Noël se traduit par une multitude de chansons dont quelques-unes sont passées à la postérité. Si actuellement Mariah Carey a les honneurs du public, il est toujours intéressant de se pencher sur les morceaux oubliés, reflets d’une époque et des préoccupations de leurs auteurs. En 1888, Le Noël des gueux fait partie des airs chantés régulièrement jusque dans les années 20 par différents interprètes. Il a pour auteur un quatuor dont les membres travaillent régulièrement ensemble :

Félix Mortreuil, originaire de Bordeaux où il est né le 29 novembre 1855. Félix Mortreuil est le fils d’un dramaturge et le frère cadet d’un compositeur qui connut aussi son heure de gloire : Victor Mortreuil [1854-1891]. Il adhère à la Sacem en 1884 et décède à Paris le 28 octobre 1928, non sans laisser un répertoire impressionnant de plus d’un millier d’œuvres.

Félicien Varguès : pseudonyme d’Hippolyte Augustin Vargues. il est né le  à Paris et mort le  à Paris. Compositeur et chef d’orchestre français à l’oeuvre prolifique, il signa plus de mille deux cent cinquante musiques de chansons, de la fin du XIXIème et du début du XXème siècles, dans des styles divers et variés (polka, gavotte …)

Edmond Gérald : né à Périgueux le 8 février 1856 et décédé le 19 mars 1939, de son vrai nom Raoul Gérald Marie de La Borie de La Batut, Edmond Gérald est issu d’une vieille famille de la noblesse française périgourdine, son père Edmond Henri portant le titre de Vicomte.

Mais dans les paroles, Noël n’est guère mis en avant : la fête qui n’est qu’un répit dans des vies bien remplies, s’efface au profit des trois facettes du peuple : le paysan, le mineur et le soldat.


Le Noël des Gueux

Bon laboureur, debout ! Le jour se lève
Et du soleil bientôt le disque d’or
De tes épis va réchauffer la sève
Viens saluer le dieu de Messidor
Par les sillons les garçons et les filles
Troupeaux joyeux s’en vont en liberté
Sous le ciel bleu couper de leurs faucilles
Le blé qui doit nourrir l’humanité

Chante paysan que ta voix puissante
En accents joyeux, monte vers le ciel
La moisson paraît belle et florissante
Chante paysan, c’est Noël, c’est Noël !

Pauvre mineur qui descend dans la houille
Sans t’occuper quel sera ton destin
Comme un damné, pour vivre ta main fouille
Un puits obscur et toujours incertain
A ton foyer ta brave ménagère
T’attend, le cœur, hélas ! bien anxieux
Sors du tombeau, renais à la lumière
Voici Dimanche, un jour aux malheureux

Chante, noir mineur, que ta voix s’élance
En accents joyeux, monte vers le ciel
Dimanche est pour toi un jour de délivrance
Chante noir mineur, c’est Noël ! c’est Noël !

Vaillants soldats, aux lauriers éphémères
Qui contemplez vos milliers de drapeaux
La guerre hélas, fait pleurer bien des mères
Assez de sang, de deuils et de tombeaux !
Dans l’avenir une aurore meilleure
Sur le passé jetant un voile épais
Se lèvera pour sonner enfin l’heure
Où régnera l’universelle paix

Chante, fier soldat, que ta voix altière
En accents joyeux, monte vers le ciel
Et les yeux fixés vers notre frontière
Fier soldat, attends, c’est Noël ! c’est Noël !

Paroles : Georges Baron – Félix Mortreuil

Musique : Edmond Gérald- Félicien Varguès