Louise Labé, déjà au XVIe siècle
« Le temps étant venu que les sévères lois des hommes n’empêchent plus les femmes de s’appliquer aux sciences et études, il me semble que celles qui le peuvent doivent employer cette honnête liberté à apprendre celles-ci et à montrer aux hommes le tort qu’ils nous faisaient en nous privant de ce bien et de cet honneur (…)
Je ne puis faire autre chose que prier les vertueuses Dames d’élever un peu leurs esprits par-dessus leurs quenouilles et fuseaux, et de s’employer à faire entendre au monde que, si nous ne sommes pas faites pour commander, nous ne devons pas cependant être dédaignées comme compagnes, tant dans les affaires domestiques que publiques, de ceux qui gouvernent et se font obéir. »
Louise LABÉ (1524-1566), Dédicace des Œuvres.
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Éducation des jeunes filles
« Ce qu’il convient à une fille chrétienne de scavoir ». 1618
« Les sœurs seront obligées d’instruire gratuitement les petites filles, premièrement dans la piété et la vertu en leur apprenant ce qu’il convient à une fille chrétienne de scavoir, c’est-à-dire l’abrégé de la doctrine chrétienne, la manière d’examiner sa conscience, de confesser ses péchés, de communier, d’entendre la messe de piété, de chanter des cantiques spirituels, de fuir le péché et les occasions du péché, de pratiquer les vertus et les oeuvres de miséricorde de régler une maison, de remplir enfin tous les devoirs de la vie chrétienne. Ensuite pour les attirer à leur école et les détourner des écoles de l’erreur et du vice, elles leur apprendront les premiers éléments de la lecture et de l’écriture, puis à travailler de différentes manières avec l’aiguille, et autres ouvrages honnêtes, qui conviennent à des filles chrétiennes. »
Source : Extrait de la Bulle du Pape Paul V, du 5 février 1618, par laquelle il confirme l’institut de Sainte Ursule.
Cité in : Aa. Vv., « En attendant le prince charmant. L’éducation des jeunes filles à Genève, 1740-1970« , Genève, 1997, pg. 64.
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L’éducation d’une fille de la noblesse française au XVIIe siècle
« Quand Dieu m’eut fait la grâce de me mettre au monde, qui fut l’année mil six cent treize, le vingtième de février, elle [la mère de l’auteur] eut assez de charité et de bon naturel pour me vouloir nourrir elle-même, quoique cela ne soit pas ordinaire en France aux gens qui ne sont pas du commun. Je lui en ai rendu un million de grâces avec beaucoup de raison, parce que je puis dire qu’il n’y a point de femme qui soit d’un meilleur tempérament, ni qui ait moins d’infirmités que moi. Elle m’éleva donc, cette bonne mère ; et sitôt que je fus hors de l’enfance, elle commença à me donner de petits soins dans sa maison, et me faisait toujours rendre compte de ce qu’elle m’avait commandé. Il n’y a rien qui ouvre tant les esprits des jeunes filles que de les faire agir de bonne heure, et je conseillerais à toutes les mères d’en faire de même; car, outre que cela les rend intelligentes, cela empêche aussi l’oisiveté, qui est un vice que notre sexe doit fuir plus que la peste. Ayant atteint l’âge de dix ou douze ans, je fus envoyée à Paris chez un frère de ma mère pour me façonner un peu et m’ôter mon air campagnard. On me fit venir des maîtres pour apprendre ce qu’une demoiselle doit savoir ; et à mon retour chez mon père, il crut que j’avais assez bien employé mon temps; car il avait tant de bonté pour moi, que tout ce que je faisais lui était agréable ; et même, comme mon humeur a été toujours martiale, je le priai de me donner un maître d’armes, ce qu’il m’accorda. J’avoue que je n’avais point plus de satisfaction que lorsque je tenais le fleuret en main. En exerçant ce métier avec mon maître, le poignet me devint assez ferme. Il y avait deux jeunes gentilshommes dans notre voisinage qui venaient souvent visiter mon père. L’un s’appelait du Buat et l’autre Varanne, cousins germains. Je leur faisais toujours quelque défi touchant le fleuret. Ils avaient assez de complaisance pour se mettre en garde, et de parer mes coups. Je m’y échauffais tout de bon, et l’on ne se séparait point que je n’eusse donné quelque botte. Mon père, qui y était présent, y prenait un plaisir extrême. Quant aux pistolets et fusils, je m’en démêlais assez pour faire feu et tirer juste. Outre ces divertissements, j’avais l’avantage d’avoir les plus belles voisines pour compagnes que l’on pût voir en ce temps-là. Nous nous assemblions presque tous les jours. C’étaient trois beautés blondes, mais dans la dernière perfection et du corps et de l’esprit. L’une se nommait mademoiselle de Varennes; l’autre, mademoiselle de Fleury, et la dernière mademoiselle de Quincy. Tous nos passe-temps aboutissaient à des petits divertissements, tels que sont la guitare, le chant, la promenade, les collations et les bains dans la petite rivière d’Yerre, dont l’eau est la plus claire qui se voie, et la plus bienfaisante. J’y admirais ces beautés avec plaisir, et je crois que si Cupidon s’y fût rencontré, il n’aurait pas été moins sensible à leurs charmes qu’à ceux de Psyché. J’allais aussi fort souvent au château de Grosbois auprès de ma soeur aînée, qui en avait épousé le capitaine; et je fus si heureuse que madame la duchesse d’Angoulême, à qui appartenait le château, me prit en affection. C’était cette grande duchesse, fille du connétable de Montmorency, la merveille de son temps et une des plus sages princesses que la terre porta jamais. Là je commençai à voir le grand monde, et j’y prenais un singulier plaisir. »
Mémoires de Madame de La Guette 1613 – 1676 écrits par elle-même. Paris, Mercure de France, 1982/2003, pp. 48 – 49.
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La vénalité des examens et des examinateurs à l’Université
« (…) Au mois de juillet 1651, j’allais prendre des licences à Orléans (…). On n’étoit pas en temps-là si difficile qu’on l’est aujourd’hui à donner des licences, ni les autres degrés de droit civil et canonique. Dès le soir même que nous arrivâmes, il nous prit fantaisie de nous faire recevoir, et, ayant heurté à la porte des écoles sur les dix heures du soir, un valet qui vint nous parler à la fenêtre, ayant sçu ce que nous souhaitions, nous demanda si notre argent étoit prêt. Sur ayant répondu que nous l’avions sur nous, il nous fit entrer et alla réveiller les docteurs, qui vinrent au nombre de trois, avec leur bonnet de nuit sous leur bonnet carré. (…) Un de nous, à qui l’on fit une question dont il ne me souvient pas, répondit hardiment : Matrimonium est légitima maris et foeminæ conjunctio, individuam vitæ consuetudinem continens, et dit sur ce sujet une infinité de belles choses qu’il avoit apprises par coeur. On lui fit ensuite une autre question sur laquelle il ne répondit rien qui vaille. Les deux autres furent ensuite interrogés, et ne firent pas beaucoup mieux que le premier. Cependant ces trois docteurs nous dirent qu’il y avoit plus de deux ans qu’ils n’en avoient interrogé de si habiles et qui en sçussent autant que nous. Je crois que le son de notre argent, que l’on comptoit derrière nous pendant que l’on nous interrogeoit, servit (…) à leur faire trouver nos réponses meilleures qu’elles n’étoient. Le lendemain, (…) nous reprîmes le chemin de Paris. (…)»
Charles PERRAULT (1628-1703), Mémoires de ma vie [1702] in Paul BONNEFON [Éd.], Mémoires de ma vie par Charles Perrault. Voyage à Bordeaux (1669) par Claude Perrault. Paris, H. Laurens, 1909, 251 p., pp. 29-30.
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L’acte de fondation du collège des Oratoriens d’Angers (1624)
« (…)7. Les pensionnaires et autres écoliers du (…) collège seront tenus d’assister à la sainte messe qui sera dite (…) par chacun jour (…) en la chapelle dudit collège et à la fin d’icelle sera faite prière pour le roi et la maison royale.
8. Les pensionnaires et autres écoliers seront tenus d’assister au catéchisme qui se fera audit collège tous les dimanches et fêtes.
9. Il y aura au moins six classes audit collège, savoir quatre pour enseigner les lettres humaines, langues grecque et latine et deux pour la philosophie dont le cours se finira en deux ans pendant lesquels l’on y enseignera la logique, la morale, la physique et la métaphysique.
10. L’exercice commencera tous les ans le troisième jour de novembre auquel jour se fera l’ouverture solennelle (…) et finira pour les lettres humaines la veille de Saint-Michel et pour la philosophie la veille de Notre-Dame de septembre. (…)
12. Auront lesdits principal et régents le soin et autorité requise pour faire que la jeunesse soit bien disciplinée, retenue et réglée en toute modestie tant au-dehors ou dedans du collège en gardant l’ordre et les lois. (…)
13. Pour l’entretènement des prêtres dudit collège, réparations et autres nécessités d’icelui, le principal fera recevoir (…) 8 sols par mois de chacun des écoliers de la quatrième classe, 12 sols des autres de troisième, 16 sols des autres et de la seconde et 20 sols des autres de la première et de la philosophie (…). »
Rapporté in Jean-François SOLNON [dir.], Sources d’histoire de la France moderne XVIe XVIIe XVIIIe siècle. Paris, Larousse, coll. « Textes essentiels », 1994, 863 p., pp. 424-5.
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Un exemple d’éducation au XVIIIe siècle
« Je suis né le 18 novembre 1718, à deux heures du soir, de Jean Grosley, avocat, et de Louise Barolet, fille de Pierre Barolet, marchand et conseiller de l’échevinage, et d’Élisabeth Drouot, d’une ancienne famille dans le même état. (…)
Élevé sous les yeux d’Élisabeth Noël, mon aïeule, j’eus pour instituteur, gouverneur et précepteur, une vieille servante (…).
Quoiqu’elle ne sût point lire, c’est elle qui me l’a appris : une demi-heure dans chaque soirée était consacrée à une lecture que je faisait dans les figures de la Bible. J’étais obligé de recommencer chaque phrase, tant qu’elle ne l’entendait point de manière à en saisir le sens, qu’elle m’amenait par là à sentir moi même. Quand je lisais sans m’arrêter aux points et aux virgules, elle frappait le livre du bout de soin fuseau, en me disant d’arrêter.
J’allais prendre les principes du latin chez un vieux maître d’école, nommé Huez. Tous les samedis, M. Huez terminait la classe de l’après-dinée par une histoire pieuse, dont le sujet, le plus souvent tragique, allait à prouver l’enfer et le purgatoire. (…)
Par les soins de M. Huez, j’entrai au collège en cinquième, à l’âge de sept ans. Cette nouvelle carrière en ouvrit une de nouveaux soins pour mon aïeule (…). Elle me faisait lever à six heures en toute saison, exigeait que je lui lusse mes versions ; et en tout temps ne me permettait de course et de récréation, que quand mon devoir était fait. La lecture du soir continuait : aux figures de la Bible se joignaient la vie des Saints, et celle des saints du diocèse. Ces lectures étaient interrompues de ma part, par des questions de toute espèce (…).
Entrant au Collège à l’âge que j’ai dit ce-dessus, il m’échut pour régent un Père Montisson, qui me conduisit jusqu’à la rhétorique, que je fis sous un petit Breton nommé Calabre. Ces deux professeurs étaient également peu chargés de latin. Le Père Calabre, que je pris en rhétorique, nous expliquait Tite-Live d’après l’unique traduction française qu’on eût alors de cet historien, celle de Duryer ; et toute explication qui ne s’y trouvait pas conforme était impitoyablement rejetée. Nous jugeâmes notre régent, sur cet attachement servile pour Duryer, et rien ne démentit ce jugement. (…)»
Pierre-Jean GROSLEY [1718-1785], Vie de Grosley, écrite par lui-même, Londres, Paris, 1787, rapportée par Robert MUCHEMBLED, Société, cultures et mentalités dans la France moderne XVIe-XVIIIe siècle. Paris, Armand Colin, coll. « Cursus », 1994, 187 p., pp. 146-8.
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Dans Clio-Texte : il y a des textes sur l’enseignement au XVIe siècle et d’autres textes en rapport avec l’éducation des femmes au XVIII et XIXe siècle .