Entre juin et décembre 1973, les actes racistes se multiplièrent dans le Midi de la France. Onze ans après la fin de la guerre d’Algérie, ces manifestations violentes, parfois meurtrières, de racisme anti-algérien firent de 1973 « une année noire dans le Midi ».
Nous reprenons ici à dessein le titre d’un article rédigé par l’historien Yvan Gastaut et publié dans l’excellente revue trimestrielle « Hommes et migrations », éditée par le Musée de l’Histoire de l’immigration. L’article d’Yvan Gastaut a été publié en 2020 dans le numéro 1330 (pages 30 à 36) et les informations qui suivent en sont extraits.
Le texte présenté est un éditorial du journal régional « Le méridional », publié dans l’édition du 26 août 1973. En 1973, Le méridional tire à environ 80.000 exemplaires, ce qui en fait l’un des journaux les plus lus des Bouches-du-Rhône et de la ville de Marseille. Cet article d’une rare violence est une réaction à chaud à l’assassinat, la veille, d’un chauffeur de bus marseillais par un ressortissant algérien qui, semble-t-il, souffrait de troubles mentaux. Le meurtre du chauffeur a suscité une émotion considérable parmi la population marseillaise.
L’éditorial est signé par le rédacteur en chef du journal Gabriel Domenech (1920-1990), connu pour son engagement en faveur de l’Algérie française et ses accointances avec d’anciens membres de l’OAS. Plus tard, entre 1986 et 1988, il fut député du F.N à l’Assemblée nationale.
Dans une cité aussi cosmopolite que Marseille et habituée aux vagues d’immigration successives, les articles de la presse locale à connotation xénophobe ou raciste ne sont pas une nouveauté. Ce qui frappe ici, cependant, c’est la violence des propos et la haine anti-algérienne qui s’exhale de chaque phrase, l’auteur allant jusqu’à justifier par avance les éventuelles ratonnades qualifiées « d’actes de justice directe ».
Comme le dit justement Yvan Gastaut : 1973 correspond bien « au temps de la rancœur liée aux décolonisations qui s’exprime plus nettement sur le littoral méditerranéen. La perte de l’Algérie reste une plaie ouverte ». (1)
(1) : 1973 l’année intense , revue Hommes et migrations n° 1330, 2020, page 36
Assez, Assez, Assez !
La folie n’est pas une excuse. Cet assassin, les pouvoirs publics sont gravement coupables de l’avoir laissé pénétrer sur notre territoire. Nous en avons assez! assez de voleurs algériens, assez de casseurs algériens, assez de fanfarons algériens, assez de trublions algériens, assez de syphilitiques algériens, assez de violeurs algériens, assez de proxénètes algériens, assez de fous algériens, assez de tueurs algériens. Il faut trouver un moyen de les marquer et de leur interdire l’accès au sol français. Un jour ou l’autre, il faudra employer les CRS, les gardes mobiles, les chiens policiers pour détruire les casbahs marseillaises si d’ores et déjà des mesures ne sont pas prises pour limiter l’immigration algérienne et toutes les plaies sociales qui en découlent. Ne se sentant pas protégés, les citoyens risquent d’avoir recours à des actes de justice directe qui ne pourront qu’entraîner le désordre.
Gabriel Domenech, le Méridional, 26 août 1973, éditorial « Assez, Assez, Assez! »
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