Réélu confortablement Président de la République avec 54 % des suffrages le 8 mai 1988 face à son Premier ministre Jacques Chirac, François Mitterrand nomme Michel Rocard à Matignon. Le nouveau gouvernement souffre cependant d’un gros handicap : le parti présidentiel, le Parti socialiste, est la seule formation politique d’importance à soutenir un gouvernement qui n’a pas de majorité dans une Assemblée nationale dominée par la droite RPR-UDF.
La situation relève d’une logique politique implacable.
Avant 2000, le président de la République est élu pour 7 ans, alors que le mandat de député n’est que de 5 ans. Cette absence de concordance entre les élections présidentielles et législatives n’est pas sans conséquence à l’occasion de l’élection et de la réélection de François Mitterrand. En 1981, la situation est la suivante : l’Assemblée nationale, élue en 1978 et dominée par la droite, est dissoute par le nouveau président de la République. Le nouveau Président de gauche n’a donc pas le choix : il doit dissoudre pour disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale. Les Français suivent une certaine logique institutionnelle et lui accordent une majorité confortable de 329 députés, reléguant la droite chiraquienne à quelque 150 élus.
En 1988, la donne est quelque peu différente, puisque si François Mitterrand est réélu à l’Elysée, le président socialiste sort de deux années très compliquées. La nomination de Jacques Chirac à Matignon (qui a un peu souffert de cette cohabitation…) marque la première cohabitation de l’histoire de la Vème République, la droite ayant gagné les élections législatives de 1986. Par conséquent, en mai 1988, François Mitterrand n’a donc, une nouvelle fois, pas le choix : il doit dissoudre. Si la gauche de gouvernement remporte ces nouvelles élections, le succès est très modeste, puisque celle-ci ne recueille que 275 députés (sur 575), échouant à obtenir la majorité absolue.
Françaises, Français,
Fort de la confiance que vous m’avez accordée dimanche dernier, 8 mai, et comme je m’y étais engagé devant vous, j’ai voulu assurer sans délai le fonctionnement normal de nos institutions.
Dès mardi, j’ai nommé un nouveau Premier ministre, M. Michel Rocard, qui a reçu pour mission de former le gouvernement en recherchant l’ouverture politique qui permettra aux Français de s’unir autour des valeurs permanentes, des valeurs essentielles de la démocratie.
Hier, vendredi, le gouvernement de la République dûment constitué s’est mis au travail. Ainsi, en moins d’une semaine, la continuité de l’Etat a-t-elle été réaffirmée.
Mais le Premier ministre m’a fait savoir que, faute des concours nécessaires, et malgré ses efforts, il ne s’estimait pas en mesure de réunir la majorité parlementaire solide et stable dont tout gouvernement a besoin pour mener à bien son action.
Je constate, pour le déplorer, que l’ouverture que j’appelle de mes voeux n’a pu se réaliser jusqu’ici aussi largement que je l’avais souhaitée.
J’ai donc le devoir d’en tirer les conséquences. Conformément à l’article 12 de la Constitution et après avoir procédé aux consultations qu’il prévoit, j’ai signé, voici quelques instants, le décret prononçant la dissolution de l’Assemblée nationale.
La France cependant ne saurait s’enliser indéfiniment dans des débats électoraux. Il faut aller vite. Aussi, ai-je également décidé, en accord avec le Premier ministre, de fixer les élections législatives aux 5 et 12 juin prochain, c’est-à-dire aussi rapidement que m’y autorise la Constitution.
Mes chers compatriotes, dans la situation présente, je ne connais qu’une réponse : que le peuple décide et tranche. C’est celle que j’ai choisie sans changer en rien ma détermination pour aujourd’hui et pour demain d’unir la France et de rassembler les Français.
Je vous vous invite, quelle que soit votre famille de pensée, vous qui avez soutenu mon projet le 8 mai et vous qui voulez nous rejoindre, à élire la majorité parlementaire qui nous aidera à faire avancer le pays et à préserver ces biens communs que sont pour nous la République et la démocratie, je veux dire le respect des lois et le respect des autres.
Vive la République !
Vive la France !
Allocution radiotélévisée de François Mitterrand, Président de la République, 14 mai 1988, depuis le Palais de l’Élysée
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Bonjour Pierre,
la rédactrice de cet article étant en vacances et ayant d’autres chats à fouetter, je vais répondre à ton commentaire en tant que coadministrateur de Clio-Texte. La réforme du mode de scrutin en 1958 était destinée à dégager des majorités présidentielles stables. En 1988, aucun camp n’atteint la majorité absolue, une première sous la cinquième République, me semble-t-il. Sachant que le président Mitterrand vient d’être réélu avec une majorité confortable, considérer que le succès des socialistes aux Législatives de 1988, un mois plus tard, est modeste ne me paraît pas choquant.
Quant à la contextualisation, est-il vraiment besoin de mettre les points sur les « i », tant les motivations et les enjeux pour le président nouvellement élu sont évidents?
Cordialement,
Gilles
« Si la gauche de gouvernement remporte ces nouvelles élections, le succès est très modeste, puisque celle-ci ne recueille que 275 députés (sur 575), échouant à obtenir la majorité absolue. »
Succès très modeste? C’est un jugement personnel, biaisé et faux. Qui ne repose sur aucun fait!
Article par ailleurs assez médiocre qui ne cerne pas les enjeux et surtout ne contextualise pas vraiment cette dissolution…..