» Tabler sur des trucs légaux pour se tirer de la mistoufle est aussi illusoire que de réclamer l’appui d’une crapule contre son associé. Le gouvernement est, forcément, l’ami des exploiteurs : ils sont indispensables l’un à l’autre. C’est se monter le job que d’attendre des autorités quelque chose qui nous soit favorable. Les socialos politicards sont d’un avis contraire : ils prétendent forcer la gouvernance à faire des réformes. Ils se trompent, ou bien mieux, ils nous trompent. Y a qu’à voir à quoi ils aboutissent. Tous les jours ils abandonnent un morceau de leur ancien programme; avant peu, y aura plus mèche de les distinguer d’avec les radicaux. Ainsi, les huit heures et le minimum de salaire dont ils font tant d’épates, ce n’est qu’une amorce pour nous enferrer. Si c’était pour eux autre chose que de la poudre à foutre aux yeux du populo, s’ils voulaient réellement décrocher ces réformes – c’est à l’exploiteur, et non à l’État, qu’ils chercheraient à forcer la main. Ce qu’il faut se fourrer dans le siphon, c’est que nous n’avons aucun appui à espérer: ceux qui nous en promettront le feront avec l’intention de nous poser un lapin.

Donc, si nous voulons nous émanciper, ne comptons que sur nos propres forces. Faisons nos affaires nous-mêmes et garons-nous des intermédiaires. En tout et pour tout, les intermédiaires sont d’abominables sangsues.  »

Source : Émile Pouget, Almanach du Père Peinard.