Le journal L’Humanité, « organe central du parti communiste » français, a accordé dans ses colonnes une place notable au voyage qu’Édouard Herriot effectua en URSS, entre le 26 août et le 11 septembre 1933. Au même moment, d’autres quotidiens français consacraient de longs articles à la famine en Ukraine.

Pendant ( et après…)  son périple au pays des Soviets, Herriot ne fut pas avare de déclarations louant « les immenses progrès réalisés dans tous les domaines, sous le gouvernement des ouvriers et des paysans »

L’article présenté ici est l’éditorial du journal L’Humanité, du 7 septembre 1933. À cette date, Herriot est encore  à Moscou. L’auteur Benoît Frachon est un   dirigeant syndicaliste et il est membre du bureau  politique du PCF.

L’argumentaire employé par B. Frachon est classique mais efficace. Si un ennemi de classe tel qu’Édouard Herriot,  » ennemi acharné du communisme et du régime soviétique », reconnaît «  l’amélioration considérable apportée là-bas à la situation matérielle et culturelle des travailleurs des usines et des champs », celui-ci ne saurait mentir… Par conséquent, ceux qui affirment  le contraire, en dénonçant par exemple la famine en Ukraine, sont dans le mensonge et la propagande anti-communiste la plus primaire…


LES DÉCLARATIONS D’HERRIOT

HERRIOT est en Union soviétique, il constate tâches les immenses progrès réalisés dans tous les domaines, sous le gouvernement des ouvriers et des paysans.

Il communique, ses impressions à la presse.. Elles indiquent l’amélioration considérable apportée là-bas à la situation matérielle et culturelle des travailleurs des usines et des champs.

Ces constatations, loin de nous embarrasser, comme se plaisent à le répéter chaque jour socialistes et bourgeois de « gauche », nous remplissent d’aise. Un ennemi acharné du communisme et du régime soviétique est contraint de constater que, sous la direction de leur Parti communiste, les ouvriers et les paysans, russes construisent à grande allure le socialisme et que tout, là-bas, prospère, quand dans tous les pays capitalistes, y compris la France représentée si bien par Herriot, c’est  le chaos, la   régression. Eh bien! voilà pour gêner seulement ceux qui, depuis des années, annoncent la faillite du régime soviétique. Nous pouvons bien dire que  parmi ceux-là le parti socialiste fut et reste au premier rang.

̃ Quand M. Herriot déclare que le niveau, de vie des masses en U.R.S.S. s’est considérablement amélioré, peut-on trouver une condamnation plus cinglante du régime capitaliste sous le joug duquel sont accablés les travailleurs d’ici ?
Et c’est nous qui serions ̃ ennuyés ? MM. Les socialistes, défenseurs du régime, soutiens de ses gouvernements, hier d’Herriot, aujourd’hui de Daladier, auraient-ils perdu tout sens commun ?
Mais là n’est pas la question la plus importante. MM. les chefs socialistes et bourgeois de «gauche » veulent utiliser le voyage de M. Herriot pour cacher aux masses ouvrières la politique de guerre et de réaction de l’impérialisme français et endormir leur vigilance.
Ils veulent faire croire que les modifications survenues ces derniers temps dans les pays capitalistes, contraignant le capitalisme français à apporter lui aussi quelques modifications dans sa politique impérialiste, signifient l’abandon de toute tentative de violence à l’égard de l’Union soviétique. Leur astuce, va même jusqu’à nier qu’une telle politique ait jamais existé.

Nous ne sommes nullement gênés par le voyage de M. Herriot pour dénoncer que les organisations de gardes blancs continuent, sous le gouvernement de «gauche » comme sous celui de Tardieu, à jouir en France de la plus grande hospitalité et de la plus complète bienveillance. Cette tolérance n’est-elle pas la confirmation de ce que nous n’avons cessé de dire aux prolétaires « Ne vous laissez jamais tromper par les déclarations hypocrites de vos ennemis de classe.”

Si nous avons la plus entière confiance en l’Union soviétique, si nous sommes convaincus de sa volonté de paix et du rôle qu’elle a joué et qu elle joue dans le monde pour son maintien, notre bourgeoisie n’a aucun droit à une telle confiance de notre part.

Par quel miracle un État capitaliste, dont tous les efforts sont tendus pour empêcher les prolétaires et leurs organisations révolutionnaires, d’apporter les solutions que les ouvriers et les paysans russes ont apportées chez eux, cesserait-il de considérer le pays du socialisme comme un ennemi ?

Messieurs les chefs socialistes, à qui est confié actuellement le rôle principal d’attaque contre l’Union soviétique, savent bien qu’il n’en est rien.

Nous suivons pas à pas les manœuvres et la tactique que les événements imposent à l’impérialisme français ; nous marquons les coups lorsqu’un de ses chefs est contraint de reconnaître les succès de l’Union soviétique, mais on ne prendra jamais en défaut notre vigilance autour de la patrie socialiste.

  Benoît FRACHON

L’Humanité, 7 septembre 1933, éditorial de Benoît Frachon, page 1