occidentales. Ils ont des revendications sur le territoire de la Tchécoslovaquie et d’autres pays socialistes.

Mais ils jouent avec le feu. La frontière Oder-Neisse est une frontière de paix. N’importe quelle atteinte à la République démocratique allemande par des revanchards allemands sera considérée comme une atteinte à la frontière Oder-Neisse, comme une menace envers la sécurité de nos peuples.

Les Polonais peuvent être assurés qu’ils ont en l’Union soviétique un ami fiable et un allié dans la lutte contre le militarisme allemand et l’agression impérialiste. »

traduction de Laurent Commaille

SOURCE :Pravda. 10.11.1958, n° 315. Moskva.

original sur Internet

Le Mur de Berlin

Chronologie :
13 août 1961 : à minuit les troupes de RDA verrouillent avec des barrages en barbelés les frontières avec Berlin-Ouest. Les barrages feront assez vite place à des murs solides. C’est la mise en place du fameux « mur de Berlin »
23-26 juin 1963 : visite de J.F. Kennedy qui, en proclamant « Ich bin ein Berliner » (je suis un Berlinois) devant une foule enthousiaste, souligne la solidarité occidentale, américaine en particulier, avec Berlin.

J. F. KENNEDY, Discours sur la Place de l’Hôtel de ville à Berlin

Mercredi, 26 juin 1963

« Je suis fier d’être venu dans votre ville, invité par votre bourgmestre régnant. Votre bourgmestre symbolise aux yeux du monde entier l’esprit combattant de Berlin-Ouest. Je suis fier d’avoir visité la République fédérale avec le chancelier Adenauer, qui durant de si longues années a construit la démocratie et la liberté en Allemagne. Je suis fier aussi d’être ici avec mon ami, le général Lucius Clay qui, dans cette ville, était à vos côtés aux plus grands moments de crise et qui reviendra auprès de vous sitôt qu’il sera nécessaire.

Il ne manque pas de personnes au monde qui ne veulent pas comprendre ou qui prétendent ne pas vouloir comprendre quel est le litige entre le communisme et le monde libre. Qu’elles viennent donc à Berlin. D’autres prétendent que le communisme est l’arme de l’avenir. Qu’ils viennent eux aussi à Berlin. Certains, enfin, en Europe et ailleurs, prétendent qu’on peut travailler avec les communistes. Qu’ils viennent donc ceux-là aussi à Berlin.

Notre liberté éprouve certes beaucoup de difficultés et notre démocratie n’est pas parfaite. Cependant, nous n’avons jamais eu besoin, nous, d’ériger un mur pour empêcher notre peuple de s’enfuir. Je ne connais aucune ville qui ait connu dix-huit ans de régime d’occupation et qui soit restée aussi vitale et forte et qui vive avec l’espoir et la détermination qui est celle de Berlin-Ouest.

Le mur fournit la démonstration éclatante de la faillite du système communiste. Cette faillite est visible aux yeux du monde entier. Nous n’éprouvons aucune satisfaction en voyant ce mur, car il constitue à nos yeux une offense non seulement à l’histoire mais encore une offense à l’humanité.

La paix en Europe ne peut pas être assurée tant qu’un Allemand sur quatre sera privé du droit élémentaire des hommes libres à l’autodétermination. Après dix-huit ans de paix et de confiance, la présente génération allemande a mérité le droit d’être libre, ainsi que le droit à la réunification de ses familles et sa nation, pacifiquement et durablement. Vous vivez sur un îlot de liberté mais votre vie est liée au sort du continent.

Je vous demande donc de regarder par-dessus les dangers d’aujourd’hui vers les espoirs de demain, de ne pas penser seulement à votre ville et votre partie allemande, mais d’axer votre pensée sur le progrès de la liberté dans le monde entier.

Ne voyez pas le mur, envisagez le jour où éclatera la paix, une paix juste. La liberté est indivisible, en tant qu’un seul homme se trouvera en esclavage tous les autres ne peuvent être considérés comme libres.

Mais quand tous les hommes seront libres, nous pourrons attendre en toute confiance le jour où cette ville de Berlin sera réunifiée et où le grand continent européen rayonnera pacifiquement.

La population de Berlin-Ouest peut être certaine qu’elle a tenu bon pour la bonne cause sur le front de la liberté pendant une vingtaine d’années. Tous les hommes libres, où qu’ils vivent, sont citoyens de cette ville de Berlin-Ouest, et pour cette raison, en ma qualité d’homme libre, je dis:  » Ich bin ein Berliner « . »

Source : Rose Kennedy, « Le temps du souvenir », Paris, Ed. Albin Michel, 1974, p. 351-53.

« Je suis fier de venir dans cette ville comme invité de votre distingué maire [Willy Brandt], qui a symbolisé à travers le monde l’esprit combatif de Berlin-Ouest. (…)

Il y a 2 000 ans, la phrase la plus glorieuse était civis romanus sum [« je suis citoyen romain »]. Aujourd’hui, dans le monde de la liberté, la phrase la plus glorieuse est « Ich bin ein Berliner » (…)

Il y a beaucoup de gens dans le monde qui ne comprennent pas vraiment ou qui prétendent ne pas comprendre quelle est la grande différence entre le monde libre et le monde communiste. Qu’ils viennent donc à Berlin. Il y en a qui disent que le communisme est la voie de l’avenir. Qu’ils viennent donc à Berlin. Il y a ceux qui disent qu’en Europe et ailleurs, nous pouvons travailler avec les communistes. Qu’ils viennent donc à Berlin. Et il y en a même quelques uns qui disent que même s’il est vrai que le communisme est effectivement un système maléfique, il nous permet de faire des progrès économiques. Lass sie nach Berlin kommen. Qu’ils viennent donc à Berlin.

Notre liberté éprouve certes beaucoup de difficultés et notre démocratie n’est pas parfaite. Cependant, nous n’avons jamais eu besoin, nous, d’ériger un mur pour empêcher notre peuple de nous quitter. (…) Le mur fournit la démonstration éclatante de la faillite du système communiste. Cette faillite est visible aux yeux du monde entier. Nous n’éprouvons aucune satisfaction en voyant ce mur, car il constitue à nos yeux, comme votre maire l’a dit, une offense non seulement à l’histoire mais également une atteinte à l’humanité, séparant des familles, des époux, des frères et des soeurs et divisant un peuple qui souhaite tant être réuni. (…)

La liberté ne se divise pas. Quand un homme demeure esclave, aucun homme n’est libre. Quand tous seront libres, nous pourrons alors attendre avec impatience ce jour où cette ville, ce pays et ce grand continent qu’est l’Europe seront réunis dans un monde pacifique et rempli d’espoir. (…)

Tous les hommes libres, où qu’ils vivent, sont citoyens de Berlin. C’est pourquoi, en tant qu’homme libre, j’éprouve de la fierté à dire : « Ich bin ein Berliner ». »

John F. KENNEDY, « Remarques sur la Place Rudolph Wilde à Berlin », 26 juin 1963. Traduction : B. Littardi et http://fr.wikipedia.org/wiki/Ich_bin_ein_Berliner. Source : http://www.presidency.ucsb.edu/ws/index.php?pid=9307&st=&st1=#axzz1h5TwADrU [consultés le 30 mars 2012]

« Fin de la visite triomphale du président américain en Allemagne.
M. Kennedy : « Ich bin ein Berliner ![1] »
(de notre envoyé spécial François Landgraf) »

« Le séjour du Président Kennedy en République fédérale [allemande] aura été un grand succès. Les huit heures passées hier à Berlin-Ouest ont été un triomphe, dépassant tout ce que l’on pouvait imaginer. En plus de l’enthousiasme des foules estimées à plus de un million et demi de personnes, et massées sur les 53 km. du parcours officiel, il y a eu (…) quelque chose de plus qu’en Allemagne occidentale. Sans tomber dans une sensibilité facile et trop facile dans cette ville déchirée, on peut dire que l’élément émouvant et humain (…) a dominé ces huit heures berlinoises. (…) [Ce fut le cas] lorsque le président est arrivé à la porte de Brandebourg et a vu pour le première fois le « mur ». Ceux qui l’ont observé de près ont remarqué l’émotion et la tristesse sur le visage de M. Kennedy (…). Le second moment pathétique fut l’arrivée au Check-Point Charlie, c’est-à-dire le point de passage du « mur » pour les étrangers. A quelques mètres de la lignes de démarcation, le président put observer longuement quelques Berlinois de l’Est qui n’avaient pas craint de stationner de l’autre côté du « mur » pour voir l’illustre visiteur. A une fenêtre, un mouchoir blanc s’agitait furtivement en direction de l’Ouest… (…) Une fois de plus, M. Kennedy a tiré le maximum du temps à sa disposition. Il a prononcé quatre allocutions qui lui ont permis de dire tout ce qu’il avait à dire à la population berlinoise. (…) Les propos qu’il a tenus sur le « mur » et le monde communiste ont été aussi durs qu’ils pouvaient l’être, ainsi lorsqu’il a dit : « Que ceux qui disent que l’on peut collaborer avec les communistes viennent à Berlin. » La satisfaction de la population atteignit son comble quand M. Kennedy s’écria en allemand : « Ich bin ein Berliner ! » (…)

[Quant] à Berlin et à l’Allemagne, on peut dire qu’un K. en chasse l’autre, puisque M. Khrouchtchev a encore avancé son arrivée à Berlin-Est où il sera déjà vendredi. A l’heure où nous écrivons ces lignes, on ignore tout du programme du Premier Soviétique si ce n’est que les manifestations publiques y occuperont une large place. La propagande est-allemande appelle en effet la population à décorer les maisons, les places et les rues. Il est presque certain en outre que M. Khrouchtchev prononcera un discours public. »

François Landgraf, La Gazette de Lausanne (quotidien), le 27 juin 1963, page 1 (= page de couverture).

[1] Traduction : « Je suis un Berlinois ! »

Les conséquences de la crise de Berlin (1958 – 1962)

Henri Froment-Meurice est successivement premier secrétaire de l’ambassade de France à Moscou et sous-directeur d’Europe orientale au Ministère français des Affaires étrangères durant la crise qui se noue autour du statut de la ville de Berlin dès 1958. Il considère cette crise comme ayant été plus grave que la crise de Cuba qui lui fait suite. Après avoir rappelé les négociations et l’évolution des positions des Quatre Grands, il propose quatre conséquences comme conclusion à la crise.

« La crise de Berlin de 1958 – 1962 n’en aura pas moins eu de très sérieuses conséquences. J’en vois quatre.

* 1. Les Allemands de l’Est se sentiront abandonnés définitivement dans le bloc soviétique. La construction du Mur est la vraie date de la fondation de la République démocratique allemande, dont les dirigeants, Ulbricht en tête, seront d’autant plus répressifs qu’ils seront conscients, malgré tout, de la vulnérabilité de leur Etat.

* 2. Mais, de leur côté, les Allemands de l’Ouest et les habitants de Berlin-Ouest ont perdu confiance dans la volonté des Alliés de lutter pour la réunification de l’Allemagne. On ne peut compter sur eux, il faut donc chercher son chemin soi-même. Ce sera dans peu d’années l’Ostpolitik, précisément menée par Willy Brandt. Elle visera certes à la réunification mais durch Annäherung, par un rapprochement entre les deux Allemagne. Elle aboutira aux Traités fondamentaux de 1972 et donc à la reconnaissance de la RDA.

* 3. Konrad Adenauer, sensible à l’appui que lui a apporté le général de Gaulle, acceptera le projet d’une solide Europe politique et, après l’échec du plan Fouchet à Six, la conclusion du Traité de l’Elysée. Toutefois demeurera une ambiguïté. Pour l’Allemagne, la garantie ultime de sécurité se trouve à Washington. Pour de Gaulle, s’il demeurera fidèle à l’Alliance atlantique, il n’acceptera pas une quelconque subordination de l’Europe aux Etats-Unis. Cette divergence trouvera son expression dans le fameux Préambule ajouté par le Bundestag lors du débat sur la ratification du Traité de l’Elysée.

* 4. La crise de Berlin aura généré un changement de stratégie des Etats-Unis, le passage à la stratégie de la flexible response, accompagné d’un accroissement des forces conventionnelles. Cette stratégie ne convaincra certes pas tous les Alliés et, bien évidemment, de Gaulle au premier rang. Elle sera néanmoins de facto adoptée. L’Allemagne, pour sa part, sans vouloir en quoi que ce soit acquérir pour elle-même une force nucléaire, souhaitera néanmoins pouvoir être associée aux travaux de planification qui seront menés plus tard dans le cadre du nuclear planning group.

En conclusion, qui a gagné ? Qui a perdu ?

Chacun a gagné.

L’URSS a gagné en sécurisant l’Allemagne de l’Est et, au bout du chemin, en obtenant la reconnaissance d’un second Etat allemand de plein droit, communiste, membre du Parce de Varsovie, fidèle allié de Moscou et cela jusqu’à la chute du Mur en 1989.

Les Alliés occidentaux ont gagné d’avoir maintenu Berlin-Ouest comme une ville rattachée à l’Ouest, démocratique, libre dans ses mouvements avec l’Ouest et conservant des garnisons alliées.

Donc chacun a perdu ce que l’autre a gagné.

L’URSS n’a pas réussi à faire de Berlin-Ouest une « ville libre » sans garnisons alliées.

L’Ouest n’a pas réussi à maintenir une libre communication entre les deux Berlin, de l’Ouest et de l’Est.

Faut-il en conclure à la partie nulle ?

Non ! Car la bataille n’était pas seulement pour Berlin, elle l’était pour l’Allemagne tout entière, et cette bataille, elle a finalement été gagnée par l’Ouest. Mais, paradoxalement, elle a été gagnée grâce aux Allemands de l’Est, car ceux qui ont fait tomber le Mur, ce ne sont pas les Berlinois de l’Ouest, mais bien les Berlinois de l’Est et les Allemands de l’Est. Et cela parce que nous autres, à l’Ouest, nous avions réussi à conserver nos valeurs de liberté et de démocratie et que, une fois de plus, les Allemands de l’Est ont voulu choisir et voulu gagner la liberté. »

Henri Froment-Meurice. « La construction du Mur de Berlin ». Dans : Commentaire, 132, hiver 2010 – 2011, pp. 954 – 955.

L' »Ost Politik » de Willy Brandt

« La tâche de la politique pratique dans les prochaines années sera de sauvegarder l’unité de la nation en veillant à mettre fin à l’état de crispation actuelle qui caractérise les relations entre les deux parties de l’Allemagne…

Vingt ans après la fondation de la république fédérale d’Allemagne et de la RDA [République démocratique allemande, Allemagne de l’est] , nous devons éviter que les deux parties de la nation allemande ne deviennent de plus en plus étrangères l’une à l’autre, c’est-à-dire, par un voisinage ordonné, aboutir à une vie en commun.

Il ne s’agit pas seulement ici d’un intérêt allemand, car il a aussi son importance pour la paix en Europe et pour les relations Est-Ouest. Notre attitude – et celle de nos amis – à l’égard des relations internationales de la RDA dépend pour une bonne part de l’attitude de Berlin-Est…

Il ne peut être question que le gouvernement fédéral reconnaisse la RDA au sens du droit international. Même s’il existe deux Etats en Allemagne, ils ne sont pas pour autant des pays étrangers l’un pour l’autre ; les relations qu’ils entretiennent entre eux ne peuvent être que d’une nature particulière.

Se rattachant à la politique de son prédécesseur, le gouvernement fédéral déclare que la volonté d’aboutir à des accords valables sur la renonciation mutuelle au recours à la force, ou à la menace du recours à la force, s’applique aussi à la RDA.

Le gouvernement fédéral conseillera aux Etats-Unis, à la Grande-Bretagne et à la France de poursuivre énergiquement les négociations entamées avec l’Union soviétique sur l’allégement et l’amélioration de la situation de Berlin. Il ne doit pas être porté atteinte au statut de la ville de Berlin qui est placée sous la responsabilité spéciale des Quatre Puissances. Cela ne doit pas empêcher pour autant de rechercher des facilités pour la circulation à Berlin et vers Berlin… Il faut donner à Berlin-Ouest la possibilité de contribuer à améliorer les relations politiques, économiques et culturelles entre les deux parties de l’Allemagne. »

Déclaration gouvernementale du chancelier Willy Brandt fait au Bundestag (Chambre des députés), le 28 octobre 1969.

Cité dans « Histoire Terminale », éditions Magnard, 1998, p. 169

Traité fondamental entre les deux Allemagnes, 8 novembre 1972.

* « 1. La République démocratique allemande et la République fédérale développeront entre elles des relations normales de bon voisinage et fondées sur l’égalité des droits. (…)

* 3. Elles réaffirment l’inviolabilité, à présent et dans l’avenir, de la frontière existant entre elles et s’engagent à respecter sans réserve leur intégrité territoriale. (…)

* 6. Elles partent du principe selon lequel le pouvoir de souveraineté des deux Etats se limite à son territoire. Elles respectent l’indépendance et la souveraineté des deux Etats dans ses affaires intérieures et extérieures. (…)

Cité dans « Histoire Terminale », collection Wagret, éditions Istra, 1989, p. 73

Discours d’Helmut Kohl devant le Bundestag (23 juin 1983)

« Nous, Allemands, nous n’acceptons pas la division de notre patrie. Nous continuerons à lutter avec détermination et persévérance pour appliquer les principes de notre Constitution et réaliser, par la libre autodétermination, l’unité et la liberté de l’Allemagne.

Nous ne renoncerons pas, parce que nous savons que l’histoire est de notre côté. La situation existante n’est pas irrévocable. (…) Il y a deux états en Allemagne, mais il n’y a qu’une nation allemande. L’existence de cette nation n’est pas à la disposition des gouvernements. (…) Elle s’est développée au cours de l’histoire, elle fait partie de la culture chrétienne européenne et doit sa nature à sa position au coeur du continent.

La nation allemande existait avant l’Etat national [unifié], et elle lui a survécu.(…) Notre conception de la nation allemande est incompatible avec l’idée de l’Allemagne à laquelle les autorités de RDA continuent de souscrire. »

tiré de « Histoire Terminal » Bertrand-Lacoste

Chronologie :

dès juillet 1989 : la Hongrie a ouvert le rideau de fer. A la fin septembre, 25’000 habitants de RDA ont déjà rejoint la RFA grâce à la brèche ainsi ouverte.

9 novembre 1989 : le porte-parole du gouvernement de RDA déclare incidemment au cours d’une conférence de presse que les voyages privés à l’étranger sont possibles et les formalités réduites. Suite à cela de nombreux Berlinois de l’Est se pressent aux points de passage qui s’ouvrent vers 23 h. 15. Cette nuit-là, les Berlinois de l’Est et de l’Ouest fêtent la chute du Mur.

3 octobre 1990 : l’Allemagne est réunifiée.