« M. le Premier Ministre, M. le Recteur, Excellences, Mesdames, Messieurs,

Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier de me donner l’opportunité de revenir à Bruges dans des circonstances très différentes de ma dernière visite peu après le naufrage du ferry « Zeebruge », quand le courage des Belges et le dévouement de vos médecins et de vos infirmières a sauvé tant de vies britanniques. Ensuite, permettez-moi d’exprimer quel plaisir il y a à parler devant le Collège d’Europe, sous le patronage distingué de son Recteur…

M. le Président, vous m’avez invité à parler sur le sujet : la Grande-Bretagne et l’Europe. Je dois vous féliciter pour votre courage. Si vous accordez crédit à ce qui se dit ou s’écrit sur mes vues en ce qui concerne l’Europe, c’est un peu comme inviter Gengis Khan à parler sur les vertus de la coexistence pacifique. Je commencerai par dissiper certains mythes sur mon pays, la Grande-Bretagne, et ses relations avec l’Europe, et pour le faire, je dois dire quelque chose au sujet de l’identité de l’Europe elle-même. L’Europe n’est pas une création du Traité de Rome. Pas davantage, l’idée européenne n’est la propriété d’un groupe ou d’une institution. Nous, Britanniques sommes des héritiers de la culture européenne autant que n’importe quelle autre nation. Nos liens avec le reste de l’Europe, l’Europe continentale, a été le facteur dominant de notre histoire. Pendant trois cent ans, nous avons été une partie de l’Empire Romain et nos cartes tracent encore les lignes droites des routes que les Romains ont construites. Nos ancêtres — Celtes, Saxons, Danois — venaient du Continent. Notre nation a été — dans les termes chers à notre Communauté européenne — « restructurée » sous la loi des Normands et des Angevins aux onzième et douzième siècles. Cette année, nous célébrons le trois centième anniversaire de la glorieuse révolution au cours de laquelle la couronne passa au prince Guillaume d’Orange et à la Reine Marie. Visitez les grandes églises et cathédrales de Grande-Bretagne, lisez notre littérature, et écoutez notre langue : tout porte témoignage des richesses culturelles que nous avons apportées d’Europe et que les autres Européens ont reçues de nous. Nous en Grande-Bretagne sommes fiers de la façon dont, à partir de la Magna Carta en 1215, nous avons développé les institutions représentatives pour en faire des bastions de la liberté. Et fiers aussi de la façon dont pendant des siècles la Grande-Bretagne a accueilli les gens du reste de l’Europe qui cherchaient une terre d’asile contre la tyrannie. Mais nous savons que sans le legs des idées politiques européennes, nous n’aurions pu réussir aussi bien que nous l’avons fait.

De la pensée classique et médiévale, nous avons retiré le concept d’État de droit, qui sépare une société civilisée de la barbarie. Et sur cette idée de Chrétienté auquel le recteur s’est référé — Chrétienté qui a été longtemps synonyme d’Europe — avec sa reconnaissance de la nature spirituelle et unique de l’individu, sur cette idée, se fonde encore notre croyance dans la liberté personnelle et les autres droits de l’homme. Trop souvent, l’histoire de l’Europe est décrite comme une série de guerres et de querelles interminables. Pourtant ce qui nous frappe le plus aujourd’hui est notre commune expérience. Par exemple, l’histoire des Européens ont exploré, colonisé — et, oui, sans apologie — civilisé une grande partie du monde, est une histoire extraordinaire de talents, de capacités et de courage. Mais nous, Britanniques, avons contribué d’une façon très particulière à l’Europe. Pendant des siècles, nous avons combattu pour éviter que l’Europe ne tombe sous la domination d’un pouvoir unique. Nous avons combattu et nous sommes morts pour sa liberté. A quelques miles d’ici gisent 120 000 soldats britanniques qui moururent dans la Première Guerre Mondiale. Sans cette détermination à combattre et à mourir, l’Europe eut été unifiée bien plutôt, mais pas dans la liberté, ni dans la justice. C’est l’aide britannique apportée aux mouvements de résistance tout au long de la dernière guerre qui a aidé à gardé vivante la flamme de la liberté dans tant de pays jusqu’au jour de la libération.

Demain, le Roi Baudouin assistera à une messe à Bruxelles pour rendre hommage aux valeureux Belges qui ont donné leur vie au service de la Royal Air Force — un sacrifice que nous n’oublierons jamais. Et c’est de notre forteresse insulaire que la libération de l’Europe a monté en puissance. Encore aujourd’hui, nous restons soudés. Près de 70 000 soldats britanniques sont stationnés au cœur de l’Europe.

Tout ceci suffit à montrer ce qu’est notre engagement dans l’avenir de l’Europe. La Communauté européenne est une manifestation de cette identité européenne, mais ce n’est pas la seule. Nous ne devons jamais oublier que de l’autre côté du Rideau de Fer, la liberté et l’identité de peuples qui ont autrefois partagé la culture européenne ont été déracinées. Nous devons toujours considérer Varsovie, Prague et Budapest comme de grandes cités européennes. De même nous ne devons jamais oublier que les valeurs européennes ont aidé les États-Unis d’Amérique à devenir les vaillants défenseurs de la liberté qu’ils sont devenus.

Ce n’est pas une chronique de faits obscurs sortis des bibliothèques poussiéreuses de l’histoire. C’est le récit de presque vingt ans d’engagement britannique en Europe, de coopération avec l’Europe et de contribution à l’Europe, contribution qui est aussi valable et aussi forte que d’autres. Oui, nous avons regardé aussi vers des horizons plus larges — comme d’autres — et tant mieux car l’Europe n’aurait jamais prospéré et ne sera pas prospère si elle reste un club d’esprit étroit replié sur lui-même. La Communauté Européenne appartient à tous ses membres. Elle doit refléter les traditions et les aspirations de tous ses membres. Je voudrais être très claire. La Grande-Bretagne ne rêve pas d’une petite existence confortable aux marges de la Communauté européenne. Notre destinée est en Europe, comme partie de la Communauté. Cela ne veut pas dire que notre futur réside uniquement en Europe, pas plus que la France, l’Espagne ou aucun autre membre. La Communauté n’est pas une fin en soi. Pas plus que ce n’est une construction institutionnelle vouée à être perpétuellement modifié pour satisfaire les diktats issus d’élucubrations intellectuelles. Elle ne doit pas non plus être ossifiée dans une régulation sans fin. La Communauté européenne est un moyen pratique pour assurer la prospérité future et la sécurité de ses peuples dans un monde où il y a beaucoup d’autres nations puissantes ou groupes de nations. Nous Européens ne pouvons nous offrir le luxe de nous perdre dans des disputes internes ou dans les arcanes de débats institutionnels. Il n’y a pas d’alternative à l’action efficace. L’Europe doit être prête à la fois à contribuer à part entière à sa propre sécurité et à devenir compétitive commercialement et industriellement dans un monde où le succès va aux pays qui encouragent l’entreprise et l’initiative individuelle, plutôt qu’à ceux qui les diminuent. Ce soir, je voudrais indiquer quelques principes directeurs pour le futur, qui, je crois, doivent assurer le succès de l’Europe, pas seulement en termes d’économie et de défense, mais aussi pour la qualité de vie et l’influence de ses peuples.

Mon premier principe est celui-ci : la coopération volontaire et active entre États indépendants et souverains est la meilleure voie pour bâtir une Communauté européenne qui réussisse. Essayer de supprimer les nationalités et de concentrer le pouvoir au centre d’un conglomérat européen serait hautement dommageable et mettrait en péril les objectifs que nous cherchons à atteindre. L’Europe sera plus forte précisément si elle a la France en tant que France, l’Espagne en tant qu’Espagne, la Grande-Bretagne en tant que Grande-Bretagne, chacune avec ses coutumes, ses traditions et son identité. Ce serait de la folie de vouloir les fusionner dans une sorte de kit européen. Certains de ses pères fondateurs de la Communauté pensaient que les États-Unis d’Amérique devraient être son modèle. Mais l’histoire de l’Amérique est tout à fait différente de celle de l’Europe. Des populations se sont rendues là-bas pour fuir l’intolérance et les contraintes de la vie en Europe. Ils recherchaient la liberté et l’extension du possible, et leur sens très fort du but à atteindre a, pendant deux siècles, permis de créer une nouvelle unité et une fierté d’être américain, comme notre fierté est d’être Britannique ou Belge, ou Hollandais ou Allemand. Je suis la première à dire que sur beaucoup de grandes questions les pays d’Europe devraient essayer de parler d’une seule voix. Je voudrais nous voir travailler plus étroitement sur les choses que nous pouvons faire mieux ensemble que seuls. L’Europe est plus forte quand nous agissons ainsi, que ce soit en matière de commerce, de défense, et dans nos relations avec le reste du monde. Mais travailler ensemble plus étroitement n’exige pas que le pouvoir soit centralisé à Bruxelles ni que les décisions soient prises par une bureaucratie appointée. C’est vraiment ironique que juste au moment où des pays comme l’Union soviétique, qui ont tenté de diriger toutes choses depuis un centre, sont en train d’apprendre que la réussite dépend de la dévolution des pouvoirs et des décisions vers la périphérie, que certains dans la Communauté semblent vouloir aller dans la direction opposée. Nous n’avons pas fait reculer les frontières de l’État en Grande-Bretagne pour les voir revenir en force au niveau européen, avec un super-État exerçant une nouvelle domination depuis Bruxelles.

Mon second principe est celui-ci : les politiques communautaires doivent prendre les problèmes qui se présentent d’une façon pragmatique, quelle que soit la difficulté. Si nous ne pouvons pas réformer les politiques communautaires qui sont notoirement mauvaises ou inefficaces, et qui causent des dommages publics, nous n’obtiendrons pas le soutien de l’opinion publique pour le développement futur de la Communauté. Et c’est pourquoi les succès du Conseil européen de Bruxelles en février dernier sont importants. Il n’est plus vrai que la moitié du budget de la Communauté soit dépensée à stocker des surplus alimentaires. Maintenant ces stocks ont été fortement réduits. Il était tout à fait juste de décider que la part de l’agriculture dans le budget devait être limitée pour rendre possible d’autres politiques, telles que l’aide aux régions moins avancées et l’aide à la formation professionnelle. Il était juste également d’introduire une plus grande discipline budgétaire pour renforcer ces décisions et pour amener la Communauté à dépenser avec plus de contrôle. Et ceux qui se sont plaint que la Communauté passait trop de temps sur des détails financiers ont manqué ce point. On ne peut pas construire sur des fondations fragiles, en matière financière ou autre, et ce sont les réformes fondamentales adoptées cet hiver qui ont pavé la route des remarquables progrès que nous avons fait depuis vers le Marché unique. Mais nous ne pouvons pas nous contenter de ce que nous avons réalisé jusqu’à présent. Par exemple, la tâche de réformer la Politique agricole commune est loin d’être achevée. Certainement, l’Europe a besoin d’une forte industrie alimentaire. Mais la PAC est devenue largement inefficace et dispendieuse. Produire des surplus indésirables ne sauve ni le revenu ni l’avenir des agriculteurs eux- mêmes. Nous devons continuer à poursuivre des politiques qui relient l’offre plus étroitement à la demande, qui réduise la surproduction et réduise les coûts. Bien sûr, nous devons protéger les villages et les zones rurales qui sont des parties si importantes de notre vie nationale, mais pas avec l’instrument des prix agricoles. S’emparer de ces problèmes exige du courage politique. L’image de la Communauté se dévaluera aux yeux de sa population et du monde extérieur si elle n’a pas ce courage.

Mon troisième principe directeur est le besoin de politiques communautaires pour encourager la libre entreprise. Si l’Europe veut développer et créer les jobs du futur, l’entreprise est la clé. Le cadre est tracé : le Traité de Rome lui-même est une Charte de la Liberté Économique. Mais ce n’est pas toujours ainsi qu’il a été interprété et encore moins mis en pratique. La leçon de l’histoire économique de l’Europe dans les années 1970 et 1980 est que la planification et le contrôle tatillon ne marchent décidément pas, mais que l’implication personnelle et l’initiative marchent. Qu’une économie dirigée est une recette pour la croissance molle et que la libre entreprise encadrée par la loi apporte de meilleurs résultats. L’Europe ouverte à l’entreprise est le but à atteindre avec le Marché unique Européen en 1992. En levant les barrières, en permettant aux entreprises d’opérer à une échelle européenne, nous pourrons mieux concurrencer les États-Unis, le Japon et les puissances émergentes, en Asie ou ailleurs. Et cela signifie agir pour des marchés libres, agir pour élargir le choix, agir pour réduire l’intervention gouvernementale. Notre but ne doit pas être de plus en plus en plus de réglementation à partir du centre : ce doit être de déréglementer et de lever les contraintes qui pèsent sur le commerce. La Grande-Bretagne a donné l’exemple en ouvrant ses marchés aux autres. La City de Londres a depuis longtemps accueilli les institutions financières du monde entier, et c’est pourquoi elle est la plus grande place financière en Europe. Nous avons ouvert notre marché pour l’équipement téléphonique, introduit la concurrence dans le marché des services, et sur le réseau lui-même — un pas que d’autres en Europe commencent maintenant à franchir. Dans le transport aérien, nous avons pris la tête de la libéralisation et trouvé avantage à des tarifs plus bas et un meilleur choix. Nos ports sont ouverts aux flottes commerciales d’Europe. Nous aimerions en dire de même des autres membres de la Communauté. En ce qui concerne les questions monétaires, permettez-moi de dire ceci. La question importante n’est pas d’avoir une Banque centrale européenne. L’urgence pratique est :

– Que la Communauté s’engage dans la libération des capitaux. En Grande-Bretagne, c’est fait. – L’abolition des contrôles de change partout dans la communauté. En Grande-Bretagne, c’est fait depuis 1979. – D’établir un véritable marché libre des services financiers, bancaires, d’assurance, d’investissement, et de faire un usage plus large de l’écu.

…. Ce sont des pas très concrets auxquels la Communauté devrait se consacrer. C’est la même chose pour les frontières entre nos pays. Bien sûr, nous souhaitons que les biens puissent circuler plus aisément. Bien sûr, nous devons rendre plus faciles les voyages à l’intérieur de la Communauté. Mais il serait contraire au sens commun d’abolir les contrôles frontaliers si nous voulons protéger nos citoyens du crime et stopper la circulation des drogues, des terroristes et des immigrants illégaux. Ceci a été illustré il y a trois semaines quand un courageux officier des douanes allemandes est parvenu à bloquer des terroristes de l’IRA à la frontière hollandaise. Et avant que je quitte le sujet du marché unique, je dois dire que nous n’avons certainement pas besoin de nouveaux règlements qui augmenteraient le coût du travail et rendraient le marché européen du travail moins flexible et moins compétitif par rapport aux fournisseurs extérieurs. Si nous devons avoir un statut de l’entreprise européenne, il devra contenir le minimum de règlements. Et certainement, nous en Grande-Bretagne nous combattrons les tentatives d’introduire du collectivisme et du corporatisme au niveau européen, étant entendu que ce que fait chaque peuple dans son propre pays est son affaire.

Mon quatrième principe directeur est que l’Europe ne doit pas être protectionniste. L’expansion de l’économie mondiale exige de nous de continuer le processus de suppression des barrières commerciales, et de le faire par des négociations multilatérales au GATT. Ce serait une véritable trahison si, pendant qu’on supprime les contraintes à l’intérieur de l’Europe, on érigeait une plus grande protection extérieure. Nous devons nous assurer que notre approche du commerce mondial est cohérente avec la libéralisation que nous prêchons pour nous-mêmes. Nous avons la responsabilité d’en être l’avant-garde, une responsabilité particulièrement à l’égard des pays les moins développés. Ils n’ont pas seulement besoin d’aide; ils ont surtout besoin qu’on leur ouvre des opportunités commerciales si l’on veut qu’ils gagnent la dignité d’avoir des économies en forte croissance et indépendantes.

Mon dernier principe directeur concerne le problème le plus fondamental — Le rôle des pays européens dans la défense. L’Europe doit continuer à maintenir une défense forte dans le cadre de l’OTAN. Il n’est pas question de relâcher nos efforts, même si cela signifie prendre des décisions difficiles et assumer des coûts élevés. C’est à l’OTAN que nous devons la paix qui a été maintenue pendant quarante ans. C’est un fait que le vent souffle pour nous : le modèle démocratique d’une société basée sur la libre entreprise a prouvé sa supériorité ; la liberté est à l’offensive, une offensive pacifique pour le monde entier, pour la première fois dans le cours de mon existence. Nous devons nous efforcer de maintenir l’engagement des États-Unis dans la défense de l’Europe. Et cela passe par la reconnaissance du fardeau sur leurs ressources, du rôle mondial qu’ils assument et de leur souhait de voir leurs alliés prendre leur part dans la défense de la liberté, à mesure que l’Europe devient plus prospère. De plus en plu, ils demanderont à l’Europe de jouer un rôle militaire plus important hors de l’Europe, comme nous l’avons fait récemment dans le Golfe. L’OTAN et l’Union de l’Europe Occidentale ont depuis longtemps reconnu les problèmes de la défense européenne, et ont déterminé les solutions. Le temps est venu de où nous devons traduire nos déclarations sur l’effort de défense renforcé en implications financières. Ce n’est pas un problème institutionnel. Ce n’est pas un problème d’effectifs. C’est quelque chose d’à la fois plus simple et plus profond : c’est une question de volonté politique et de courage politique, pour convaincre nos peuples dans tous nos pays que nous ne pouvons éternellement nous reposer sur les autres pour notre défense, et que tout membre de l’alliance doit partager le fardeau. Nous devons obtenir un soutien de l’opinion à la dissuasion nucléaire, en se souvenant que les armes obsolètes ne dissuadent pas, d’où la nécessité d’une modernisation. Nous devons mettre à la hauteur les forces conventionnelles en Europe face aux forces soviétiques qui sont constamment modernisées. Nous devons développer l’UEO, non comme une alternative à l’OTAN, mais comme un moyen de renforcer la contribution de l’Europe à la défense de l’Occident. Par dessus tout, à un moment de changements et d’incertitude en Union soviétique et en Europe orientale, nous devons préserver l’unité de l’Europe et agir de façon à ce que, quoiqu’il arrive, notre défense soit sûre. En même temps, nous devons négocier sur le contrôle des armements et laisser la porte ouverte à la coopération dans tous les autres domaines couverts par les Accords d’Helsinki. Mais n’oublions jamais que notre mode de vie, notre vision et tout ce à quoi nous tenons est garanti non par la justesse de notre cause, mais par la force de notre défense. Sur cela nous ne devons jamais flancher, jamais faillir.

M. le Président, je crois qu’il n’est pas suffisant de parler en terme généraux d’un idéal ou d’une vision européenne. Si nous croyons en lui, nous devons établir une feuille de route et prévoir les prochaines étapes. Et c’est ce que j’ai essayé de faire ce soir. Cette approche n’exige aucun nouveau document: ils sont tous là, le Traité de l’Atlantique Nord, le Traité de Bruxelles révisé et le traité de Rome, textes rédigé par des hommes qui voyaient loin, et parmi eux un Belge remarquable – Paul-Henri Spaak. Cependant, aussi loin que nous souhaitions aller, nous ne pouvons le faire que pas à pas. Et ce que nous avons à faire maintenant, ce sont les pas suivants, plutôt que nous laisser divertir avec des buts utopiques. Le royaume d’Utopie ne se réalise jamais, parce que nous savons bien que nous ne l’aimerions pas s’il se réalisait. Préservons l’Europe comme une famille de nations se comprenant de mieux en mieux, s’appréciant de mieux en mieux, réalisant ensemble de plus en plus en plus, mais attachées à leur identité nationale autant qu’à leur engagement européen. Ayons une Europe qui joue sa partie dans le monde global, qui regarde vers l’extérieur et non vers l’intérieur, et qui préserve la communauté atlantique – cette Europe des deux côtés de l’Atlantique – qui est notre plus noble héritage et notre plus grande force. Je vous remercie de m’avoir donné la possibilité de faire cette conférence dans la magnifique salle de ce grand collège. »

Source : Margaret Thatcher Foundation

NB – Le terme Christendom employé par Margaret Thatcher est souvent mal traduit ou compris. C’est l’équivalent de la Chrétienté (aire de civilisation) alors que Christianity est le christianisme (religion). La Chrétienté est bien l’ensemble qui précéda l’Europe.