Jugement de Jean-Pierre Rioux, historien

Chaque pays a eu une voie particulière dans la Révolution industrielle. Le modèle anglais n’est pas le seul, bien qu’il serve souvent de référence.
L’historien Jean-Pierre Rioux dans son livre, La révolution industrielle (1971), souligne à la page 97 l’importance du secteur sidérurgique et minier dans le développement industriel.

« La hiérarchie des puissances est ainsi fixée par les productions de houille et de fonte. Une seule exception: la Suisse, où l’absence de charbon et de sidérurgie n’empêche pas l’industrialisation d’aval Comprennez une industrialisation qui découle du charbon et de la sidérurgie. et particulièrement l’essor d’une métallurgie de transformation puissante. La tradition artisanale du pays, la précocité en technique et en production de son industrie cotonnière, l’essor de sa chimie moderne, sa situation géographique exceptionnelle de carrefour entre les mondes rhénan et alpin expliquent cette anomalie. »

Début de la Révolution industrielle en Suisse

Où situer les marges de la révolution industrielle suisse ? C’est dans le canton d’Appenzell, en 1783, qu’on trouve la première tentative sérieuse d’utiliser des machines dans l’industrie. Mais on peut situer le véritable départ de la révolution industrielle en Suisse en 1798, l’année de la « Révolution helvétique » (en fait l’invasion de la Suisse par les troupes révolutionnaires françaises) qui ouvrira les portes de l’Etat à la bourgeoisie et créera les lois économiques libérales.
En 1798 le Directoire helvétique fait voter une loi instituant la liberté du commerce et de l’industrie et supprimant les droits des maîtrises et des jurandes, et en 1799, un arrêté de ce même Directoire autorise l’établissement de la première filature mécanique.
La Suisse est ainsi un des premiers pays à suivre l’Angleterre sur la voie du machinisme. Elle est même devenue (et continuera longtemps à s’affirmer comme telle) le principal concurrent de l’industrie textile britannique.

Quelles sont les caractéristiques principales de la Suisse au moment où survient le révolution industrielle ?
Son sol et son sous-sol sont pratiquement dépourvus de richesses naturelles : à part l’eau, il y a peu de matières premières disponibles pour les industries naissantes. De plus la surface utilisable du territoire est exiguë.
Jusqu’au XVIIIe siècle, l’économie suisse est essentiellement basée sur :
a) une maigre agriculture (les paysans, pauvres en majorité, sont soumis financièrement à l’Etat et aux seigneurs ou notables locaux);
b) l’artisanat urbain : les métiers, strictement organisés dans le cadre des corporations, ont pour base principale les compagnons, dont la solide tradition d’organisation les faits souvent considérer comme les précurseurs du syndicalisme. Les compagnons formeront une des deux principales sources du prolétariat suisse (avec les travailleurs à domicile de la campagne);
c) le commerce dans certaines villes (Zurich, Bâle, etc.);
d) les revenus d’une grande tradition nationale : le mercenariat (après avoir été une puissance militaire de niveau européen, la Suisse s’est transformé en un réservoir de mercenaires pour les armées étrangères : aux XVIe et XVIIe siècles, 900’000 mercenaires suisses sont morts sur des champs de bataille étrangers; toutefois l’émigration militaire a rapporté à la Suisse des traités de commerce très avantageux avec les pays voisins);
e) le travail à domicile à la campagne, seconde racine du prolétariat, qui remplace en partie le mercenariat comme source d’emploi accessoire. Les travailleurs à domicile de la campagne tiennent lieu des travailleurs de manufactures; il n’y a en effet pratiquement pas eu en Suisse de développement important du stade manufacturier comme étape précédant la fabrique. Le travail à domicile permet aux familles paysannes de compléter leurs maigres gains ou de compenser les énormes redevances dues aux propriétaires de la terre. En Suisse romande (du Jura à Genève), ce travail est surtout consacré à l’horlogerie, importée par les familles des réfugiés huguenots. En Suisse orientale et dans la région de Saint-Gall, on pratique la filature et le tissage du coton, de la soie et du lin, pour un marché s’étendant à toute l’Europe continentale.

Ainsi, malgré l’inexistence de manufactures, la Suisse a déjà une bonne base pour le développemeent industriel au XVIIIe siècle, avant même la révolution industrielle.

tiré du journal « Syndicalisme suisse »

Ordonnance du 7 novembre 1815 à Zürich

« Le Petit Conseil [ = gouvernement ] de Zürich ordonne :

1. Aucun enfant ne peut dorénavant être admis au travail en fabrique, à moins d’être âgé de 9 ans révolus et d’être muni d’un certificat de l’autorité ecclésiastique de sa paroisse attestant son âge et un développement intellectuel suffisant.

2. Tous les enfants mineurs employés dans les fabriques sont tenus de suivre régulièrement les cours de l’enseignement complémentaire et de l’instruction religieuse ; les parents ou ceux chez qui logent les enfants sont rendus responsables de leur assiduité à ces cours, à laquelle les propriétaires de fabriques sont invités à veiller de leur côté.

3. Dans chaque salle de travail de chaque fabrique, un employé spécial est chargé de surveiller la conduite et les propos des ouvriers mineurs, sous le contrôle de l’autorité ecclésiastique.

4. Il est interdit de faire travailler les ouvriers mineurs :
a) plus de 12 à 14 heures par jour ;
b) avant 5 heures du matin en été et 6 h. du matin en hiver.

5. Les ouvriers mineurs doivent confier leurs salaires à leurs parents et ceux-ci doivent autant que possible, les mettre de côté pour le compte de leurs enfants.  »

La grève du bâtiment à Genève, en 1868

Au printemps de 1868, les ouvriers maçons et terrassiers de Genève, qui gagnaient en moyenne Fr. 3,60 par jour, se mirent en grève, réclamant une augmentation de 20% et une réduction de leur journée de travail (10 heures au lieu de 12). Les patrons se refusèrent à traiter avec les délégués de l’Association internationale des travailleurs (A.I.T., c.-à-d. la 1ère Internationale) mandatés par les grévistes et fermèrent tous les chantiers, mettant ainsi au chômage les autres profes­sions du bâtiment (menuisiers, charpentiers, serruriers, ferblantiers, etc.). L’Internationale organisa aussitôt la solidarité et, grâce à l’argent récolté dans les autres profes­sions et dans les autres villes, en Suisse et à l’étranger, les ouvriers purent tenir et remporter un succès remarquable: 10% d’augmentation et la journée de 11 heures. Dans une brochure, Johann Philipp Becker, un socialiste allemand réfugié en Suisse et vivant à Genève, fit le récit de ces événements qui avaient attiré l’attention bien au-delà des frontières, car c’était la première fois que la solida­rité internationale des travailleurs se manifestait à une telle échelle.

« Il est à noter que cet acte de cruauté [la fermeture des chantiers aux ouvriers des profes­sions non concernées par la grève] n’a nullement soulevé la moindre indignation chez la bourgeoisie et chez la presse dont elle dispose naturellement, car ce que la loi autorise est permis et la liberté individuelle est sacrée. Quant au droit et quant à la liberté des prolé­taires, on les mesure toujours avec une aune tout à fait différente, parce qu’on considère ces marchandises comme devant être sacrifiées aux intérêts généraux du pays, qui sont toujours ceux de la classe dominante. Il faut dire que l’esprit de caste, les préjugés tradi­tionnels, renforcés et surexcités par le langage passionné de la presse conservatrice avaient bouleversé les têtes de ces messieurs. (…) [D]ès le 29 mars, un certain nombre d’ouvriers appartenant à des sections de métier restées jusqu’ici étrangères à la grève, répondirent aux menaces adressées à leurs camarades en bâtiment par la formation de sections qui, à leur tour, demandèrent à entrer dans la grande fédération de l’Association Internationale. (…) [L]’Internationale a gagné en ce jour plus de mille nouveaux adhérents; et en réalité, tous les autres ouvriers lui sont attachés par leurs convictions, même ceux qui n’ont pas encore, pour une raison ou pour une autre, fait acte formel d’adhésion.

Le coup d’estoc le plus vigoureux a été porté à l’appareil d’oppression des patrons par les bijoutiers, graveurs, horlogers, gaîniers, boîtiers, enfin par tous les ouvriers appartenant à la fabrique qui tous sauf quelques rares exceptions, sont citoyens genevois. Les présidents de leurs sections apposèrent à côté de l’affiche-monstre des entrepreneurs une affiche plus colossale encore, couverte de lettres gigantesques et convoquant les ouvriers de la partie en assemblée générale, au Stand, pour le 30 au soir. La réunion composée de plus de 2’000 personnes, résolut, à l’unanimité, d’employer tous les moyens matériels et moraux pour assurer la victoire aux ouvriers en bâtiment.

La perception des contributions fut organisée, et des collecteurs furent nommés et chargés de prélever dans les ateliers, les jours de paie, l’impôt que chacun s’imposerait volontiers. Dans la même assemblée on a protesté formellement contre le mensonge d’après lequel les ouvriers genevois subissaient la tyrannie d’une société étrangère [c’est-à-dire de l’Internationale]; l’on a également repoussé avec énergie toute tentative de séparer les intérêts des ouvriers genevois des intérêts des ouvriers appartenant à d’autres nationalités. (…)

Le lundi 30, on était au commencement de la seconde semaine de la grève et le mouve­ment avait atteint son point culminant. Les contradictions entre les différentes classes de la société n’ont pu, depuis que l’histoire existe, adopter nulle part une attitude aussi tran­chée et avoir lutté moralement avec tant d’ardeur, sans cependant jamais recourir à la vio­lence brutale. A ce moment, Genève est partagé en deux camps sociaux politiques. D’un côté se trouvent les entrepreneurs en bâtiment ayant derrière eux la bourgeoisie tout en­tière, de l’autre côté se trouvent les ouvriers en bâtiment, sentant derrière eux tous les au­tres travailleurs, debout comme un seul homme, animés tous du même esprit, de la même volonté et défendant les mêmes intérêts. Genève, comme nous l’avons dit, offre en minia­ture ce prologue du spectacle qui sera infailliblement répété en grand dans tous les Etats civilisés. La grève ne joue qu’un rôle très secondaire, elle a seulement donné l’impulsion au frottement des contradictions économiques, elle a seulement mis à nu les plaies de la société et fait ressortir d’une manière frappante l’irrésistible nécessité d’une réforme sociale. (…)

Jusqu’au 30 mars, l’Association Internationale, ou ce qui est la même chose, la classe ou­vrière, avait concentré tous ses efforts à amener une solution du conflit; mais à partir de ce· moment, toutes les tentatives ayant avorté, elle dut se préparer à entreprendre une campa­gne de longue haleine et à se procurer les moyens nécessaires pour tenir bon. On comprendra quelle charge et quelle responsabilité pesaient sur le Comité central, si l’on songe qu’il y avait 3’000 ouvriers en grève, qui, avec leurs familles, représentaient 9’000 personnes manquant de pain. Or, malgré le dévouement et l’abnégation des ouvriers genevois, dont une grande partie était du reste en grève, il eût été impossible de trouver les moyens de subsistance nécessaire dans les rangs de la population laborieuse genevoise. Les « sommes colossales » que, selon les journaux, une divinité mystérieuse, nous ne savons trop laquelle, aurait mises à la disposition du Comité central, n’étaient malheureusement que de « colossales » impostures. Par conséquent, il fallut s’adresser à nos amis du dehors, à tous les ouvriers libres et éclairés dans le monde entier. »

Johann Becker (1868), L’Association internationale des travailleurs et la grève genevoise en mars-avril 1868. Traduit par Fried. Kohn, Genève. (Tiré de : Groupe de travail pour l’histoire du mouvement ouvrier Zurich (1975), Le mouvement ouvrier suisse. Documents de 1800 à nos jours, Genève : Editions Adversaires, 1978, pp. 71-75.)

Programme de la première Fédération ouvrière suisse (1874).

« Le but de l’association est la réunion de toutes les sociétés ouvrières en une fédération, afin qu’elles se mettent d’accord sur les moyens d’améliorer, pour le présent, le sort des travailleurs et de parvenir au remplacement définitif du salaire par le revenu du travail au moyen de coopératives de production, aboutissant ainsi à l’abolition de toute domination de classe.

En conséquence, ses membres appuient d’une façon adéquate toutes les tentatives visant à l’élévation intellectuelle et matérielle de la classe ouvrière et cherchent en outre à atteindre, par la fondation de syndicats, les résultats suivants :

1) Réduction de la durée du travail de manière à ce qu’elle soit tolérable pour la santé et le développement intellectuel. Introduction d’une journée de travail normale de dix heures maximum avec double rémunération des heures supplémentaires.

2) Fixation des salaires à un niveau qui permette une existence convenable, en tenant compte des conditions locales.

3) Réglementation la meilleurs possible du travail des enfants dans les fabriques.

4) Application du principe : à quantité de travail égale, que celui-ci soit fait par des hommes ou des femmes, même rémunération.

5) Création de coopératives de production, qui soient la propriété des syndicats intéressés.

6) Création de bureaux de placement aux mains des ouvriers.

7) Création d’une caisse d’assurance maladie, invalidité et décès pour les ouvriers et ouvrières.

8) Protection des travailleurs contre l’oppression patronale.

9) Mesures de protection pour la santé et la vie des travailleurs.

10) Enquête statistique sur la situation générale des travailleurs qui tiennent spécialement compte des rapports entre les salaires moyens et le coût de la vie.

11) Bonne formation technique des ouvriers et apprentis et pour cela, fondation d’établissements techniques par les syndicats eux-mêmes.

12) Publication d’un organe des travailleurs pour les langues représentées dans la Fédération qui défende les intérêts des ouvriers sous tous les rapports et soit propriété de la Fédération. »

Procès-verbal du 2e Congrès de la Fédération ouvrière suisse tenu à Winterthur

Herman GREULICH, La signification révolutionnaire des syndicats (Tagwacht, 1876)

« …Le rabaissement de l’ouvrier à l’état de marchandise devait entraîner, en relation avec l’isolement du prolétariat, une démoralisation considérable et pousser le travailleur à avoir une mentalité d’esclave. La lutte pour l’existence se déroule encore selon la devise : « Chacun pour soi ». Chacun considère son camarade de travail comme un ennemi, comme un concurrent contre lequel il doit se battre pour son pain quotidien…
C’est par l’organisation syndicale que l’ouvrier est arraché à cette attitude indigne. En lieu et place de l’isolement et d’une hostilité mutuelle, l’avenir, la solidarité, la fraternité prennent le dessus et sous la protection du syndicat, le sentiment de la dignité humaine s’installe dans son coeur.
Le premier devoir du syndicat est… la protection contre l’oppression, l’exploitation, le traitement indigne et les mesures disciplinaires… Une série de revendications ouvrières ne peuvent aboutir que par l’intermédiaire de l’Etat, comme par exemple la protection de la santé et de la vie, la responsabilité civile, etc. … Partout l’organisation et l’activité syndicale mènent les travailleurs à la conviction que les buts syndicaux ne peuvent être atteints durablement que si les ouvriers conquièrent un pouvoir politique … »

Eloge du travail des enfants

En 1858, le Conseil de l’éducation du canton de Zurich soumit aux instituteurs et aux autorités scolaires un projet de loi visant à interdire le travail en fabrique des enfants en âge scolaire, et limitant à 12 heures par jour la durée de travail pour les enfants de moins de 16 ans. La commission scolaire de la commune industrielle de Töss prit à ce sujet la position suivante :

 » On va décidément trop loin. Pendant des années, nos enfants ont travaillé 14 heures par jour dans les fabriques d’ici … et cela ne les a pas empêchés non seulement de rester en bonne santé, mais encore de croître en stature et en vigueur. N’oublions pas que, dans la mesure où les hommes veulent jouir des biens de l’existence, il faut les engager à des efforts sans lesquels nul ne peut subsister.
Dans les filatures, les enfants ne sont pas astreints à des travaux fatigants : ils n’ont d’autre tâche que de servir les machines. – Le cultivateur exige de ses enfants des efforts bien plus considérables, et personne ne songerait à lui ordonner de laisser ses enfants se reposer à l’ombre, quand il travaille aux champs … – Ainsi la loi veut encore réduire la journée de travail dans les fabriques; mais que feront-ils de leur temps libre, sinon des sottises … Et qu’en résultera-t-il pour les parents de ces enfants ? Ils obtiendront un salaire moins élevé … »

Contre la loi sur les fabriques, les patrons s’insurgent (référendum de 1877).

« Appel aux électeurs :

Répondant à l’appel qui vous était adressé, vous avez, en peu de temps, revêtu de près de 5000 signatures les pétitions réclamant la votation populaire sur la loi fédérale sur les fabriques :

Votre empressement à signer prouve les grands dangers dont cette loi menace notre Patrie !

Depuis lors, ni les débats de presse, ni les discussions publiques, n’ont pu dissiper nos appréhensions sur les conséquences fâcheuses et inévitables de cette loi.

Au lieu de se borner à préserver les enfants contre les excès de travail dans les fabriques et les ouvriers contre les abus des industries dangereuses, comme le permettait la Constitution, l’Assemblée fédérale a outrepassé ses droits et a cédé à cet esprit centralisateur dont le peuple suisse a souvent combattu l’exagération.

Aussi cette loi soumise à la sanction populaire doit-elle être repoussée comme contraire aux véritables intérêts industriels de la Suisse tout entière.

En effet, elle viole le principe de la liberté indispensable à toutes nos industries.

Contraire au progrès qui tend à rapprocher ouvriers et patrons, elle les divise en deux classes hostiles l’une à l’autre, et toutes deux placées hors du droit commun.

Redoutable en raison de l’ambiguïté de la rédaction et de l’arbitraire de son interprétation, elle n’engendrera que des chicanes et débats incessants.

Humiliante pour les ouvriers qu’elle juge incapables, non seulement de discuter eux-mêmes leurs propres intérêts, mais mieux de respecter les bonnes moeurs sans une surveillance légale, elle entravera en outre toute amélioration des salaires en imposant de nouvelles charges aux fabriquants, déjà limités par la concurrence étrangère.

Directement onéreuse pour tous les intéressés, cette loi l’est également pour tous les citoyens en augmentant encore vos budgets fédéraux, par la création d’une nombreuse et très coûteuse bureaucratie.

Inconstitutionnelle par le droit de visites domiciliaires, et dangereuses par celui d’inquisition qu’elle attribue au pouvoir central et même à ses employés, cette loi affaiblit d’autant plus la nation qu’elle la dépouille de son initiative et de sa liberté d’action.

D’ailleurs, les exemples cités par les promoteurs de la loi, sont tous empruntés aux pays monarchiques. Les ouvriers ne sont-ils pas, sous l’empire de ces lois, moins heureux que nous ne le sommes sous le régime de la liberté ?

Citoyens !

Ceux qui prêchent l’adoption de cette loi y trouvent un thème facile pour se faire de la popularité; mais leurs arguments contradictoires entre eux nous suffissent pour nous éclairer : les uns la prônent comme devant apporter du pain et non des pierres à nos ouvriers affamés, les autres, pour la recommander, nous assurent qu’elle ne sera pas appliquée. N’est-ce pas là la meilleure condamnation de la loi proposée !

C’est donc convaincus que cette loi portera un coup fatal à nos industries, convaincus qu’elle est contraire à la Constitution, à nos aspirations et aux principes démocratiques, que vous viendrez nombreux et empressés, sans préoccupation politique, déposer dans l’urne un patriotique NON.

Vive Genève ! Vive la Confédération !
Le Comité d’initiative. »

extrait du Journal de Genève , 20 octobre 1877.