Causes et développement de l’industrialisation en Grande-Bretagne.

Début de l’industrialisation en Grande-Bretagne

a) Où et quand s’est-elle produite ?

Elle s’est produite en Grande-Bretagne où le phénomène est resté isolé pendant une cinquante d’années.
On lie généralement l’industrialisation à une révolution agricole qui l’aurait précédée. C’est un phénomène graduel.
– Révolution agricole vers 1700 (entre 1680 et 1720)
– Industrialisation vers 1760 (entre 1740 et 1780)

b) Préalables nécessaires, mais pas suffisants :

1) énergie : emploi précoce d’une énergie minérale (calorifique, charbon de terre à la place du charbon de bois). Cela reste limité dans une économie préindustrielle.

2) transports, espaces et territoires : transport maritime ou fluvial important (aucune ville anglaise est à plus de 100 km de la mer) , prairies nombreuses pour l’élevage, matières premières abondantes (mines de charbon).

3) modernité : mentalité libérale et religion protestante encourage l’esprit d’entreprise. Le gouvernement est ouvert au développement économique, le capitalisme commercial est important. Il y a continuité ici plutôt que rupture (du Moyen Age au XIXe siècle).

4) expansion coloniale : le coton du Lancashire se développe à la fin du XVIIIe et enlève au coton indien le marché britannique avant d’envahir à son tour le marché indien.

5) démographie : grâce à la Révolution agricole la population peut croître sans être freinée par un manque de subsistances, plus de monde = plus de marché, moins de paysans = plus d’ouvriers disponibles.

Tous ces points ne sont pas réservés à la Grande-Bretagne. Ils se trouvent aussi ailleurs (Hollande, France), mais c’est en Grande-Bretagne qu’ils furent tous réunis en même temps. Leur conjonction favorisa l’industrialisation , mais on ne peut pas dire qu’elle la provoqua automatiquement. Ces facteurs positifs sont née en Europe et sont dus à l’esprit d’ouverture que manifeste la civilisation européenne depuis la Renaissance (on accepte assez facilement les innovations). Il faut cependant nuancer car l’Angleterre du début du XVIIIe siècle n’est pas plus développée que la Chine autour de Shanghaï.

c) Spécificités britanniques :

conséquences :
> société plus monétaire
> urbanisation plus forte (tissu commercial plus fort, plus de technique)
> plus de marché (consommation en ville, transports par bateaux)

2) insertion précoce dans la division internationale du travail

causes :
> colonies de peuplement dans zone tempérée (13 colonies)
> investissement militaire (Royal Navy)
> mécanisation du travail du coton, car salaire élevé au Royaume-Uni.

conséquences :
> avantages pour le commerce britannique
> primauté dans spécialisation internationale (culture et transformation)

3) les guerres de la Révolution française et de l’Empire ont coupé l’Europe du monde et la Grande-Bretagne de l’Europe. Pendant 25 ans (1790-1815) l’économie internationale s’est organisée autour de la Grande-Bretagne qui en a profité pour augmenter son avantage technologique, commercial et colonial. Cette coupure fondamentale favorise l’avance britannique. Pendant presque un siècle la Grande-Bretagne est l’atelier du monde, puis elle voit sa suprématie contestée à partir de 1860. Les EU rejoignent le niveau industriel de la Grande-Bretagne en 1900.

L’industrialisation de la Grande-Bretagne dans la première moitié du XIXe siècle (statistiques)

D’après Eric J. Evans, The Forcing of the Modern State. Early Industrial Britain, Longmann, 1983.

Tableau modifié

Importations de la Grande-Bretagne
1784-1856 (en milliers de £)

1784-86 1794-96 1804-06 1814-16 1824-26 1834-36 1844-46 1854-56
Matières premières pour le textile 4’680 6’891 13’436 18’113 18’459 29’161 24’663 42’831
Autres matières premières 5’237 8’764 14’373 18’903 17’671 18’498 26’370 46’601
Nourriture 9’609 18’212 23’953 32’018 26’370 20’680 27’386 54’469
Industries 3’235 4’050 3’796 2’762 3’889 1’926 3’544 7’680
Total 22’761 37’917 55’558 71’796 66’389 70’265 81’963 151’581
Chiffres tirés de Eric J. Evans, The forging of the modern State, 1783-1870,
London & New York, Longman, 1996, p. 415