La fusillade de Fourmies (Nord), le 1er mai 1891,  est un massacre qui a profondément marqué la mémoire ouvrière. Ce jour-là, la troupe mit fin dans le sang à une manifestation pacifique d’ouvriers et d’ouvrières  clamant : « C’est les huit heures qu’il nous faut ! ».

Le bilan fut de neuf morts et de 35 blessés. Parmi eux, des enfants et des jeunes femmes. L’événement fut   largement relaté en première page  par la presse nationale et commenté par la classe politique.

La chanson populaire et sociale  se fait également l’écho de l’événement sur  un mode mélodramatique, mettant en avant à la fois  la jeunesse et l’innocence des victimes des victimes mais aussi  la légitimité des luttes pour « les justes droits des travailleurs ».

Les fiancés du Nord

– 1 –
Ils étaient du même village
Ils s’aimaient tous deux tendrement
De s’unir par le mariage
Tous deux s’étaient fait le serment
Le gars, travailleur énergique,
Comme son père était mineur
Elle, ouvrière de fabrique,
Pour tout bien n’avait que l’honneur.
Elle était jeune et belle
Il était grand et fort
Chacun se les rappelle
Les fiancés du Nord (bis)

– 2 –
Quand ils passaient devant l’église
Tous les deux relevaient leur front
Lui, murmurait à sa promise :
C’est là que nous nous marierons
Si tu veux, Pierre, ajoutait-elle
Ce sera pour le mois de mai
Mois où la nature est si belle
Où tout dans l’air est embaumé.

Si tu veux, disait Pierre,
En l’embrassant bien fort
Qu’ils étaient beaux, naguère,
Les fiancés du Nord.
– 3 –
Avril vit la fin de leur rêve
Adieu, les beaux jours sont finis
Voici, soudain, qu’un vent de grève
A soufflé sur tout le pays
L’homme, l’enfant, même la femme,
Fatigués de trop durs labeurs
S’arrêtent et chacun réclame
Les justes droits des travailleurs

Dans ces jours de tristesse
Que leur importe l’or ?
L’amour est la richesse
Des fiancés du Nord.

– 4 –
Il rayonnait comme une aurore
Le premier jour du mois des fleurs
Ce jour où la France déplore
Le plus grand de tous les malheurs
Devant l’église, dans la foule,
Ils étaient dans les premiers rangs !
La poudre parle, le sang coule
Et tous deux tombent en expirant.

Oh! sinistre hécatombe
Que chacun pleure encor
Les voilà dans la tombe
Les fiancés du Nord.

– 5 –
Le lendemain, la foule entière
Suivant les parents en grand deuil
Accompagnait au cimetière
Ceux qu’avait unis le cercueil
Les pinsons à la voix sonore
Roucoulaient des sons éclatants
Et partout on voyait éclore
Les premières fleurs du printemps !

Elle était jeune et belle
Il était grand et fort
Chacun se les rappelle
Les fiancés du Nord.

Paroles : René Esse
Musique : Gaston Maquis