Située sur la dorsale océanique au milieu de l’Atlantique, au contact entre deux plaques tectoniques,  l’Islande est une terre à l’activité  volcanique  intense, comme en témoigne l’article ci-dessous.

L’éruption volcanique du Laki,  au sud de l’Islande, a  commencé « le premier jour de la Pentecôte », le 8 juin 1783 et a duré jusqu’en février 1784. Le document présenté  est la traduction d’un article publié en espagnol dans la Gazeta de Madrid du 17 octobre 1783. La Gazeta de Madrid est un périodique officiel de la Couronne espagnole qui s’attache pour l’essentiel à traduire des informations venues des divers royaumes et villes d’Europe.

L’article qui nous concerne est la traduction d’un article paru à Copenhague, 5 semaines plus tôt, le 10 septembre 1783. (On mesure ainsi la lenteur de la circulation de l’information en Europe au  18ème siècle). L’Islande étant sous la domination danoise, c’est donc via le Danemark que les informations concernant l’éruption volcanique du Laki parviennent en Europe.

Le rédacteur met en évidence le caractère spectaculaire de l’éruption, ses conséquences sur la géographie de la zone affectée et sur les conséquences humaines catastrophiques mais qui ne peuvent être  encore évaluées.  On remarquera cependant que si l’auteur évoque les « ténèbres les plus horribles » qui recouvrent l’Islande, il ne fait aucune relation avec les anomalies météorologiques qui ont affecté l’Europe pendant l’été 1783. 


Copenhague 10 septembre 1783

 Le rapport suivant a été reçu d’Islande sur les événements qui se sont produits cette année sur cette île.

« Le premier jour de la Pentecôte [8 juin 1783], un volcan s’est formé sur le mont Skaftan situé dans le district de Skaftefield, et il s’est tellement dilaté que le lac de Skaftawé s’est asséché, n’offrant  plus dans toute son extension qu’un sol caillouteux. Deux églises et 8 maisons d’agriculteurs ont été calcinées en un instant. Les flammes de cette nouvelle ouverture de la terre couraient comme les vagues de la mer, et brûlaient tout ce qu’elles rencontraient, transformant même les pierres en feu : parfois elles s’étendaient avec une grande violence, et d’autres fois elles arrêtaient leur fureur, mais toujours en gagnant du terrain, car selon les  dernières nouvelles, elles avaient ravagé 15 milles terrestres de longueur sur 7 milles de largeur. Des dégâts plus importants doivent encore être suspectés, étant donné que les vapeurs de soufre, de salpêtre, de sable et de cendre qu’exhalent les  terres, ont recouvert l’atmosphère de telle manière que tout le pays souffre des ténèbres les plus horribles. Depuis le huitième jour après la Pentecôte, le soleil n’a pas pu donner la moindre lumière ; et au lever et au coucher du soleil, cela ressemblait à un grand volume de feu immergé dans des vapeurs très denses. Cette obscurité effrayante empêche de connaître davantage  les circonstances plus précises : de sorte qu’on ne sait pas avec certitude combien de montagnes et de volcans se sont formés et combien de terrain s’est formé, et combien de terrain ce terrible phénomène de la nature prend déjà. Le plus digne d’attention sont les sommets et les hautes montagnes que l’on aperçoit  dans les champs qui avant étaient  plats. 

-Ajoutez à cela que la nouvelle île qui a surgi  de la mer près des côtes de Kugles-kiare, s’élève de plus en plus chaque jour, et brûle continuellement à tel point que les pierres calcinées qu’elle rejette atteignent la rive opposée. Comme l’entendement ne peut savoir ce qui résultera de ces bouleversements étonnants, la population  vit dans la plus grande angoisse, s’attendant à de grands malheurs.

Gaceta de Madrid du vendredi 17 octobre 1783, pages 869-870


Version originale en espagnol

Copenhague 10 de Setiembre de 1783

Se ha recibido la siguiente relación de Islanda sobre los sucesos acaecidos este año en aquella Isla.

“E1 primer dia de Pentecostés se formó en el monte Skaftan situado en el distrito de Skaftefield un volcán, y se dilató tanto que el lago de Skaftawé ha quedado seco, no presenciando ahora en toda su extensión sino un terreno pedragoso. Dos Iglesias y 8 casas de labradores fueron calcinadas a un tiempo. Las llamas de esta nueva abertura de la tierra corrían como las olas del mar, y abrasaban quanto encontrarían , convirtiendo en fuego hasta las mismas piedras : unas veces se dilataban con gran violencia , y otras detenían su furia, pero ganando siempre terreno, pues según los últimos avisos habían asolado 15 millas de tierra en largo, y 7 en ancho. Aún deben recelarse mayores daños , supuesto que los vapores de azufre, salitre, arena y ceniza que exhalan las tierras , han cubierto de tal modo la atmosfera que en todo el país se padecen las mas horrendas tinieblas. Desde el octavo día despues de Pentecostes no ha podido dar el sol la menor luz ; y al levantarse y al ponerse parecía un gran volúmen de fuego metido entre vapores densísimos. Esta espantosa obscuridad impide se reciban circunstancias mas particulares : de suerte que a punto fijo no se sabe quantas montañas y volcanes se han formado y quanto terreno se han formado, y quanto terreno coge ya este terrible fenómeno de la naturaleza. Lo mas digno de atención son las eminencias y montañas altas que se advierten en los campos que ántes estaban llanos.

-Agrégase a esto que la nueva Isla que brotó el mar cerca de las costas de Kugles-kiare , se eleva cada dia mas, y arde continuamente con tal extremo que llegan a la orilla opuesta las piedras calcinadas que arroja. Como el entendimiento no puede alcanzar lo que resultará de estos trastornos asombrosos, vive el pueblo en el mayor conflicto recelando grandes males.

Gaceta de Madrid del viernes de 17 de octubre de 1783, P.869-870

Y Eruptions volcaniques et irrégularités météorologiques- 1818