La Révolution française se distingua par sa volonté de rupture avec l’Ancien Régime, y compris dans ses usages les plus élémentaires.
C’est ainsi qu’en décembre 1791, à la suite d’une demande du Directoire de Paris, l’Assemblée nationale décida d’abroger la pratique des voeux présentée par les corps constitués, considérée comme anachronique et contraire à l’esprit de la Révolution. La proposition est alors portée par Claude Pastoret [1755-1840] et Philippe-Charles-Aimé Goupilleau [1749-1823].
Ils seront cependant rétablis en 1797.
M. le Président donne lecture d’une lettre du directoire du département de Paris, qui demande d’être admis à présenter demain ses hommages à l’Assemblée, à l’occasion de la nouvelle année ; elle est ainsi conçue :
« Paris, le 30 décembre 1791.
« Monsieur le Président,
« Le directoire du département de Paris, désirerait être admis à présenter ses hommages à l’Assemblée nationale à l’occasion du renouvellement de l’année ; il vous prie de vouloir bien lui en obtenir l’agrément. » (Exclamations ironiques.) Plusieurs membres. L’ordre du jour ! (Bruit)
M. Pastoret – Messieurs, la demande du directoire est fondée sur un usage très vicieux établi jusqu’à présent et qu’il est digne de vous de détruire. Au commencement de la nouvelle année, les différents corps constitués du département de Paris venaient rendre leurs hommages à l’Assemblée nationale constituante. Or, le seul hommage que nous ayons à recevoir, le seul compliment digne de nous, c’est la satisfaction et le bonheur du peuple. (Applaudissements.) Je demande que l’Assemblée nationale abroge cet usage et décrète qu’elle ne recevra plus les députations qui ont pour but de lui présenter des hommages pour le renouvellement de l’année.
Un membre : J’appuie la motion de M. Pastoret et je demande qu’elle s’étende aussi aux félicitations par écrit.
M. le Président : Je mets aux voix la motion de M. Pastoret ainsi que l’amendement.
(L’Assemblée décrète, à l’unanimité, qu’elle abroge cet usage et qu’elle ne recevra désormais ni députation, ni compliment par écrit.) (Applaudissements.)
M. Goupilleau : Je demande que cette exception s’étende à l’Assemblée nationale et qu’elle s’interdise la faculté de faire des compliments ou visites à personne. Quelques membres : L’ordre du jour ! D’autres membres : Il faut faire une exception pour le roi.
M. Fauchet : J’appuie la motion de M. Goupilleau et je m’élève contre l’exception qu’on propose. L’Assemblée doit donner l’exemple et n’adresser aucun message comme ne recevoir aucun hommage.
Séance du 31 décembre 1791, page 696, disponible ICI