La signification du Pacte fédéral de 1291, par Peter Föhn, conseiller national, Muothatal (SZ)
« Ecrit sur du parchemin et déposé aux archives de Schwyz, le Pacte fédéral de 1291 est le document le plus ancien attestant la fondation de la Confédération. Par ce traité, les gens d’Uri, de Schwyz et d’Unterwald se sont promis assistance et soutien contre d’éventuels agresseurs extérieurs. A l’intérieur, le droit et l’ordre public ont été réglés par l’institution de juges indépendants ainsi que par un droit pénal valable pour tous. Le Pacte fédéral de 1291 est la pièce-maîtresse de l’exposition de documents et de drapeaux des archives de Schwyz. La maison qui l’abrite à Schwyz a été construite tout spécialement à cet effet entre 1934 et 1936. Elle est aujourd’hui un monument patriotique important de la Suisse. Or, à la demande du Département fédéral des affaires étrangères, le Pacte fédéral quittera pour la première fois non seulement les archives de Schwyz, mais aussi la Suisse.
Dépréciation
Ces dernières années, on a souvent tenté de minimiser l’importance du Pacte fédéral. Ce n’est rien de spécial, ce n’est qu’un contrat parmi beaucoup d’autres, a-t-on dit, certains allant même jusqu’à affirmer qu’il s’agissait d’un faux.
Or, ce Pacte fédéral de 1291 est un document authentique témoignant de la volonté d’indépendance et de liberté des anciens Confédérés, un document qui inaugure un très long, mais finalement efficace combat pour la liberté. Trois vallées se sont unies pour s’opposer à l’arbitraire de seigneurs étrangers. Leurs habitants n’acceptaient plus de se laisser exploiter, mais voulaient être libres comme leurs ancêtres.
L’Etat des Habsbourg, qui passait pour être moderne à l’époque, a depuis longtemps disparu, alors que la Confédération, tellement arriérée au yeux de certains, est toujours bien en vie. Les politiques de ce pays feraient bien de se rappeler le Pacte fédéral quand ils ont tendance à faire passer les intérêts de l’Etat avant ceux des citoyens.
Un document de la liberté
Le Pacte fédéral de 1291 est exactement le contraire de l’énorme machinerie législative UE: une seule page, quelques phrases suffisent pour dire l’essentiel. Sur une seule page, des gens tout simples de Suisse centrale ont écrit ce qu’ils jugeaient nécessaire pour résister à « la malice du temps ». Cette unique page a donné naissance à la Confédération à laquelle se sont ralliées au fil des siècles d’autres villes et campagnes.
Ce Pacte a conservé toute sa valeur et toute sa vérité pendant plus de sept siècles. Pourquoi? Parce que ses pères spirituels avaient les deux pieds dans la vie, parce qu’ils sentaient bien ce qui était nécessaire, ce qui pouvait durer. Le Pacte fédéral ne règle que l’essentiel: pas de puissances étrangères dans le pays, des juges élus par le peuple, l’aide mutuelle. Chacun est redevable de cette solidarité; personne ne peut simplement l’exiger de l’autre. Pour le reste, c’est la liberté.
Le message du Pacte fédéral aux élus politiques d’aujourd’hui est le suivant: la liberté, c’est la confiance dans chaque citoyen. Fais ce qui tu estimes juste. Conçois ta vie toi-même. L’Etat n’a pas à se comporter en maître d’école qui traite les citoyens comme des personnes immatures, qui leur dit constamment ce qu’ils doivent faire et ce qu’ils ne doivent pas faire. L’Etat n’a pas à contrôler les opinions des citoyens, à les traîner devant les tribunaux à cause de leurs convictions, à politiser la conception d’enfants, à contraindre les voyageurs à prendre le train, à déléguer les droits populaires aux administrations et aux tribunaux, à se mêler de conflits étrangers sans qu’on le lui demande. Bref, l’Etat n’a pas à imposer un mode de vie à chacun.
Il n’est pas nécessaire de céder l’original
Le Pacte fédéral devrait donc quitter Schwyz et même la Suisse. Je ne m’oppose absolument pas à ce que des Suisses de l’étranger et des Américains prennent connaissance du contenu de ce traité. Bien au contraire: ce très vieux message de liberté mérite d’être connu par toutes et par tous. Par contre, j’aimerais bien que les responsables politiques de ce pays témoignent un peu plus de respect pour ce document. Que ce projet de prêt du Pacte fédéral les incite à s’interroger sur la portée de ce Pacte et sur le courage et la clairvoyance de ceux qui l’ont conclu.
Il ne serait pas difficile de faire une copie conforme de ce document et de l’envoyer à l’étranger. Le million proposé par une fondation privée serait largement suffisant à cet effet – et permettrait même au canton de Schwyz de s’offrir encore quelques avantages culturels. L’ancien lutteur et gymnaste national que je suis sait bien qu’après quelques mauvaises expériences faites avec des objets historiques, des copies conformes ont été réalisées, par exemple de la pierre d’Unspunnen ou de la pierre de Muota. Et pour les athlètes, il est tout aussi difficile de lancer ces pierres que s’il s’agissait des originaux. Mais non pas au-delà des frontières nationales ! »
http://www.udc.ch/index.html?page_id=2247&l=3