L’article ci-dessous a été publié dans le journal hebdomadaire le monde illustré du 21 novembre 1868. Il relate ce qui est peut être la toute première course cycliste de femmes organisée en France. L’événement se déroule à la fin du Second Empire à un moment où la pratique du vélocipède connaît un effet de mode dans la bonne société.

L’événement dut paraître suffisamment étonnant, et même incongru pour  certains, pour qu’on en trouve un écho dans la presse du temps. L’article signé par une femme a très probablement été écrit par un homme pour un public d’hommes et vise à faire sourire les messieurs. Il est accompagné à la page suivante d’un dessin en pleine page et l’illustration est sans doute ici plus importante que le texte.  Certes, « la tenue des vélocipédistes ne laissait rien à désirer », mais le pédalage oblige ces dames à dévoiler leurs jambes et ceci est-il bien raisonnable ? 


COURSES DE VELOCIPÈDES (DAMES)

Bordeaux, le 7 novembre 1868.

Monsieur le Directeur,
Ayant fait partie du concours de vélocipèdes qui a eu lieu dimanche, 1er novembre, au parc Bordelais, j’ai l’honneur de vous adresser un petit compte-rendu de la course des dames, et de plus un croquis représentant leur arrivée au but, espérant que vous voudrez bien le faire
paraître dans votre prochain numéro.

Le programme était ainsi conçu :
COURSE DES DAMES (VITESSE)
Trois prix : 1e Montre en or; — 2e médaille d’or; —
3e médaille d’argent.

Quatre engagées.

La tenue des vélocipédistes ne laissait rien à désirer.

Trois d’entre elles étaient coquettement habillées en pages : la quatrième, en corsage et jupon rouge, la tête ornée d’une calotte à gland d’or retombant sur les épaules.

Au signal du départ, toutes s’élancèrent avec agilité, mais Mlle Louise prit, presque tout de suite, une avance qu’elle garda longtemps. Elle fut rejointe à cinquante mètres du but par Mlle Julie, qui courut alors de conserve avec elle et gagna, par un effort surhumain, la course de… 1/2 longueur de pédale.

Troisième, Mlle Louisa ; quatrième, Mlle Amélie.

Veuillez agréer, monsieur le Directeur, l’hommage de mes sentiments respectueux.

A. SAINTE-MARIE PRICOT, vélocipédiste.

Le monde illustré, 21 novembre 1868

le vélocipède et les femmes