Voici des Lettres qui furent données par Henri II à Compiègne, en date du 3 juillet 1557, contre les prédicants qui oeuvrent en Cévennes :

Henri, par la grace de Dieu, Roy de France, au séneschal de Nismes ou son lieutenant, Salut. Nous ayans ces jours passez entendus, que ung soy disant religieux avoit presché publiquement, en la ville d’Anduze, plusieurs propos erronez et scandaleux contre notre religion, et que votre lieutenant criminel s’estoit transporté sur les lieux, et informé et décerné plusieurs décrets, tant contre ledit prétendu religieux, que autres ses sectateurs et imitateurs, plusieurs desquels s’estoient assemblez en grand nombre, faisant prescher tant par ledit religieux que autres, ledits propos et opinions erronées et scandaleuses, Nous aurions par nos lettres patentes mandé à votredit lieutenant criminel, assembler le prévost de vos amez et féaulx les maréchaux de France en notredit pays de Languedoc, avec ses lieutenants et officiers, et autres personnages en tel nombre qu’estoit requis, pour mettre ses décretz a exécution, et procéder contre les délinquans et coupables, ainsi que plus à plain le contiennent Nos lettres patentes sur ce expédiées; suivant lesquelles notredit lieutenant, prévost et autres auroient commencé procéder à l’exécution desdits décretz, dont advertis lesdits prescheurs et autres leurs favoris mal sentans de ladite religion, se seroient assemblez en armes en grand nombre jusques à 2 ou 3000 personnes, tenans les champs au pays des Sévennes, avec main forte en armes et resistance, mesmes en la ville de Saint Maurice, contre les officiers tant spirituels que nostre, favorisant certains prescheurs qu’ils ont faict venir de Genefve, et par force et violence faict prescher publiquement lesdits prescheurs, et autres, lesdites folles, erronées et scandaleuses opinions, et en oultre faict et commis plusieurs grands et énormes scandales publics en la ville de Saint Privat et autres lieux circonvoisins, contre l’honneur de Dieu et du Saint Sacrement, et autrement contre et au mépris et irrévérence de nostredite religion; dont avertie Nostredite cour de Parlement de Tholoze, auroit commis et délégué aucuns présidens et conseillers d’icelle, pour se transporter sur les lieux, faire et parfaire le procès aux déliquans, et contre eulx procéder, ainsi que le cas le requéroit.
A ceste cause, et à ce qu’ils puissent plus commodément et seurement vaquer au faict de leurdite commision, Nous avons bien voulu sur ce pourveoir et Nous mandons, comettons et enjoignons, que lesdits commissaires et autres procédans contre les susdits, trouveront aucuns empeschements, rebellions, forces ou désobéissances, vous leur donnez main forte et armée, si besoing est et lesdits commissaires voyent que faire ce doibve; et pour cest effect faictes convoquer et assembler le ban et arrière ban de vostre séneschaussée, gens de guerre, tant de pied que de cheval, estans en icelle et ez environs, ensembles les seigneurs des lieux, consuls et communautez des villes et autres, et ce sur peine de confiscation de corps et de biens, et d’estre dits rebelles et désobéissans à Nous et à justice, en tel et si grand nombre, que la force et authorité Nous en demeure et à justice, de manière que ceulx que trouverez coulpables soient prins vifs ou morts, et pour ce faire mener le canon et autres équipaiges que verrez estre nécessaires, et si en procédant à l’exécution desdits décretz, captions, prinses, aucuns desdits délinquants font resistance, et se trouvent blessez, tués ou occiz, Nous ne voulons ni entendons que aucune chose en soit imputée à vous, vos lieutenans, prévostz ni autres qui vous accompagneront auxdites prinses, ni que aucuns soient receus à se rendre parties pour raison desdits homicides et blessures.

Ains vous avons et tous ceulx qui assisteront avec vous, déclarez et déclarons exemptz de toute pugnition, amende et correction, et sur ce imposé et imposons silence à Nostre procureur présent et advenir, et à toutes personnes quelconques qui en vouldroient poursuivre réparation de ce faire, et de contraindre les subjectz audit ban et arrière ban, seigneur et autres, vous assister en la forme susdite, vous avons donné plain pouvoir, aucthorité, commission et mandement spécial, par ces présentes, etc.

Donné à Compiègne, le 3 juillet 1557 et de Nostre règne le XIe.

Signé : Par le Roy en son Conseil, etc.

Source : « Histoire générale de Languedoc, avec les notes et pièces justificatives », par Dom Cl. DEVIC et Dom J. VAISSETE, religieux bénédictins de la Congrégation de Saint Maur, Toulouse, tome XII, 1889, page 559, n°232.